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Comment HTML 5 va changer la donne

Arnaud de la Grandière

mercredi 17 juin 2009 à 14:36 • 53

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Une lente évolution

Depuis l'avènement du Web, il n'y a eu que peu de changements radicaux. Nous sommes partis de simples pages HTML codées en "dur", puis nous avons eu les contenus dynamiques grâce au cumul de PHP et MySQL, et plus d'interactivité avec Javascript. Le mélange des trois technologies a abouti à Ajax, pour des pages plus réactives encore. Les feuilles de style permettent de faire évoluer le design d'un site plus simplement, et les flux RSS nous gardent informés des nouveaux contenus.

Au regard des ans, le Web avance à un train de sénateur, comparé aux autres branches de l'informatique. L'organisme qui régule les standards du web, le consortium W3C, s'est d'ailleurs vu remis en question précisément pour son inertie, poussant les développeurs de navigateurs à s'allier pour créer le WHATWG, dont les travaux ont d'ailleurs servi de base de travail pour HTML 5, en chantier depuis maintenant plus de cinq ans. Il faut dire qu'il n'est pas aisé d'effectuer une transition technologique dans le domaine des standards du web : la multitude de machines susceptibles de consulter une page web, mais également les capacités des systèmes d'exploitation ou encore la mise à jour des divers navigateurs n'y aident certainement pas.

Des contraintes gênantes

Et il faut bien dire que ça s'en ressent : aujourd'hui encore les sites internet les plus avancés sont toujours faits de bric et de broc… de faux éléments d'interface bâtis à l'aide de tableaux qui sont susceptibles à la fois d'être interactifs et d'être sélectionnés comme le serait du texte. Les sites qui permettent de faire du traitement de données ne collaborent pas entre eux, un simple copier-coller de texte enrichi peut virer au casse-tête. Des problématiques qui semblent dater de la préhistoire de l'informatique, mais qui font pourtant encore notre quotidien.

À chaque instant, les concepteurs doivent faire preuve d'ingéniosité pour se libérer des contraintes hiératiques du format HTML. Certes, il a vite été possible d'ajouter des contenus différents aux pages web à l'aide des plug-ins, mais ceux-ci ont apporté leur lot de problématiques : formats propriétaires, téléchargement et installation parfois compliqués, incompatibilité avec certaines configurations, etc. Moralité, toutes ces embuches ajoutent une nouvelle fracture numérique : pour ne pas être un internaute de seconde zone, il faut maîtriser nombre de techniques qui devraient pourtant nous être inconnues, ne serait-ce que pour ajouter une simple image sur une réaction dans un forum. Bref, autant de contradictions avec la vocation universaliste du Web. Alors qu'on parle de plus en plus d'applications web, celles-ci souffrent mal la comparaison avec de véritables applications offline, incommensurablement plus souples et d'accès plus aisé.

Une évolution plus qu'une révolution

Le HTML 5 a pour vocation de répondre à un certain nombre de ces problématiques, tout en maintenant une compatibilité ascendante avec les précédents standards. Concernant la mise en page en elle-même, le nouveau standard permet de simplifier les choses avec de nouvelles balises de type <header>, <article>,<aside>,<footer>,<nav>, etc, qui officialisent la structure de nombre de sites web, en lieu et place des multiples balises <div> qui servaient jusqu'ici à délimiter les zones de contenus. De même, une nouvelle technologie nommée Canvas se charge d'afficher des images composées dynamiquement, ce qui permettra la création d'interfaces d'utilisation plus puissantes et mieux intégrées, ainsi que des applications plus dynamiques (voir démo ci-dessous).


Cliquez sur l'image


D'autres technologies comme la sauvegarde locale des données permettra d'assurer la confidentialité de vos données (sans nécessité de les envoyer sur le serveur pour les traiter), comme d'éviter de perdre votre travail en cas d'interruption de la connection. On peut en voir un exemple ici, poussant un peu plus les applications web vers leurs équivalents hors-ligne (voir aussi l'article Google Calendar active son mode hors ligne). De même, le stockage de données sur la durée d'une session d'utilisation permettra de faire passer des données d'une page à l'autre.

Toujours dans la même optique, les Web Workers, quant à eux, permettent de lancer des opérations en tâche de fond, ce qui rendra les pages web encore un peu plus réactives. Le glisser-déposer devient enfin officiellement supporté en lieu et place des astuces utilisées jusqu'ici. De nouveaux "widgets" sont disponibles, permettant de contrôler dynamiquement le contenu d'une page web. Enfin, la vidéo et l'audio font leur entrée officielle sur le Web : jusqu'alors dévolus aux plug-ins comme QuickTime, Windows Media Player, Real Player, ou encore Flash, ils seront désormais intégrés aux pages HTML de la même manière que les images, et il est également possible de les piloter par JavaScript à l'aide de controleurs personnalisés.

Vers la fin des plugins?

Au regard de ces nouveautés, les plug-ins utilisés jusqu'ici pour les applications en ligne, tels que Flash, Silverlight ou encore JavaFX, pourraient voir leur hégémonie remise en question : pourquoi s'encombrer de plug-ins quand le navigateur pourrait gérer tout ça nativement, sur toutes les plate-formes? D'autant que l'avenir d'un format propriétaire ne dépend justement… que de son propriétaire. Rien ne les empêchera demain de vous faire payer pour utiliser leurs technologies, ou encore d'y mettre fin si ça leur chante. L'intérêt d'un standard ouvert, c'est qu'il n'appartient à personne. Ce constat posé, quelles sont les chances de voir les plug-ins perdre du terrain?

Le problème du HTML 5, c'est qu'il lui faudra encore 5 à 10 ans pour être terminé. Il reste de nombreuses batailles à livrer, ne serait-ce que sur l'officialisation d'un codec pour la vidéo et l'audio, qui risque de freiner encore longtemps ces avancées. Cependant les navigateurs récents ont commencé à implémenter les spécifications qui ont d'ores et déjà été rédigées. Mais encore faut-il que non seulement chaque navigateur en fasse autant, mais en plus que les utilisateurs finaux se mettent à jour pour en profiter. Ce qui représente une base d'utilisateurs potentiels somme toute encore limitée. Ce qui entraîne un cercle vicieux : sans utilisateurs, les sites n'utiliseront pas cette technologie, et sans contenus, les utilisateurs n'ont pas d'incitation à se mettre à jour, voire à changer de navigateur. Microsoft l'a bien compris, et on n'a pas fini de déplorer sa vieille habitude à détourner les standards pour les proposer à sa propre sauce, forte de la majorité encore écrasante d'Internet Explorer.

Un autre aspect de cette problématique se ressent face à Flash : pourquoi proposer un contenu qui ne sera accessible qu'à une portion limitée de visiteurs, quand le plug-in d'Adobe permet d'afficher du contenu sur 99% des machines connectées à Internet ?. Adobe elle-même avait fait face à cette problématique avant sa fusion avec Macromedia : elle avait promu le standard ouvert SVG pour contrer Flash, avec le peu de résultat que l'on sait. Adobe a fini par se résoudre au dicton américain : if you can't beat them, join them (si vous ne pouvez les vaincre, joignez-vous à eux).

Si les navigateurs modernes permettent d'ores et déjà d'exploiter certaines de ces fonctions avec plus ou moins de bonheur, les sites ne feront la bascule qu'une fois qu'une majorité significative de visiteurs sera à même de les utiliser. Et c'est là où on en revient à la problématique de départ, à savoir l'inertie de la propagation des nouveaux standards du web. Cependant la donne a quelque peu changé avec une concurrence plus accrue face à Internet Explorer, et des internautes plus ouverts à la nouveauté. Ils mettent à jour leurs navigateurs plus volontiers, maintenant qu'ils sont plus sensibilisés aux bénéfices qu'ils peuvent en tirer. Espérons que ces mentalités moins conservatrices permettront un déploiement plus rapide du HTML 5, au plus grand bénéfice de tous.
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