TSMC et les États-Unis peinent à s'entendre sur le financement des futures usines de puces américaines. Le fondeur a prévu d'investir 40 milliards de dollars dans la construction de deux sites en Arizona, dont le premier devrait ouvrir en 2024. TSMC demande 15 milliards supplémentaires sous la forme d'aide de l’État, mais celui-ci impose des conditions spécifiques trop contraignantes à son goût.
L'année dernière, le gouvernement Biden a annoncé le Chips and Science Act, un programme de 52 milliards de dollars ayant pour but de relancer l'industrie des semi-conducteurs dans le pays. TSMC envisage d'en profiter sous la forme d'un crédit d'impôt de l'ordre de 6 à 7 milliards par usine. Le fondeur affirme avoir besoin de cet argent : les coûts de construction aux États-Unis seraient dans certains cas plusieurs fois supérieurs à ceux de Taïwan. Le fondateur de TSMC a déclaré que la fabrication de puces en Arizona pourrait coûter 50 % plus cher que sur l'île.
Selon le Wall Street Journal, la Maison-Blanche dicte plusieurs conditions à l'obtention de ces avantages fiscaux. Elle demande notamment un partage des bénéfices des usines à partir d'un certain seuil ainsi que l'accès à certaines informations que TSMC considère comme confidentielles. Or, la culture du secret est un élément important pour le fondeur : il travaille dans l'ombre pour des clients de haut rang et garde précieusement sous clefs ses méthodes de fabrication. TSMC ne détaille pas les machines utilisées ni les matériaux employés pour éviter que ses techniques soient récupérées par la concurrence.
TSMC refuse également de diffuser son carnet de commandes, ce qui déplait à la Maison-Blanche. En face, le gouvernement américain estime que ses exigences sont naturelles pour vérifier que l'argent du contribuable est bien dépensé. « Nous ne faisons pas de chèque en blanc aux entreprises qui le demandent », a déclaré la secrétaire d'État au Commerce, Gina Raimondo, en février.
« Certaines de ces conditions sont inacceptables et nous nous efforçons d'en atténuer les conséquences négatives », a soutenu le président de TSMC Mark Liu, qui a ajouté poursuivre les discussions avec le gouvernement américain. Un fonctionnaire du ministère du Commerce a affirmé que l'État protégerait les informations commerciales confidentielles, et qu'il ne prévoyait un partage des bénéfices que si « le flux de trésorerie d'un ayant droit dépassait de manière significative les prévisions ».
Le projet se heurte également à un autre problème : la double taxation des entreprises taïwanaises sur le sol américain. Taïwan n'a pas signé de convention fiscale avec les États-Unis étant donné que le pays ne reconnaît pas officiellement l'île à cause de la pression chinoise.
Faute de traité fiscal, les taxes grimpent : le taux d'imposition effectif estimé pour TSMC dépasse les 50 % pour les bénéfices réalisés aux États-Unis. De plus, les employés sur le sol américain sont lourdement taxés. Certains politiciens voudraient remédier à cela, mais tout changement pourrait être interprété comme un affront par Pékin, qui revendique Taïwan et menace régulièrement de la prendre par la force.