La purge des comptes qui déplaisaient au patron initiée courant de la semaine dernière n’a peut-être pas eu les effets escomptés pour Twitter. Elon Musk a initié une nouvelle vague de migration d’utilisateurs mécontents de cette politique, avec de nombreux journalistes en particulier qui se sont tournés vers Mastodon, ce réseau social décentralisé qui propose des fonctions proches. Face à cette nouvelle vague, le CEO a tenté un nouveau coup dans la journée de dimanche, en essayant d’interdire la publication de liens vers d’autres réseaux sociaux.
La formulation était (à peine) plus subtile, puisque l’idée de la politique était d’interdire les comptes qui existent uniquement pour promouvoir les autres réseaux sociaux. Néanmoins, elle aurait pu aboutir à la suppression de tous les messages qui contiennent un lien vers un autre réseau, voire à la suspension de tous les profils qui intègrent un tel lien dans leur description. Alors que Twitter avait déjà interdit la publication de liens vers plusieurs grosses instances Mastodon, c’était une tentative de fermer les portes vers d’autres sites internet, une décision osée tant elle va à l’encontre des principes du web.
Cette règle a survécu quelques heures… avant d’être effacée. Le compte @TwitterSupport a supprimé ses tweets annonçant le changement et même la page web du support qui affichait les règles détaillées n’existe plus. Est-ce qu’Elon Musk a enfin réalisé son erreur ? Ou bien a-t-il simplement compris que cette interdiction allait à l’encontre des nouvelles règles européennes, qui prévoient explicitement qu’une plateforme telle que Twitter ne peut pas bloquer la publication de liens vers des concurrents ? En apparence non, mais le maître des lieux a décidé que toute décision majeure devait désormais être décidée par un sondage.
Deux sondages sont ainsi actifs à l’heure où j’écris ces lignes : le compte @TwitterSafety demande si le site doit mettre en place la règle qui a été brièvement introduite hier et Elon Musk demande sur son propre compte… s’il doit rester à la tête de Twitter. Il promet de respecter la décision de ce sondage et après plus de 12,7 millions de votes, la tendance lui est plutôt défavorable. Son chantage émotionnel ne changera peut-être pas le résultat final, mais il a déjà prouvé ces dernières semaines qu’il n’hésitait jamais à supprimer et refaire un sondage si un résultat ne va pas dans son sens.
Le sondage sur l’interdiction de la promotion d’autres comptes sociaux a reçu nettement moins de votes, mais le résultat pour le moment est une écrasante opposition à cette règle. De toute manière, cette idée était intenable, tant techniquement (un raccourcisseur d’URL suffisait à contourner les blocages) que politiquement. Et puis ce n’est pas comme si Twitter avait besoin de règles objectives pour suspendre des comptes, l’entreprise l’a prouvé la semaine dernière en suspendant des comptes de journalistes sous de faux prétextes. Il faut toutefois noter que ces suspensions ont pour la plupart été levées depuis, même si ce n’est pas le cas pour tous ceux qui étaient impliqués, de près ou de très loin, dans le suivi du jet d’Elon Musk1.
Pendant ce temps, Mastodon a de nouveau reçu un immense coup de projecteur depuis hier. Le nombre de comptes créées sur ses instances a explosé encore une fois et autre signe du succès de cette dernière vague, l’app officielle a atteint le top 10 des réseaux sociaux sur l’App Store américain. C’est mieux que la messagerie instantanée Signal et une nouvelle preuve de l’efficacité de l’effet Streisand. Mastodon reste un nain en comparaison de Twitter bien entendu, mais Elon Musk lui offre une popularité inespérée depuis son arrivée à la tête du réseau social.
Mise à jour le 19/12/2022 13:14 : le sondage sur le maintien d’Elon Musk à la tête de Twitter est terminé et les résultats sont sans appel. La majorité des 17,5 millions de votants, 57,5 % exactement, souhaitent que l’actuel CEO cède sa place. Le fera-t-il ? Et si oui, qui choisira-t-il pour le remplacer ? Allez savoir…
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Ce n’est notamment pas le cas du compte @elonjet qui a lancé la purge, ni de celui de son propriétaire. Pourtant, les règles actuelles n’empêchent pas le suivi des jets privés, uniquement leur suivi en temps réel. ↩︎
Source : Accroche : @ggamel