Tesla a présenté deux nouvelles variantes de ses Model 3 et Model Y, uniquement aux États-Unis pour le moment. L’annonce reste malgré tout intéressante, à la fois parce que c’est la concrétisation d’une vieille promesse d’Elon Musk pour démocratiser sa gamme et à la fois parce qu’il y a de fortes chances que ces modèles finissent par traverser l’Océan Atlantique et être commercialisés chez nous. Pour autant, on est loin, si loin de la promesse initiale : en 2020, le milliardaire annonçait l’arrivée en 2023 d’une toute nouvelle voiture à 25 000 $. Cinq ans plus tard, on a une Model Y dégradée dont le prix ne baisse que de 5 000 $, soit un ticket d’entrée à 39 990 $ aux États-Unis.


Commençons par les aspects positifs : le constructeur n’a pas rogné sur la batterie, dont la capacité exacte n’est pas donnée, mais qui semble être de 69 kWh, soit plus que la Model Y Propulsion actuellement vendue en Europe. L’autonomie annoncée est ainsi très bonne, avec 517 km selon les normes EPA, plus strictes que les européennes (on serait autour des 580 km WLTP, à comparer aux 500 km du modèle actuel). Autre bonne nouvelle, la charge rapide n’est pas bridée non plus et on parle d’une puissance maximale de 225 kW, bien supérieure là encore à la valeur actuelle. Comme toujours, Tesla ne donne aucun détail technique, même s’il semble qu’il s’agisse des mêmes batteries que les versions grande autonomie, avec des cellules en moins. On imagine que les choix seront différents par ici, où l’on a des batteries LFP sur les voitures de base. Petite bizarrerie au passage, la batterie et l’autonomie sont identiques sur la Model 3 Standard, ce qui ne semble pas logique puisque la berline devrait moins consommer.
En tout cas, ces deux arguments devraient rester, tout comme les sensations de conduite, avec un moteur placé comme toujours à l’arrière et des performances bien supérieures à ce dont on a strictement besoin au quotidien. Les réductions sont d’abord esthétiques à l’extérieur, sauf pour la Model 3 bizarrement, la berline n’évoluant pas. On sent que la Model Y fait le gros des ventes, alors le SUV a droit à de nouveaux feux sans barre de LED pour les relier à l’avant comme à l’arrière ou encore des roues de 18 pouces simplifiées par défaut. Ce choix est moins populaire sur le plan esthétique, mais c’est aussi une excellente nouvelle à la fois en termes de confort et d’efficience. La bonne autonomie affichée vient probablement en majorité de ce changement, d’ailleurs.


À l’intérieur, Tesla a gardé ses tableaux de bord minimalistes et geeks, avec un unique grand écran central. La Model 3 Standard ne change presque rien visuellement, preuve là encore de la moindre importance de la berline, alors que la Model Y a plusieurs gros changements sur cette version entrée de gamme. Pour commencer, le toit en verre n’est plus là… enfin si, mais masqué. C’est peut-être le choix le plus étrange dans l’affaire : la voiture est équipée d’un toit en verre, car changer cet élément crucial dans la conception de la voiture aurait coûté trop cher (il aurait fallu reprendre quasiment toute la structure), alors ils l’ont gardé. Sauf qu’à l’intérieur, on ne le voit pas, il y a du tissus sur le toit. Voilà un choix qui ressemble à une manière un peu mesquine de distinguer les gammes, plus qu’à une volonté de réduire les coûts, même si l’entreprise relève que cela réduit la consommation puisque la climatisation tourne moins fort pour lutter contre la chaleur.
Dans le même ordre d’idée, la voiture est équipée de toutes les caméras et des ordinateurs nécessaires pour la conduite entièrement autonome, mais la version de base ne proposera qu’un régulateur adaptatif. Il faudra payer 8 000 $ en plus pour que la voiture reste entre les lignes ! La liste des retraits est encore longue à l’intérieur, Tesla a manifestement cherché à économiser le plus possible. La console centrale est désormais vidée, un grand espace ouvert sépare les deux chargeurs à induction du porte-gobelet. Si le volant reste chauffant, il doit être ajusté manuellement, ce qui est surtout gênant quand des conducteurs de tailles très différentes se partagent le véhicule1. Les sièges avant restent chauffés et électriques, même si Tesla a retiré les boutons physiques : les ajustements doivent désormais se faire sur l’écran. Le passage au tissu ne sera pas nécessairement un défaut, surtout en été où le similicuir chauffait beaucoup la peau.


La barre de LED intérieure était plus gadget alors son retrait (également sur la 3) ne gênera probablement pas les acheteurs. À l’arrière, on perd les contrôles électriques sur la Model Y et les sièges chauffants sur les deux, on perd aussi le deuxième écran dédié à ce rang au profit de contrôles manuels de climatisation. Quand on en juge à cette liste, on voit bien les économies réelles et aussi quelques mesquineries étonnantes en 2025. Ainsi, les rétroviseurs ne se rabattent plus électriquement sur ces versions standard, une fonctionnalité pourtant devenue courante dans l’industrie, sauf sur des voitures vendues bien moins cher. On peut se demander aussi si le retrait de ces deux moteurs est une si grosse économie pour le constructeur.
Quoi qu’il en soit, ces versions Standard sont désormais les voitures de Tesla les moins chères sur le marché américain, avec un prix de base à 36 990 $ pour la 3 et 39 990 $ pour la Y. C’est 5 000 $ de moins qu’avant et comme le relève Electrek, c’est toujours 2 500 $ de plus que le mois dernier, quand Tesla pouvait encore bénéficier des 7 500 $ d’aides que Donald Trump a depuis supprimées. Rappelons qu’Elon Musk a tout fait pour élire l’actuel Président américain, alors que son aversion pour les voitures électriques était connue de longue date. Bref, c’est un tarif nettement plus élevé que la promesse de 2020 et même si le contexte est différent, il va être compliqué de relancer les ventes avec un écart de prix aussi limité.
La concurrence a désormais de quoi proposer face aux voitures de Tesla, même si une rapide estimation en Europe laisse penser que cette Model Y Standard pourrait être difficile à battre pour les acteurs locaux. Les prix en euros étant actuellement identiques, on pourrait envisager une Model Y Standard à 39 990 € et en cas de production maintenue à Berlin, le client paierait autour de 36 180 € grâce à la prime coup de pouce actuellement en place. Voilà qui me rappelle le prix de base de la Model 3 en 2021, date à laquelle j’ai acheté ma voiture, mais c’était grâce à des aides bien plus importantes. Si l’autonomie monte encore d’un cran par rapport à la Propulsion actuelle, ce serait indéniablement un coup dur pour les acteurs européens. En comparaison, le Scénic de Renault débute à 41 490 € sans aide et c’est avec la petite batterie, le petit moteur et globalement une voiture moins bien équipée.
Pour l’heure, ces versions Standard restent de toute manière une exclusivité américaine, ce qui est logique puisque Tesla va avoir besoin de mettre toutes les chances de son côté pour continuer à vendre sans les aides. Si son arrivée en Europe semble évidente, on a du mal à voir un tel véhicule sur le marché chinois, où on peut acheter des voitures suréquipées pour ces tarifs. Quand Tesla retire des moteurs dans ses rétroviseurs et son volant, les constructeurs chinois installent des écrans géants et des réfrigérateurs pour les passagers dans des voitures également vendues autour de 40 000 €… ce n’est pas le même monde.
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Jusque-là, la position du volant faisait partie du profil Tesla et elle était restaurée dès que l’on monte à bord, ce que je trouve toujours aussi pratique. C’est du luxe sans doute, mais cela faisait partie de la magie Tesla. ↩︎