Arm continue à cibler les serveurs avec les Neoverse, un marché qu'Apple ignore

Pierre Dandumont |

Le monde des serveurs est un peu particulier pour les concepteurs de CPU : les clients potentiels n'ont pas du tout les mêmes besoins que le grand public. Et Arm l'a bien compris : la société propose depuis quelques années maintenant les cœurs Neoverse à ses clients, qui peuvent ensuite concevoir des systèmes sur puce pour les serveurs. Des cœurs qui viennent de passer en version 3, comme l'indique Anandtech.

64 coeurs, avec la possibilité de mettre deux chiplets par puce (image ARM).

De façon basique, les Neoverse V visent les performances, et ils sont basés sur les cœurs Cortex X — les plus performants dans les smartphones — avec quelques modifications pour s'adapter à un environnement professionnel. La V1 était basée sur le Cortex X1, la V2 sur le Cortex X3 et la (future) V3 sur le (futur) Cortex X5, une puce très attendue. Arm vise donc les performances, mais dans une optique professionnelle : alors que les systèmes sur puce de smartphones n'intègrent habituellement qu'un cœur Cortex X, il est possible de combiner 64 cœurs Neoverse V3, et de mettre deux composants sur le même socket, soit 128 cœurs par puce. Arm annonce évidemment la prise en charge de la DDR5, de la mémoire HBM et du PCI-Express 5.0. Dans les clients des puces Neoverse V, on peut noter Nvidia ou Amazon, avec ses Graviton.

De fortes attentes sur le CPU ARM Blackhawk, alias Cortex X5

De fortes attentes sur le CPU ARM Blackhawk, alias Cortex X5

La seconde puce annoncée, le cœur N3, vise un marché différent. Les puces Neoverse N dérivent jusqu'à maintenant des cœurs Cortex intermédiaires, ceux de la gamme Cortex A700. Ce sont les cœurs employés le plus dans les smartphones, avec un compromis entre performances et consommation. Arm annonce des systèmes sur puce avec moins de cœurs (jusqu'à 32 tout de même) mais une consommation assez faible, de l'ordre de 40 W au maximum. Comme pour les variantes précédentes, Arm a fait quelques ajustements sur la gestion de la mémoire cache (d'une plus grande capacité dans les Neoverse). Arm devrait aussi lancer un cœur Neoverse E3, basé sur les cœurs basse consommation (Cortex A500) mais il n'y a pas de détails actuellement.

32 coeurs pour le monde professionnel (image ARM).

Apple n'utilise a priori pas ses propres puces

Le point étonnant de tout ceci, c'est qu'Apple n'emploie pas ses propres puces dans ses serveurs, en tout cas pas publiquement. Pourtant, les cœurs employés dans les puces Apple Silicon trouveraient facilement une bonne place dans ce domaine : les cœurs « performants » dépassent largement les résultats des Cortex X pour une consommation plus faible, et les cœurs basse consommation demandent moins d'énergie que les Cortex A700 pour des performances du même ordre de grandeur.

Bien évidemment, il y a deux écueils importants ici. Premièrement, les systèmes sur puce d'Apple combinent des cœurs CPU avec des GPU et offrent finalement peu de mémoire au total. Concevoir un système sur puce qui contient beaucoup plus de cœurs avec une gestion externe de la mémoire — la variante unifiée n'est pas nécessairement importante dans ce cas — n'est pas nécessairement simple ni rentable. Et deuxièmement, Apple a abandonné le monde des serveurs il y a de nombreuses années, et il n'est pas certain que concevoir des puces uniquement pour les serveurs des (nombreux) services d'Apple soit la priorité de Tim Cook.

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avatar heero | 

Apple avait bien quitté le monde des écrans (display) pour revenir, le monde des homepods pour revenir, …. Il y a un pas pour revenir dans le monde des serveurs (je suis sur qu’une variante macOS Server continue en interne). Un peu comme la rumeur d’un comeback des AirPort Extrem/Time Capsule.

avatar occam | 

« …il n'est pas certain que concevoir des puces uniquement pour les serveurs des (nombreux) services d'Apple soit la priorité de Tim Cook »

Rarement l’acte d’accusation des manquements de vision technologique de l’ère du gestionnaire Cook aura-t-il été rédigé de manière aussi nonchalamment suave, avec un air si innocent et inoffensif.

Pour paraphraser l’injonction du commandant De Falco à l’égard du capitaine Schettino : « L’infrastructure, bordel ! »

avatar Paul Position | 

hahahah !! excellent.

avatar clive-guilde | 

@occam

C’était plutôt « remontez à bord bordel » ce qui pourrait se transformer ici par « faites des serveurs bordel »

avatar occam | 

@clive-guilde

« Vada a bordo, cazzo! »
J’ai le T-shirt. Imprimé à Livourne la nuit du naufrage.
Mais j’ai bien écrit : paraphrase.

Ce que De Falco entendait : faites votre devoir. Jusqu’au bout. Ne vous satisfaites pas d’encaisser pour le bling-bling, en espérant que l’intendance veille au grain. Vous voulez être en charge, vous êtes seul responsable. De A à Z.

En pratique, concernant les serveurs, il y a plusieurs voies possibles. Mais si l’on prétend maîtriser soft, hard et services intégrés en circuit clos, il faut également maîtriser ses serveurs. De A à Z. Ce qui signifie maîtriser leur architecture et leur OS.

avatar BeePotato | 

@ occam : « Mais si l’on prétend maîtriser soft, hard et services intégrés en circuit clos, il faut également maîtriser ses serveurs. De A à Z. Ce qui signifie maîtriser leur architecture et leur OS. »

Hmmm… Si on commence à réfléchir comme ça, il faut aussi devenir producteur de matériel réseau (et du logiciel qui tourne dessus, évidemment). 😉

avatar fte | 

@BeePotato

"Hmmm… Si on commence à réfléchir comme ça, il faut aussi devenir producteur de matériel réseau (et du logiciel qui tourne dessus, évidemment). 😉"

Je connais des entreprises qui montent leurs serveurs et leurs routeurs et leurs serveurs de stockage et leurs firewalls… ça existe.

Certes, elles ne conçoivent pas les puces, les logiciels genre OpenWRT ou pfsense, ou encore filent leurs propres paires symétriques depuis des lingots de cuivre brut, mais le degré de contrôle et de "possession" est très élevé malgré tout.

avatar fleeBubl | 

@occam

Aïe aïe aïe i!i
Bienvenue à :
L’Appxit

avatar fte | 

Qui voudrait de serveurs sur lesquels on ne pourrait installer que des softs depuis l’App Store ?!

avatar debione | 

Cela va dans le sens de l'Apple de TC.
Mais en effet, on peut se demander si Apple n'a pas loupé une diversification intéressante avec la production de puce pour serveurs. Pas seulement les siens comme le mentionne l'article, mais devenir un acteur majeur général. Car en effet, si on comprend bien qu'Apple réserve ses puces pour son propre matériel, sur des serveurs, cela ne rentrerait absolument pas en concurrence.
Peut-être le fameux mur de la versatilité d'Apple qui l'empêche d'être très présente dans le monde de l'entreprise.

avatar Florent Morin | 

Du reste, côté logiciel, Swift for Server monte en puissance et est extrêmement véloce sur architecture ARM. De surcroît, la consommation mémoire est très basse.

Sachant qu’Apple migre doucement mais sûrement ses services vers Swift. Le dernier publiquement connu étant iCloud il y a 2 ans.

avatar hartgers | 

Cela fait bien longtemps qu'Apple ne fait que du consumer electronics. Même depuis le début ! Le fait que les XServe aient existé montre que le marché avait l'air intéressant, mais pas assez rémunérateur pour continuer cette ligne de produits. Bien sûr ça pose question : en interne, comment Apple gère-t-elle son infrastructure réseau ? D'un autre côté, macos est basé sur unix, donc la différence ne doit pas être énorme d'un point de vue logiciel (?). D'un point de vue matériel par contre, ce serait intéressant chez qui ils se fournissent.

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