Ouvrir le menu principal

MacGeneration

Recherche

On a testé un MacBook Pro chinois vendu sans écran

Mathieu Fouquet

Wednesday 24 August 2022 à 21:12 • 73

Mac

Nous en parlions il y a deux mois : en Chine, certaines boutiques en ligne vendent des MacBook Pro dépourvus d’écran mais néanmoins parfaitement fonctionnels. Cette façon insolite de recycler une machine à l’écran défaillant a piqué notre curiosité : que vaut vraiment un MacBook Pro décapité, et à quoi ressemble donc le processus d’achat d’un Mac si peu conventionnel ? Réponse dans cette prise en main effectuée par Mathieu, notre correspondant en Chine.

L’achat sur Taobao

Comme souvent en Chine, tout commence sur Taobao, la plateforme de vente la plus populaire du pays. En général, il est presque impossible de ne pas y trouver son bonheur, mais cette fois-ci j’ai presque réussi à la mettre en défaut : après une assez longue recherche, je n’ai déniché qu’un seul vendeur qui proposait ces curieuses machines. Voilà qui facilite au moins le choix des potentiels clients.

La page Taobao du produit (à gauche) et toutes les configurations disponibles à l'achat (à droite).

Bien sûr, trouver le bon (le seul ?) vendeur ne fait pas tout, il faut aussi se décider sur une configuration adéquate. Cela tombe bien, la boutique de ce réparateur de Mac déborde de modèles de MacBook Pro sortis entre 2013 et 2017. Comme ces machines embarquent toutes un SSD et ont assez de puissance pour faire tourner un écran Retina (à défaut d’avoir un écran tout court), elles devraient au moins pouvoir satisfaire des besoins basiques.

La liste des configurations disponibles (à gauche) et des photos de modèles avec Touch Bar (à droite).
Ce vendeur semble avoir une jolie quantité de Mac en stock (à gauche). Vu qu'ils ont encore tous leur écran sur la photo, il est probable (et logique) que le réparateur les en ampute juste avant l'expédition.

Aussi, pour tester le concept, inutile d’acheter une machine trop chère ou trop récente : un modèle d’entrée de gamme de 2013 suffit largement. Pour 1000 yuans (140 € environ), frais de port compris, j’ai donc pu commander un MacBook Pro Core i5 avec 4 Go de RAM et 128 Go de stockage, mais sans Touch Bar ni clavier papillon. Tant mieux : un Mac sans écran passe encore, mais il serait tout de même pratique d’avoir un clavier fonctionnel.

L’arrivée du Mac sans tête

Lorsque l’on achète un MacBook Pro sans écran sur une obscure boutique Taobao, on ne s’attend évidemment pas à une expérience de déballage digne des produits Apple. Mais dans un sens, le colis qui est arrivé quelques jours plus tard contenait quelque chose de bien plus excitant qu’un ordinateur flambant neuf : une expérience nouvelle. Qu’allait donc révéler ce carton parfaitement banal qui avait parcouru des milliers de kilomètres pour arriver devant ma porte ?

Contrairement au Mac, le colis est arrivé entier.

Dès l’ouverture du colis, j’ai l’impression d’en avoir pour mon argent : en plus d’y trouver un MacBook Pro aminci (un MacBook Pro Air ?), j’y découvre aussi une housse de transport, une protection de clavier, une souris sans fil qui ne vaut sans doute pas plus d’un euro, un tapis de souris pour aller avec, et un chargeur MagSafe 2 flambant neuf.

Malgré son apparence très convaincante, la finition de ce chargeur me fait tout de suite douter de son authenticité, mais à ce prix-là, il ne faut pas s’attendre à autre chose. Tant qu’il charge le MacBook Pro et qu’il ne m’explose pas à la figure…

Beaucoup de surprises dans ce carton.
Il y avait aussi une feuille séchée livrée avec le chargeur.

Pressé de vérifier si j’aurai droit à un joli feu d’artifice, je branche donc le chargeur, je connecte le Mac à ma télévision en HDMI et, d’un doigt tremblant, j’appuie sur le bouton d’allumage. Au début, c’est mal parti : la LED du (faux ?) connecteur MagSafe ne s’allume pas et le Mac redémarre en boucle sans dépasser l’écran de chargement. Mon test de cette machine va-t-il tourner très court ?

Heureusement, il me suffit de débrancher et rebrancher le connecteur MagSafe plusieurs fois dans tous les sens (je me croirais revenu à l’époque des câbles USB-A) pour que la LED finisse par s’allumer et le Mac par démarrer. J’arrive alors sur l’écran d’ouverture de session. Qui me demande un mot de passe. Que je n’ai pas.

Sur Taobao, les clients peuvent discuter entre eux mais aussi poser des questions aux vendeurs sur le chat intégré.

J’ouvre donc Taobao et j’emploie mon meilleur chinois pour demander le mot de passe au vendeur. Réactif, ce dernier me donne immédiatement le précieux sésame qui me barrait la route : 1234. Évidemment.

Une fois déverrouillé, je découvre un MacBook Pro presque banal qui peut remplir toutes les fonctions de n’importe quel Mac portable… à part afficher des pixels tout seul. Les performances sont correctes pour un Mac vieux de bientôt 10 ans, le système installé n’est pas trop poussiéreux (Mojave est sorti en 2018 et il est possible de mettre à jour vers Big Sur), le Wi-Fi et le Bluetooth fonctionnent, la batterie semble avoir été remplacée et tient bien la charge… Pour 140 €, on a un Mac très acceptable.

Pour être sûr que ce Mac peut se fondre avec succès dans un environnement de travail moderne, je décide aussi de le brancher sur mon écran Dell 4K. Avec succès : le MacBook Pro parvient à suivre la cadence, mais le contraire aurait été décevant pour un modèle Retina. Bien sûr, comme sur n’importe quel écran, il est possible d’ajuster l’échelle d’affichage du Mac pour gagner en visibilité ou en espace d’affichage.

Vieux mais capable : le bureau de notre Mac sans écran en 4K.

Bref, même si je ne touchais à aucun réglage de cet ordinateur à sa sortie de la boîte, j’aurais déjà une machine capable de s’acquitter de beaucoup de tâches basiques (bureautique, navigation web, multimédia…), ce qui est probablement tout ce que ses clients demandent. Elle fait à peine le minimum, mais elle le fait bien.

Portabilité et minimalisme

Par curiosité, j’ai tenté d’utiliser ce MacBook Pro avec tous les accessoires fournis dans son carton (ainsi que mon fidèle clavier mécanique), mais je préfère nettement l’utiliser « nu », sans rien y brancher d’autre qu’un écran. Car bien qu’il s’agisse d’un bricolage, cette machine est plus élégante que je ne l’imaginais : légère et compacte, je peux la trimballer d’un écran à l’autre sans devoir me soucier de déplier ou replier son écran interne.

Le MacBook Pro avec quelques périphériques…
… et le MacBook Pro tout nu.

Il s’agit essentiellement d’un clavier auquel on a greffé un ordinateur, ce qui rend la machine étonnamment sympathique. C’est presque un Mac dans sa plus simple expression, une interprétation moderne des ordinateurs de jadis, et il est difficile de ne pas fantasmer sur ce qu’Apple pourrait elle-même proposer si elle employait tous ses pouvoirs de miniaturisation — comme elle l’a déjà prouvé avec le Studio Display, cet ordinateur qui s’ignore.

Un Apple II. Image Museums Victoria.

Alors, verra-t-on un jour un Mac complet dans un clavier ? En dépit des prouesses des puces Apple Silicon, c’est assez peu probable : les MacBook Pro et les MacBook Air sont déjà un excellent compromis entre taille et polyvalence, et les futurs Mac mini iront peut-être encore plus loin dans leur miniaturisation. Mais qui sait : le Mac Studio a prouvé que la firme californienne avait encore de nouvelles idées pour son plus vieux produit. Et puis en attendant, il y a toujours Taobao.

Rejoignez le Club iGen

Soutenez le travail d'une rédaction indépendante.

Rejoignez la plus grande communauté Apple francophone !

S'abonner