À chaque année sa génération pour les MacBook Pro avec Touch Bar. Le cru 2018 est la troisième du genre, elle conserve les acquis de cette famille tout en apportant des changements fondamentaux sous le capot, tout particulièrement pour la version 13 pouces. La troisième est-elle la bonne ? Test, à la cool parce que c’est l’été.
Le MacBook Pro 13 pouces avec Touch Bar ne nous avait jusqu’à présent pas spécialement emballé. Les cuvées 2016 et 2017 parvenaient difficilement à creuser l’écart avec les modèles sans Touch Bar, bien plus abordables et présentant des performances proches tout en conservant une rangée de vraies touches de fonction qui font schkalk sous les doigts.
La génération 2018 apporte enfin une vraie différenciation entre les gammes de 13 pouces. D’abord de manière purement artificielle, les MacBook Pro sans Touch Bar n’ayant pas (encore ?) bénéficié d’une mise à jour. En face, et pour le même prix que l’an dernier, les machines avec Touch Bar s’offrent des processeurs « Coffee Lake » avec des cœurs supplémentaires, et des mignardises en plus.
Du cœur à l’ouvrage
Le MacBook Pro 13’’ a du cœur. Quatre, pour être précis : pour la première fois, cette gamme accueille en effet des processeurs quadricœur, une folie autorisée par la puce Core i5-8259U à architecture de 8e génération, dite « Coffee Lake » (la 7e génération, « Kaby Lake », équipe les modèles 2017). Là où les précédentes versions de ces machines se contentaient d’un duo de cœurs, ces deux cœurs supplémentaires font des miracles. Et ce n’est pas Geekbench qui dira le contraire.
Le test synthétique Geekbench confirme la grosse patate de ce MacBook Pro. Sur les tâches n’utilisant qu’un seul cœur, la différence est inexistante avec le modèle de l’an dernier. En revanche, la différence se fait sentir sur les tests exploitant plusieurs cœurs : le 13’’ Touch Bar 2018 met une claque à son prédécesseur, et mieux encore il fait plus fort que le MacBook Pro 15 pouces Core i7 2,9 GHz de 2017 !
S’il fallait dépenser 3 299 € il y a quelques mois pour obtenir ce niveau de puissance sur un ordinateur portable d’Apple, aujourd’hui elle est accessible à partir de 1 999 €. Une réalité cruelle si vous avez choisi un 15’’ sur le critère de la puissance brute, mais une excellente affaire pour ceux qui ont pu attendre…
Le test Metal appliqué à ce MacBook Pro retourne un résultat de fort bonne facture : il dépasse largement celui du modèle 2017, tout en s’approchant de celui du MacBook Pro 15’’ de l’an dernier. Cela n’en fera pas pour autant une machine de joueurs, mais les logiciels optimisés qui tirent parti des instructions graphiques bas niveau de macOS vont en profiter.
Nos tests applicatifs montrent un gain spectaculaire de performances dans Logic Pro X : le nombre de pistes simultanées est de 122, plus du double du MacBook 13’’ de 2017 et au plus près du 15’’ de l’an dernier. Les quatre cœurs font manifestement des merveilles ! C’est un peu moins visible dans Final Cut Pro X, même si on gagne quelques secondes pour l’export 5K sur le 13’’ de 2017.
Les miracles n’existent pas, toutefois. Le test Valley Benchmark, qui sollicite beaucoup la carte graphique, montre certes une amélioration (l’Iris Plus Graphics 655 n’est qu’une évolution légère de la 650 de l’an dernier), on gagne ainsi une poignée de FPS, que ce soit le test 1080p (7,9 i/s) ou « plein écran » dans la définition native de la machine (6,3 i/s). Que ce soit 6 ou 8 secondes, cela reste toutefois vraiment faiblard pour une machine à ce prix.
Si l’on recherche de meilleures performances graphiques, il faudra se tourner vers l’eGPU Blackmagic qui, pour 695 €, apportera au MacBook une Radeon Pro 580, la même que l’iMac 5K. Et puisqu’on est à évoquer un périphérique Thunderbolt 3, sachez que les quatre ports du MacBook Pro offrent des performances équivalentes (40 GB/s en théorie).
Sur les précédents modèles, les deux ports Thunderbolt 3 positionnés à droite étaient bridés par rapport à ceux de gauche. Les processeurs Intel embarqués dans les nouveaux 13 pouces sont dotés de 16 voies PCI Express, contre 12 auparavant.
Globalement, utiliser ce MacBook Pro 13 pouces dans la vie de tous les jours est un régal. Tout y est fluide, et vu le prix de la machine c’est heureux, mais sur les précédentes générations on pouvait subir de micro-ralentissements, notamment dans Mission Control : il n’y a plus rien à signaler de ce côté.
Le cas clavier
Avec une machine de ce prix, prière de ne l’utiliser qu’en salle blanche et habillé d’une combinaison ! Du moins c’était le cas pour les précédents MacBook Pro à clavier papillon... Rarement Apple n’aura autant amélioré ce composant indispensable : trois ans de MacBook Pro, trois générations successives de clavier. Du cœur à l’ouvrage qui fait plaisir, mais qui n’est pas complètement innocent.
Apple vend un nouveau clavier « plus silencieux ». Les claviers des MacBook Pro 2016 et 2017 sont effectivement bruyants, en particulier dans un bureau plongé dans le silence monacal qui sied à une bonne productivité. Le son des touches du clavier de ce MacBook Pro 2018 est plus sourd, il est plus mat et plus diffus que le son aigu des précédents modèles.
Les touches offrent une frappe un tout petit peu moins sèche, mais à la course toujours aussi courte. Ces améliorations ne convaincront pas ceux qui n’appréciaient déjà pas les précédents claviers. En revanche, les utilisateurs qui ont succombé à l’« expérience » papillon seront aux anges.
Ils le seront d’autant plus que la couche de silicone qui se trouve sous chaque touche permet non seulement d’amortir la frappe et d’accélérer le retour de la touche, mais aussi à protéger le mécanisme des débris qui pourraient s’y glisser. Des débris qui se fixent sur les bords de la membrane, comme l’a démontré iFixit.
Sur les précédents modèles, des poussières ou des miettes sont susceptibles de bloquer complètement une touche, obligeant à remplacer tout le top-case de l’ordinateur.
Apple a fini par reconnaitre ce problème de fiabilité en mettant en place un programme de réparation. Mais pas question pour le constructeur de reconnaitre publiquement que les membranes de silicone sous le nouveau clavier font office de ramasse-miettes : nous avons en effet appris par une note interne que la vraie raison de ce changement était d’éviter que les débris ne cassent le mécanisme papillon…
Une pudeur qui s’explique sans doute par les actions en justice qui ont fleuri ces derniers temps contre Apple à propos des claviers papillon de première et deuxième génération. Reconnaitre que le nouveau clavier corrige ce problème, c’est la porte ouverte à des remboursements, voire une procédure de rappel très coûteuse.
Pour ce qui concerne les MacBook Pro 2018, on ne se plaindra pas d’un clavier plus silencieux et plus fiable ! Au passage, cela ajoutera à la valeur de revente de ces machines, alors que les modèles 2016 et 2017 risquent d’avoir plus de difficulté à s’échanger en occasion.
La puce T2 est de retour
Plus que jamais, la puce T2 des MacBook Pro 2018 ravale la puce d’Intel au rang de coprocesseur. La puce T1 des deux précédents portables avait pour mission principale la prise en charge de la Touch Bar et de l’enclave sécurisée Touch ID. La T2 en fait plus puisqu’elle est au cœur de nombreux processus indispensables au bon fonctionnement de l’ordinateur.
Cette puce T2 occupe les mêmes fonctions sur les MacBook Pro 2018 que sur l’iMac Pro, à savoir l’activation du firmware de l’ordinateur qui permet ensuite de lancer la procédure de démarrage sécurisé SecureBoot. On avait eu l’occasion de décrire le processus dans cet article.
Des tâches essentielles donc, auxquelles s’ajoutent la gestion du contrôleur des mémoires SSD, du contrôleur audio qui prend en charge les trois micros et les haut-parleurs, ainsi que du contrôleur de gestion système qui supervise des fonctions de base comme le dissipateur thermique.
Comme l’iMac Pro, le MacBook Pro 2018 accueille un nouvel utilitaire Sécurité au démarrage (accessible en appuyant sur le raccourci ⌘R
au démarrage de la machine). Cet outil permet de régler les préférences de SecureBoot, un processus plus souple sur macOS que sur iOS puisqu’on dispose de plusieurs options. Par défaut toutefois, le démarrage sécurisé est calé sur Sécurité maximale.
Si l’intégrité du système sur lequel démarre l’ordinateur n’a pas été dument validée, il sera impossible de lancer macOS. L’option Sécurité maximale garantit que seul le système d’exploitation signé et approuvé par Apple peut être exécuté sur l’ordinateur.
L’option Sécurité normale permet de démarrer le MacBook Pro sur un système signé et ayant été approuvé par le passé ; la machine n’ira pas jeter un œil sur les serveurs d’Apple pour vérifier que c’est toujours le cas. Enfin, l’option Aucune sécurité n’a aucune exigence. L’utilitaire Sécurité au démarrage permet également d’autoriser le démarrage à partir de supports externes (un disque Thunderbolt ou USB par exemple).
La grande nouveauté du MacBook Pro 2018, si l’on peut dire, c’est l’apparition de « Dis Siri » ! Oui, comme sur les appareils iOS, et grâce à la puce T2, on peut désormais convoquer l’assistant via sa phrase fétiche. La configuration de cette nouveauté — une première sur un Mac ! — se déroule pendant le lancement initial de la machine, ou encore dans le panneau de réglages de Siri.
On trouve d’ailleurs deux nouvelles options dans le panneau de réglages Siri, activés par défaut, qui permettent au Mac de détecter la phrase magique « Dis Siri » et d’autoriser l’assistant quand le Mac est sur son écran verrouillé. Dans ce dernier cas, il faudra tout de même s’identifier en cas de question qui implique le système, comme par exemple « Montre moi mes téléchargements ».
Il n’y a pas grand chose à dire de plus que l’aperçu que nous avions consacré à cette fonction. Si auparavant vous ne vous serviez pas de Siri sur votre Mac, il y a peu de chance pour que soudain l’assistant soit d’un plus grand secours avec « Dis Siri ».
L’écran True Tone dans le vrai
Nouvel emprunt au monde iOS, la technologie True Tone adapte la balance des blancs de l’écran à la température des couleurs de l’endroit où l’on se trouve. Si vous travaillez dans un environnement baigné de lumière jaune comme c’est souvent le cas dans un bureau, l’écran va prendre cette teinte. L’effet est bien connu des possesseurs d’iPad Pro et d’iPhone 8/8 Plus et X.
Cette technologie a ceci de remarquable qu’on ne s’aperçoit de son existence que lorsqu’elle est désactivée. L’écran prend alors une forte teinte bleutée qui agresse les yeux. C’est là que l’on se rend compte des bienfaits de True Tone : ceux qui ont la mauvaise habitude d’utiliser leur Mac avant d’aller se coucher auront moins de difficulté à s’endormir.
Bien sûr, cette fonction peut être désactivée, ce qui ne sera pas inutile pour les professionnels de la photographie et de la vidéo : True Tone altère la couleur de l’écran et les mauvaises surprises risquent de s’inviter à la fête au bout de la chaîne colorimétrique. Dommage qu'il faille se rendre dans les réglages de macOS alors qu'un raccourci pour la Touch Bar serait si pratique ! La barre tactile bénéficie elle aussi de True Tone, mais impossible de voir si cela fait une différence au quotidien.
Quelques écrans externes sont également compatibles avec cette fonction : c’est le cas des UltraFine 4K (749 €) et 5K (1 399 €) de LG, ainsi que de l’ancien moniteur Thunderbolt Display d’Apple (pour peu qu’on s’y branche avec l’adaptateur Thunderbolt 3 vers Thunderbolt 2 à 59 €).
Cela ressemble à une lapalissade, mais pour que True Tone fonctionne avec un moniteur externe, il importe que l’écran du MacBook Pro soit ouvert : les capteurs qui permettent à la technologie de remplir son office sont placés à côté de la webcam...
Pâté de tête et festin d’oreilles
Puisqu’on en est là, touchons deux mots de la caméra FaceTime HD, qui en restée à du 720p et dont les résultats sont vraiment mauvais, y compris dans de bonnes conditions de lumière naturelle :
C’est d’autant plus dommage qu’avec macOS Mojave, FaceTime s’offre enfin de nouvelles fonctions comme les appels vidéo de groupe. Les utilisateurs de MacBook Pro auront une sale tête.
Ce MacBook Pro 13 pouces est beaucoup plus satisfaisant pour les oreilles. Déjà, Apple conserve la sortie jack 3,5 mm, une attention délicate qui pourra se montrer utile à l’occasion. Surtout, les haut-parleurs font entendre leur voix ! On peut tout à fait profiter d’un film Netflix ou sonoriser une pièce de la maison (et sans doute plus) avec le MacBook Pro. Le rendu est équilibré même s’il a parfois tendance à taper un peu fort dans les basses. On ne repère pas de distorsion quand les haut-parleurs sont poussés dans leur retranchement.
La Touch Bar en touche une sans faire bouger l’autre
Moi qui n’avais pas passé beaucoup de temps sur les Mac équipés Touch Bar, mon expérience avec la barre tactile du nouveau MacBook Pro m’a permis de comprendre que ce composant demeurait, en l’état actuel des choses, une fausse bonne idée. Le bandeau lumineux ne cesse de perturber la vision (on dirait un sapin de Noël accroché sous l’écran). De plus, je suis bien plus rapide et efficace en jonglant avec le clavier plutôt qu’à rechercher le bon raccourci, ce qui d’ailleurs « casse » le rythme de travail.
Entendons nous bien, la Touch Bar a certainement beaucoup d’intérêt pour les switchers et ceux qui débutent dans le monde merveilleux de macOS. Mais sur un ordinateur à visée professionnelle, difficile de voir ce qu’elle vient faire ici. On comprend bien sûr que ce composant se limite pour le moment aux ordinateurs les plus onéreux de la gamme : la Touch Bar ne doit pas être donnée... Mais elle aurait bien plus sa place sur le MacBook. macOS Mojave apportera peut-être un intérêt supplémentaire mais pour le moment, on reste toujours aussi circonspect (jusqu'à oublier la présence de cette barre).
En revanche, Touch ID n’a rien d’une erreur de casting : le capteur a tout à fait sa place, il est bien pratique pour déverrouiller le Mac et s’identifier dans les apps compatibles. Une réussite donc, même si les possesseurs d’Apple Watch auront tôt fait d’activer le déverrouillage avec la montre. On regrette toutefois qu’Apple ne soit pas allée au bout de sa logique biométrique : Face ID serait tout à fait adapté à cette machine (ce qui aurait au passage doté l’ordinateur d’une bien meilleure webcam, ce qui ne serait pas du luxe). Peut-être pour la prochaine fois...
Du mieux sur l’autonomie
Le discours d’Apple est toujours bien rodé : l’ordinateur assure une autonomie pouvant aller jusqu’à 10 heures. Dans les faits, on aura du mal à atteindre cette marque pour peu qu’on utilise l’ordinateur de manière intensive.
Le test « 100% », qui consiste à faire tourner Valley Benchmark à fond avec tous les réglages au maximum dans la définition de l’ordinateur, roule sur le MacBook Pro pendant 1h28 avant que la batterie ne lâche prise. Un résultat en amélioration par rapport au modèle 2017 (1h06), mais c’est la version sans Touch Bar de 2017 qui tient toujours la corde avec 1h40.
Le duo de cœurs supplémentaires tire plus fort sur la batterie, ce qui est logique. Notre test empirique, qui consiste en une journée de travail classique à la rédac’ de MacG (beaucoup de web, relève des courriels toutes les minutes, iA Writer, Pixelmator Pro, Messages et Mattermost, Tweetbot, Apple Music en fond sonore), donne un résultat de 6h44 en moyenne.
On est sur une moyenne supérieure aux 5h58 du 13 pouces avec Touch Bar de 2017 (5h58), mais toujours inférieure aux 7h30 du modèle sans barre tactile de l’an dernier.
La batterie du MacBook 13’’ 2018 est pourtant plus imposante : 58 Wh, contre 49,2 Wh sur le modèle 2017. Elle se compose de 6 cellules au lieu de 5, et elle pèse aussi plus lourd (232,7 grammes, contre 196,7 grammes pour la version précédente). Il faut bien alimenter la Touch Bar et tout le reste.
Pour conclure
La version 2018 du MacBook Pro 13 pouces avec Touch Bar marque un changement de voilure pour cette famille de produits. Les performances sont en effet au rendez-vous, et pas qu’un peu surtout si vous utilisez des logiciels exploitant plusieurs cœurs. Dans ce cas, la différence sera vraiment sensible et vous aurez certainement l’impression d’en avoir pour votre argent. En fait, vous avez tout simplement entre les mains un MacBook Pro 15 pouces de 2017, au prix d'un MacBook Pro 13 pouces… exception faite de la partie graphique, toujours aussi anémique.
Et Apple ne s’est pas contentée d’installer au chausse-pied les nouveaux processeurs d’Intel. Le constructeur en a profité pour mettre au même niveau tous les ports Thunderbolt 3, d’intégrer une puce T2, d’apporter la technologie True Tone à l’écran, le tout dans un format compact facile à emporter avec soi (plus facile qu’avec un 15 pouces, c’est entendu).
On peut toujours interroger la pertinence de la Touch Bar qui n’apporte pas grand-chose, si ce n’est une distraction parfois envahissante. L’autonomie, somme toute moyenne, pourrait être encore meilleure. Les performances graphiques n’ont rien de renversant. Apple aurait pu rogner sur les bordures autour de l’écran, et basculer la caméra FaceTime dans le XXIe siècle.
Mais pour les utilisateurs qui ont besoin du meilleur compromis entre puissance brute, compacité, polyvalence et mobilité, difficile de ne pas recommander la génération 2018 du MacBook Pro 13 pouces.
Test réalisé avec l’aide d’Anthony Nelzin-Santos