"Steve Jobs" prend les libertés avec la réalité mais « ce n'est pas très important »

Florian Innocente |

« Le film s'écarte de la réalité à peu près partout — presque rien ne s'est passé de cette manière — mais au final, ça n'est pas très important ». Andy Hertzfeld a raconté à Re/code sa collaboration au film Steve Jobs qui sort dans une semaine aux États-Unis. Celui qui fut l'un des principaux architectes du premier système d'exploitation du Mac est également présent à l'écran sous les traits de Michael Stuhlbarg.

Michael Stuhlbarg, l'interprète d'Andy Hertzfeld (à droite)

Le fait qu'Aaron Sorkin ait pris des libertés dans la manière de narrer les événements ne dessert pas le film, souligne toutefois Hertzfeld, qui n'a pas vu le montage final mais une version datant du mois d'août :

Je pense que c'est un bon film, brillamment écrit et interprété avec brio, il est plein d'humour et de sentiments […] Le but du film est de divertir, d'inspirer et d'émouvoir le public, pas de refléter la réalité. Il traite les faits de manière cavalière mais il aspire à explorer et à exposer les vérités les plus profondes derrière la personnalité et les comportements très particuliers de Steve, il y réussit souvent même si ce n'est pas systématique.

Andy Hertzfeld a rencontré Aaron Sorkin fin 2012. Le scénariste avait déjà en tête son découpage de l'histoire en trois actes — chacun dans les coulisses d'un lancement produit majeur — et il voulait connaître l'atmosphère et les détails de ces moments. La discussion s'est poursuivie ensuite par email :

Il m'a demandé comment Steve aurait réagi face à une situation particulière, celle du plantage de la démo de la synthèse vocale (lors de l'annonce du premier Mac, la machine a lu un texte à haute voix pour se présenter, ndlr). Je lui ai fait remarquer que ça n'était jamais arrivé, et nous avons eu une longue discussion sur le principe de la licence artistique, sur le fait que l'on pouvait s'éloigner de la stricte réalité. Disons qu'il m'a convaincu que ce n'était pas un documentaire, et que dès lors, la véracité des choses était secondaire face aux considérations artistiques, et que c'était une 'peinture et non pas une photographie'.

Sorkin, qu'Hertzfeld admire pour ses précédents scénarios, s'est ainsi d'abord intéressé à ces événements qu'étaient ces keynote de Steve Jobs. Puis il a cherché à en savoir plus sur les interactions qu'avait Jobs avec son entourage, sur la manière dont se comporterait le co-fondateur d'Apple face à une situation donnée.

Entre un acteur qui ne cherche pas à être le sosie de Jobs et la vision très personnelle de son histoire écrite par Sorkin, ce Steve Jobs a de quoi éveiller la curiosité et peut-être justement qu'il pourra ainsi toucher un public plus large que les afficionados d'Apple qui en connaissent l'histoire sur le bout des doigts.

Source
avatar Schwarzer Stern | 

Comme le vrai, quoi 0:)
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avatar oomu | 

romancer et mettre en scène, bien sur. mais réécrire ou inventer ? quel est le point de nommer ce film ainsi (hormis le buzz) ? bof.

j'attendrai la fresque historique Pacific Rim 2.

avatar marenostrum | 

son problème est qu'il ne sait rien comment était le vrai Steve Jobs. s'il le savait il serait pareil que lui, il dominerai son domaine.
donc il doit l'inventer, y a pas d'autre chois, s'il veut créer un personnage crédible.

avatar SugarWater | 

@marenostrum :
En même temps quand Tim s'est payé son film sans l'avoir vu, il a réagit comme un jeune Steve

avatar Rigat0n | 

@oomu :
Pacific Rim 2 est plus ou moins annulé.

avatar marenostrum | 

Aaron il se trompe sur la peinture (surtout celle des grands maitres) qui est au contraire de ce qu'il pense, plus précise que la photographie. cette dernière est beaucoup plus trompeuse. donc un portrait est plus vrai qu'une photo. plus beau aussi.

avatar misc | 

C'est ce qu'il dis justement IMO, que c'est le fond qui compte, pas la forme (dans ce cas ci, l'esprit de Jobs plus que le fait exact de l'événement..) Enfin IMHO etc, on a pas vu le film..

avatar oomu | 

l'art académique en somme.

avatar mfams | 

@marenostrum :
Quand Sorkin dit que la véracité des choses, il ne minimise pas la fiction. Au contraire, il "priorise" son histoire, sa distorsion de la réalité. En somme il dit bien que sa peinture (comme celles des grands maîtres) est plus belle que la photo, selon ma compréhension.

avatar mfams | 

@mfams : (oubli)
"que la véracité des choses es moins importantes"

avatar TmrFromNO | 

Faut peut être s'attendre du coup à ce que l'acteur qui joue le rôle de SJ porte un survêtement et des runnings lors des Keynotes.

Là je te raconte même pas les fans d'Apple comment ils vont réagir; les cinés ont intérêt à être bien assurés.

avatar curly bear | 

Et après Aaron Sorkin s'entonne qu'on le dise "opportuniste". Le film se nomme "Steve Jobs" et du coup tout le monde s'attend à ce que ça colle à la vraie vie de Jobs.
Il aurait du faire un film sur un entrepreneur de la Silicon Valley en s'inspirant très formellement et visiblement de la vie de Steve Jobs. Tout le monde aurait vu le parallel mais personne n'aurait pensé que c'était véritablement un biopic.
Aaron Sorkin pouvait ainsi à loisir utiliser sa licence artistique (bien réelle) sans profiter du nom de Jobs (bien opportuniste donc).

avatar marenostrum | 

je crois que misc l'a bien expliqué dans son commentaire l'intention du réalisateur.

avatar Yohmi | 

Une nouvelle rafale de légendes urbaines est en approche. "Tu savais qu'il avait fait ça ?" "En fait, ce n'est pas du tout ce qui s'est passé…". Ça va être génial.

avatar marenostrum | 

si le film est bien fait, il va remplacer la réalité. il va créer la légende Jobs.

avatar Max Layn | 

haha ! c'est pas faux !

avatar MarcMame | 

Je ne suis absolument pas dupe.
Le moment, la personne et les propos : tout cela est parfaitement orchestré par le studio.
On créé l'envie tout en désamorçant la bombe bien avant qu'elle ne soit allumé.
C'est malin.

avatar LogBoy | 

On est donc bien dans un film opportuniste, que le terme lui plaise ou non.

avatar Silverscreen | 

The Social Network ne s'appelait ni Facebook ni Zuckerberg et c'était très bien comme ça. On était dans le domaine de la fiction biographique, à la limite du polar financier.

Là, le film s'appelle Jobs. 3 ans après la mort du créateur d'Apple c'est et opportuniste et ça se présente comme une biographie plus qu'une fiction...

avatar Florian Innocente | 

@silverscreen "Là, le film s'appelle Jobs. 3 ans après la mort du créateur d'Apple c'est et opportuniste et ça se présente comme une biographie plus qu'une fiction..."

Quelle est la norme pour qu'un biopic ne soit plus considéré comme "opportuniste" ? 5 ans, 8 ans, 17,5 ans ?

Peut-être que la réaction de Cook s'appuie sur des choses dont on n'a pas connaissance, mais à défaut d'en savoir plus, sa sortie était assez malvenue. C'était du niveau des mecs qui chient sur un nouveau produit Apple qu'ils n'ont même pas eu en main.

C'est évident qu'il y a une volonté pour le studio de suivre de près l'événement de la disparition de Jobs - peut-être même que le film serait déjà sorti si les acteurs pressentis ne s'étaient pas désistés.

Mais peu importe à la limite que ça sorte déjà. L'histoire ne sera pas plus pertinente à raconter dans 10 ans que maintenant. Jobs a eu une vie assez riche pour qu'elle soit raconté de toutes les manières possibles et dès maintenant.

avatar debione | 

Non, la sortie de Cook n'était absolument pas malvenue... Je m'explique: Imagine que ton meilleur ami chez macg viennent à décéder. Imagine que tu vois les vautours s'emparer de la vie de cette personne, lui faire dire n'importe quoi, faire des livres entiers, se précipiter sur le cadavre de ton ami et collègue, et ce depuis trois ans...

Et imagine qu'un réalisateur débarque, qu'il n'a jamais connu cet ami, mais qui compte bien remplir les salles avec un biopic... Sauf que ce réalisateur n'a jamais connu ton ami, mais bien pire que cela... Va raconter conneries sur conneries pour enjoliver le tout et en faire un truc... qui marche, qui rapporte du pognon... Tu réagirais comment? Sérieusement pose-toi la question?

Faire un film sur Jobs n'est absolument pas opportuniste... Faire un film sur Job en lui faisant dire ce que le public a envie d'entendre, à ne rapporter pas de vérité, oui c'est opportuniste... Dans le sens ou ce qui intéresse le réalisateur ce n'est pas ce qu'était Jobs, mais bien ce qu'il pourrait faire croire qu'il était, le tout avec évidement le maximum d'effet démanche et de réalisation pour que les gens aiment le film...

avatar webHAL1 | 

@silverscreen :
Entièrement d'accord. Dans le même ordre d'idée, c'est comme faire l'adaptation d'un livre qui ne soit pas du tout fidèle (premier exemple qui me vienne en tête : "The Hobbit" !).

Contrairement à ce que certaines personnes disent ici, il existe des films qui s'attachent à retracer les événements le plus fidèlement possible, et ça n'empêche pourtant pas une certaine dramatisation, afin d'appâter le spectateur (on a bien compris que le but premier n'était pas de respecter la réalité, mais bien de faire rentrer de l'argent dans la caisse... mais pourquoi l'un ne serait forcément pas compatible avec l'autre ?).

Un autre exemple : dans le film "The Imitation Game", qui retrace une partie la vie d'Alan Turing, le personnage joué par Charles Dance - le Commander Denniston - apparaît comme un "méchant", ayant une personnalité détestable, toujours opposé au mathématicien. Or il semble que dans la réalité ce n'était pas du tout le cas, et que les descendants du Commander Denniston aient particulièrement mal vécu de voir leur aïeul représenté comme cela. Mais bon, pas grave hein, ça rendait le film plus captivant, et au final qu'importe la véracité historique... :-/

Cordialement,

HAL1

avatar aldomoco | 

« Le film s'écarte de la réalité à peu près partout — presque rien ne s'est passé de cette manière — mais au final, ça n'est pas très important ».

La manipulation historique, une pratique qui remonte aux calendes grecque !

avatar marenostrum | 

Ferguson (ancien manager de Manchester United, le plus grand club de foot anglais) vient de publier sa deuxième autobiographie en même pas trois ans. étant multi-millionaire est ce qu'il en a besoin d'argent ? bien sur que non. mais qui va intéresser sa vie, 10 ans ou plus, après sa retraite ? il sera oublié. pareil pour Jobs. c'est maintenant que tout le monde peut profiter (ses fans aussi). où il pouvait trouver le même budget Aaron 10 ou 20 ans après les faits ? il en profite maintenant. c'est l'occasion unique.
c'est trop facile de l'accuser d'opportuniste.

avatar aldomoco | 

@marenostrum :
c'est la faute aux apôtres, comme pour la vie de JC ?

avatar GlobeTrotteur | 

quel intérêt d'aller voir un film sur une personne ayant existé (Steve jobs ou qui que ce soit d'autre) à partir du moment où la biographie n'est pas respectée mais inventée et réécrite ?

avatar mfams | 

@GlobeTrotteur :
le même intérêt que d'aller voir tout film de fiction.

avatar waldezign | 

Diable, les fans d'Apple semblent manquer de recul. C'est un peu dommage. De toute façon, un film de cinéma n'est jamais un documentaire, et l'intérêt n'y est pas la vérité (sauf dans H2G2), mais dans le plaisir qu'on prend à le regarder.
Il ne faut pas faire un procès d'intention à ce film.
Quant aux critiques tenant à l'opportunisme supposé du scénariste... Euh, vous déconnez, j'espère? Faut ranger les vidéocassettes des Bisounours maintenant!

avatar CaptainBinouz | 

Un film de fiction n'a aucune obligation de vérité, ce n'est pas un documentaire. Moi je trouve ça très bien qu'ils assument cette liberté. Tous les «biopics» (comme il faut dire maintenant) sont réécrits, scénarisés, modelés, romancés, climaxisés, dialogués etc... Et c'est tout à fait normal, c'est ça le cinéma. Beaucoup trop de gens prennent ce genre pour argent comptant et le confondent avec le documentaire, quitte à, comme dit plus haut, inventer de nouvelles légendes urbaines.
Au moins dans le cas de Steve Jobs, ce sera encore plus clair.

avatar Alméti | 

Tout cela me fait bien peur. On dirait que cela tire sur la désinformarion et ça me donne plutôt envie d'éviter le film.

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