Google perd son appel sur les API d'Oracle

Mickaël Bazoge |

Le rebondissement est inattendu et relance non seulement la guerre entre Oracle et Google, mais également les discussions âpres autour des brevets logiciels. Le 9 mai, les trois juges de la cour d'appel américaine en charge du dossier ont complètement retourné la décision du juge Alsup qui, en septembre 2012, avait estimé que Google n'avait enfreint aucun copyright des 37 API de Java utilisées dans le développement d'Android (lire : Oracle perd son procès contre Google). Oracle, qui réclamait jusqu'à 6 milliards de dollars auprès du moteur de recherche, avait même subi l'humiliation de reverser 1,13 million de dollars à son ennemi afin de régler ses frais de justice.

Néanmoins, le juge Alsup ne s'était pas prononcé sur le fond de l'affaire, à savoir l'application du droit d'auteur aux API — le diable se nichant dans les détails, c'est précisément là qu'a frappé la cour d'appel. De fait, celle-ci estime que les API peuvent bel et bien prétendre à la protection du copyright, même si elles sont composées de « briques » disponibles librement pour tous.

Florian Mueller, spécialiste du droit et développeur Android à ses heures perdues, explique sur Foss Patents que n'importe quel travail créatif peut être découpé en petits morceaux ne pouvant pas prétendre à être protégés par le copyright, comme les notes d'une partition ou les noms de variables du code d'un logiciel. La question qui se posait au juge Alsup ainsi qu'à ses collègues de la cour d'appel était alors de déterminer si la manière dans laquelle ces morceaux sont assemblés peuvent prétendre au droit d'auteur. Et dans le cas des API d'Oracle, les trois juges ont estimé que oui.

Si la cour d'appel assume qu'une API, et par extension les logiciels, peuvent légitimement être protégés par le droit d'auteur, alors l'utilisation faite par Google des interfaces de programmation Java d'Oracle était effectivement contraire à la loi. De plus, les juges estiment que dans sa défense, Google a tordu le bras au droit à l'usage équitable dont l'entreprise se prévalait. L'affaire pourrait maintenant se diriger tout droit vers la Cour Suprême des États-Unis, l'instance judiciaire ultime du pays, mais la décision devra attendre quelques années supplémentaires.

Le moteur de recherche se dit évidemment déçu de ce coup de théâtre, qui « crée un précédent préjudiciable pour l'informatique et le développement de logiciels ». Si l'on doit fêter cette nouvelle chez Oracle, elle est aussi susceptible de provoquer une véritable révolution : si les API des éditeurs — comme celles que fournit Apple — doivent comprendre un accord de licence, tous les services et logiciels qui seront bâtis avec ces API (normalement gratuites à l'usage) pourraient bien être obligés de tout reprendre à partir de zéro.

Avec tous les problèmes d'interopérabilité que cela implique, les API servant à connecter les logiciels avec les bases de données des fournisseurs d'informations. Que se passera t-il lorsqu'une application utilisant les API d'un Google, Facebook, Apple ou autre devra réinventer la roue sous la menace d'une telle épée de Damoclès ? Une situation illustrée par ce dossier, un peu particulier il est vrai au vu de l'animosité de départ qui existe entre Oracle et Google.

avatar lolodigital | 

lorsaqu'Oracle a racheté SUN, ce n'était en rien pour sa techno, mais pour assoir encore plus sa place en entreprise et valoriser les brevets autour de java. Point.
Oracle est une machine à milliards et n'a JAMAIS été une boite innovante. Aujourd'hui, elle se bat pour tirer les fruits de son investissement.

avatar Wolf | 

@lolodigital : et Google pour gagner du temps a pirater Java pour créer Android. Si Google pouvait perdre ça serait un bon coup de semonce pour les logiciels libre qui piquent tous ce qu'ils peuvent aux vrai logiciels.

avatar Ali Ibn Bachir Le Gros | 

Cette réaction c'est un réflexe pavlovien. Pour certains le monde se limite à deux couleurs : Apple, le blanc. Et Google, qui distribue un os concurrent, le noir, forcément. L'open source qui propose un modèle opposé au code propriétaire est l'ennemi. Tout ce qui est open source provoque immédiatement une réaction épidermique.

Je ne comprends pas comment on peut être aussi dévoué à une multinationale. Ça me dépasse totalement.

avatar norman | 

En étant "dévoué" à l'évidence on ne peut s'empêcher de se baser sur des FAITS
- Oracle a ACQUIS les droits sur Java
- Google a utilisé le code sans acquitter aucun droits

La question n'est pas de savoir qui est bon ou méchant.
La question est Google avait elle le droit de pomper ce code ?

Les juges répondront. S'ils donnent raison à Oracle, tu pourra geindre sur le "dévouement" des juges.
Comme j'avais trouvé stupéfiant le verdict du juge Allsup ;-)

avatar John Maynard Keynes | 

@lolodigital

Tu connais visiblement assez mal l'histoire d'Oracle et des SGBDR.

Larry Ellison a effectivement un rien moins d'importance que'Edgar F. Codd dans cette histoire mais il est un homme clef tout comme Oracle est historiquement un acteur fondamental dans le développement de ces outils.

Une success story des plus remarquable mené par un homme moins médiatisé que Gates et Jobs de par la nature des produit mais tout aussi fondamental dans l'histoire de l'industrie informatique.

avatar Darth Philou (non vérifié) | 

@lolodigital :
Dans le rachat de SUN il y a également la partie matérielle.
Utile quand dans la stratégie il y a le systèmes intègres genre exadata ou exalogic. Ce n'est pas la même architecture hardware, mais on ne devient pas producteur de hardware du jour au lendemain.
Je pense que Java n'était que la cerise sur le gâteau.

avatar USB09 | 

Historiquement SUN c'est fait devancé (Piqué) par MS , il en et de même pour Oracke par Google. C'est clair parce que Java est incontournable en entreprise.

avatar John Maynard Keynes | 

Historiquement SUN c'est fait devancé (Piqué) par MS

Tu peux détailler ce point d'histoire" ???

avatar jackhal | 

La fin de l'article est de la spéculation qui d'après ce que j'ai compris est sans rapport avec l'objet du procès.
Ce qui est en cause c'est la copie de la structure d'une API, pas les appels à l'API.

De ce que j'en comprend, on ne peut pas, par exemple, créer un concurrent à Google Maps qui reprendrait exactement son architecture pour que les développeurs puissent continuer à utiliser leur code prévu par Google Maps, mais avec le concurrent.

Par contre il y aura peut-être des conséquences pour Wine (quoi que j'en doute), ou MariaDB.
Pour ce dernier aussi j'ai des doutes, 'faut voir. Mais si c'était le cas et comme en plus c'est Oracle qui est propriétaire de MySQL dont MariaDB reprend les API... ça pourrait être bien chiant. Ca pourrait être la fin du "enhanced, drop-in replacement for MySQL" :-/

avatar XiliX | 

@jackhal :
Ce n'est pas ça ce que j'ai compris. Si je reprend ton exemple, à partir des briques des API de Google, je peux créer des API plus évoluées. Ensuite je protèges mes API.

Je cite

[i]De fait, celle-ci estime que les API peuvent bel et bien prétendre à la protection du copyright, même si elles sont composées de « briques » disponibles librement pour tous.[/i]

avatar XiliX | 

@XiliX :
Mince, je pensais que les balises fonctionnent.

avatar John Maynard Keynes | 

@XiliX

Pour les balises c'est ici avec des <> et non des [] ;-)

avatar jackhal | 

Tu as mal compris alors. Si tu étends l'API tu as toujours des références à l'API que tu étends mais tu ne la remplaces pas. Idem si tu la surcharges, ça n'est plus la même chose.

Tu peux donc protéger tes API parce qu'elles font autre chose que celles sur lesquelles elles reposent.
Et heureusement parce que sinon, tout est dérivé du langage machine et rien ne peut être protégé (ou alors tout le monde doit payer à Intel, ARM etc. et à tous les propriétaires des couches d'abstraction intermédiaires).

Le vrai problème c'est le "drop-in" : créer un truc qui ne dérive / n'étend pas ce que fait une autre API mais la remplace purement et simplement, au même niveau d'abstraction et permet de se passer de son modèle.

avatar Ali Baba | 

@jackhal :
+1

avatar Mathias10 | 

N'oublions pas qu'il s'agit d'une décision qui ne vaut même pas jurisprudence et qui si c'était le cas ne le serait que aux USA.

avatar pacou | 

Toujours et encore plus opposé aux brevets logiciel, je suis.

Toutes ces histoires de copyright sur le logiciel me semblent tout à fait contraire à l'innovation logiciel.
Notez que je ne suis pas contre le closed-source, mais que je suis plutôt pour l'open-source.

avatar marc_os | 

@pacou :
'Toutes ces histoires de copyright sur le logiciel me semblent tout à fait contraire à l'innovation logiciel.'

Google n'a innové en rien du tout quand il a reproduit les API de Java. La seule motivation de Google a été la mesquinerie.

avatar lamalice | 

Mais ça n'a rien à voir avec le brevet. Il s'agit de copyright. C'est totalement différent.
Bien sur le brevet logiciel est une aberration. Mais la protection des droits d'auteur en est une autre.
Ici on parle de copier du code sans en référer à l'auteur. Ce serait trop facile.

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