En 2023, la disquette ne veut toujours pas mourir

Félix Cattafesta |

Alors que la production s'est arrêtée en 2011 et qu'Apple l'a abandonnée avec l'iMac G3, la disquette est loin d'être enterrée. Ce support de stockage est encore utilisé bon gré mal gré par de nombreux professionnels travaillant sur des machines n'ayant jamais pris le virage de l'USB. Wired s'est penché sur ces derniers résistants œuvrant dans des domaines divers et variés.

Différentes disquettes. Image : Wikipedia.

Le journal cite par exemple Davit Niazashvili, un ingénieur de maintenance pour une entreprise d'aviation en Géorgie. Celui-ci utilise régulièrement des disquettes pour mettre à jour deux Boeing 747-200s datant de 1987. La manœuvre est critique étant donné qu'elle ajoute des données essentielles sur la navigation ou les pistes, et doit être effectuée tous les 28 jours selon un calendrier préétabli.

Lorsqu'une mise à jour est publiée, nous devons la télécharger sur deux disquettes de 3,5 pouces. Il n'y a plus d'ordinateurs avec des lecteurs de disquettes intégrés, nous avons donc dû nous en procurer un via un partenaire externe […] Ensuite, nous emmenons les disquettes dans l'avion pour mettre à jour le système de gestion de vol. L'opération dure environ une heure.

Le format est donc loin d'être pratique : Niazashvili précise que les disquettes sont très sensibles et qu'elles ne peuvent généralement servir que trois fois avant d'être jetées. Si les Boeing 747-200s se font progressivement rares (il en reste moins d'une vingtaine en circulation), plusieurs autres avions mis sur pieds dans les années 90 reposent également sur un lecteur de disquette. Les entreprises pourraient investir pour passer leurs avions à l'USB, mais l'opération est couteuse et la solution actuelle, bien qu'archaïque, fonctionne. La disquette n'est pas le support le plus exotique du domaine, certains coucous imposant des disques ZIP ou des cartes PCMCIA dont le stock se fait de plus en plus maigre.

De nombreux secteurs spécialisés ont encore recours aux disquettes, parfois le seul moyen d'entrer des données dans des machines produites dans les années 90 mais pensées pour durer une cinquantaine d'années. On y trouve notamment des appareils de découpe ou de broderie professionnels, mais aussi des instruments de musique ou des imprimantes. La plupart coûtent une petite fortune, et les bécanes ne sont pas particulièrement vieilles par rapport à leur cycle de vie. Les industriels et autres clients n'ont donc pas vraiment d'intérêt à changer.

Une disquette 8 pouces (à gauche). Elles ont été utilisées dans l'arsenal nucléaire américain jusqu'en 2019. Image : Wikipedia.

Wired a pu discuter avec Tom Persky, qui gère le site de vente de disquettes floppydisk.com. L'homme a réussi à racheter un stock de centaines de milliers de disquettes en Californie, et en écoule environ 1 000 par jour. Si les stocks ont pris de la valeur sur la dernière décennie suite à l'arrêt de la production, il semble difficilement concevable de faire fortune grâce aux disquettes. Les clients se tournent désormais vers des émulateurs personnalisés pour leur machine permettant d'envoyer des données via USB.

Difficile de savoir combien de disquettes neuves il y a en circulation, mais une chose est sûre : le stock est terminé et diminue de jour en jour. Il en reste cependant largement assez pour répondre à ce marché de niche. Selon Tom Persky, seul un modèle est en voie d'extinction : la disquette 8 pouces produite par IBM en 1971. « Il n'y en a plus, et nous vendons celles que nous avons à 5 dollars [l'unité] par boîtes de dix », explique-t-il.

Malgré l'arrêt de la production, la fin de la disquette n'est pas pour demain. L'administration japonaise y a toujours massivement recours : le ministre chargé du numérique expliquait au mois de décembre qu'environ « 1 900 procédures nécessitent encore l'usage des disquettes ou CD ou MiniDisc ». S'il a promis de remédier au problème et de faire basculer l'administration dans la modernité, il faudra surement plusieurs années avant que tous les domaines soient à jour. Certaines banques de l'archipel imposent encore l'usage de la disquette pour certaines opérations, tandis que d'autres demandent des validations par fax…

Source
Image d'accroche : Pixabay.
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avatar Glop0606 | 

Je vais donc garder précieusement mon paquet neuf de 10 disquettes BASF, ;)...
Mais un article intéressant qui pourrait en ouvrir un autre à savoir la pérénisation des données dans le numérique. Perso j'utilise la méthode de mettre à jour toutes mes données accumulées sur la dernière techno du moment. En ce moment NAS + Cloud.
On pourrait encore plus ouvrir ce sujet super important sur le long terme quant au format des données enregistrées. Par exemple mon système d'archivage est le PDF mais quid si dans 50 ans on pourra encore ouvrir nos PDF de 2023?...

avatar Link1993 | 

Faut savoir que ça se fait encore à la disquette (plus ou moins) sur un Boeing 777-300 (ça vol partout ce machin). Ça passe par un vieil ordi pour configurer la mise à jour, et ensuite la copier sur un dispositif qui sera brancher sur l'avion.
Sauf que maintenant, ça passe par le machine virtuelle maintenant.

Faut que je retrouve l'article :)

Mais toute la partie industrielle est obligée de bosser avec ça parce que le matériel est chère et long à amortir comme expliqué dans l'article.

Édit : j'ai confondu pleins de truc... c'est le 767 qui était comme ça... et en effet, le 747-400 (ça volait chez Air France jusqu'en 2015, et ça vol encore pas mal en cargo), et apparement, les premiers A320 aussi.

avatar heero | 

Au Japon ce support est encore utilisé et le gouvernement vient seulement de parler (septembre passé) d’aller vers sa suppression

https://twitter.com/konotaromp/status/1564767072554745856?s=20

avatar Dr. Kifelkloun | 

J'ai récemment acheté sur ebay un lecteur iomega Zip USB pour quelques $. Je voulais tenter de lire des disques des années 1990 retrouvés dans une caisse d'archives.
A ma grande surprise, les disques étaient encore lisibles et j'ai retrouvé des trésors.
Ça bien fait réfléchir. D'abord, je suis épatée par la quantité d'informations qu'on pouvait stocker dans quelques MB... Aujourd'hui on ne jure qu'en GB ou TB. Le moindre document word prend une place folle. Mais des années de mes études tiennent sur ces supports "morts".
Deuxio, je me demande si les supports de 2023 sont réellement plus fiables. Je détestais les disquettes et les zip... C'était chiant, lent, bruyant etc etc. Mais c'est lisible des dizaines d'années plus tard. Qu'en sera-t-il des "clouds", des SSD de 2023 ? l'USB-C sera vite aussi ringard que le PCMCIA. Nos données prennent de plus en plus de place, il y a de plus en plus de formats de fichiers, et j'ai du mal à cerner ce qui va en rester.
Finalement, je suis épatée d'avoir trouvé en 2023 un lecteur zip fonctionnel alors que dans les 90s ces merdes m'exaspéraient au plus haut point.

avatar Pierre Dandumont | 
Je récupère assez de ZIP pour dire un truc : c'est pas spécialement fiable. C'est pas horrible comme les Syquest, mais y a une partie significative qui meurt avec le temps (dans mes essais, environ 25 % d'illisibles)
avatar GianoM | 

@Pierre Dandumont

Je confirme, ayant été victime du fameux « clic de la mort ». J’avais perdu 2-3 disquettes Zip…

avatar Dr. Kifelkloun | 

J'ai moi aussi souvent eu droit au click de la mort dans les années 90, quand mes disques zip étaient un moyen de sauvegarde important 😖 (et il n'y avait pas énormément d'alternatives). Et c'est précisément pourquoi je suis surpris d'avoir mes disques encore lisibles en 2023 ! Ils étaient stockés dans de très bonnes conditions, mais surtout je crois que les lecteurs étaient pires que le support. Je n'attendais pas grand chose du lecteur trouvé sur ebay.

avatar GianoM | 

@Dr. Kifelkloun

Je me souviens à présent d’avoir réussi à récupérer le contenu d’une disquette ZIP contaminée par le click de la mort. Je l’avais conservée malgré tout pendant longtemps car c’était l’unique copie (!!!) de fichiers qui me tenaient à cœur.
Cette disquette était formatée avec le système HPFS d’OS/2 et je m’étais servi d’un utilitaire sous Windows (je ne me souviens malheureusement plus de son nom), et je me rappelle que la récupération avait duré assez longtemps. Il me semblait bien avoir tout récupéré avec succès. Évidemment j’avais utilisé un autre lecteur ZIP que celui d’origine.

avatar Dr. Kifelkloun | 

J'ai aussi un disque zip que je n'arrive pas à monter et j'aimerais bien l'ouvrir... J'ai essayé sur 3 mac différents y compris un macbook collector avec un vieux Mac OS, mais rien y fait. Tous les autres zip se sont ouverts mais celui-ci résiste. Il semble pourtant physiquement intact. C'est un peu bizarre parce que j'avais une vingtaine de zip datant de la même époque, fait à partir des mêmes ordis, mais il faut maintenant des protocoles différents pour les ouvrir. Je ne connais pas assez bien les systèmes pour comprendre...

avatar GianoM | 

@Dr. Kifelkloun

Je pense qu’il faudrait passer par un utilitaire spécialisé dans la récupération de données - si le disque zip n’est pas directement accessible par le système d’exploitation.
Toujours impossible de m’en souvenir du nom de l’utilitaire dont j’en avais parlé. J’étais tombé là-dessus par hasard après des recherches sur le Net.
La récupération s’était faite à l’aide de Windows XP installé sur mon MacBook à l’époque. La structure éclatée du système HPFS avait probablement aidé à la récupération complète des données. Mais le coup de chance avait aussi certainement contribué.

avatar koko256 | 

@Dr. Kifelkloun

La taille d'un word dépend essentiellement des images qu'il contient. Que de texte c'est assez léger.

avatar iPop | 

Concernant Boeing, il ne serait pas temps de mettre plutôt cet avion (1987!) à la casse, j’ai un sérieux doute sur sa solidité. 🤔

avatar Dr. Kifelkloun | 

Si sa solidité était douteuse il ne serait peut-être pas là depuis 1987...

avatar iPop | 

@Dr. Kifelkloun

Ah, oui ? Comme les bateaux rouillés à merveille qui finissent dans les océans, à la dérives ou échoués que même la compagnie ne se déplacera pas pour faire le ménage ?
Le plus souvent ces avions sont usés jusqu’à la corde et finissent écrasés, trop d’accidents le confirme.
Quand on pense ce que subit l’armature de l’avion tout au long de sa vie, je doute que changer 3 pièces suffise, autant en avoir un neuf.

avatar MGA | 

@iPop

« Le plus souvent ces avions sont usés jusqu’à la corde et finissent écrasés, trop d’accidents le confirme. » je ne crois pas que cette affirmation soit juste, et je n’ai rien trouvé qui puisse confirmer votre affirmation.

Évidemment lorsqu’un appareil est commercialisé, fabriqué et exploité depuis de nombreuses années il a beaucoup plus de chance d’avoir connu plus d’accidents mais ce n’est en aucun cas corrélé à l’âge de l’avion concerné ni même à son état. Edit : la crise du 737 max a montré qu’un appareil moderne et récent peut tout à fait poser problème (pour mémoire 2 accidents en 5 mois, environ 2 ans après les premières livraisons)

D’autre part vous ne pouvez pas comparer les mesures de sécurité, les procédures d’entretien et les contrôles en vigueur dans le domaine maritime et dans le domaine maritime.

avatar iPop | 

@MGA

Oui, moi je rappelle encore des morts.

avatar MGA | 

@iPop

Plus que l’avion en lui même, c’est l’entretien (les défauts d’entretien sont souvent corrélés à des problèmes financiers dans les compagnies) et les erreurs humaines (qui surviennent dans des circonstances d’exception) qui sont le plus souvent à l’origine des accidents.

avatar Dr. Kifelkloun | 

Tous les avions ne sont pas des 747-200...
Et il y a des avions bien plus vieux que ça qui volent encore.
Par contre, en effet, je ne comprends pas bien l'intérêt de faire voler ces trucs même s'ils peuvent voler.

avatar Matlouf | 

Ces vieux avions peuvent encore servir pour le fret, qui est beaucoup moins regardant sur le bon état de la décoration de la cabine. Avec un long-courrier coûtant dans les 100 M€, on les rentabilise jusqu'à la corde.

avatar Dr. Kifelkloun | 

Quand un avion se vautre c'est rarement causé pas l'état de décoration de la cabine... Les avions de fret ont quand même un équipage ! Comme a dit @MGA la qualité et la régularité de l'entretien sont essentiels. Je me souviens avoir volé (avec Corsair) sur des avions bien plus récents que ce 747 et qui faisaient vraiment peur tellement ils étaient pourris.

avatar occam | 

@iPop

"Quand on pense ce que subit l’armature de l’avion tout au long de sa vie, je doute que changer 3 pièces suffise,"

Statistiquement, il n’y a pas de corrélation significative entre l’âge des appareils et la fréquence des accidents avant un seuil d’environ 20 ans :
http://awg.aero/wp-content/uploads/2019/09/analysisofimpact.pdf
(p. 12 et suivantes)
De 20 à 27 ans, la corrélation est également minime, mais la variance augmente.
Il faut cependant noter que les entreprises qui assurent l’entretien comptent l’âge effectif en cycles de pressurisation et en heures de vol plutôt qu’en durée absolue de calendrier. Ce sont ces cycles qui affectent en premier lieu la durée de vie fonctionnelle d’un appareil :
https://aircraftmaintenancestands.com/blog/life-span-of-an-airplane/

avatar tupui | 

@iPop

Les règles sont les mêmes pour avion neuf ou ancien comme celui ci. Chaque pièce, jusqu’au boulon est suivie et diverses maintenances sont programmées pour changer/réparer les choses. Ce sont des machines qui sont conçu pour être démonté et réparé, donc oui il suffit de changer les pièces et ça roule.

Un point important est qu’un ancien appareil devient de plus en plus fiable car lorsqu’on trouve un problème, il est communiqué à toute l’industrie qui le rectifie et propose, voir impose les modifications. Si le problème est grave, on hésite pas à immobiliser les flottes (comme pour le 737).

Quand à garder un avion ou le changer. Pour faire simple, le tout est de savoir si 1. financièrement ca vaut encore le coup (nouvelles technologies, anciens composants étant en de plus en plus difficile à trouver et chère, et surtout des composant plus important qui arrivent en fin de vie et qui coûtent chère), 2. si le système passe les nouvelles exigences de certification et 3. si l’avion répond toujours à un besoin.

avatar pelipa91 | 

La gamme A320 (avant neo) utilise encore les disquettes
Et c’est pareil pour tous les appareils de cet âge là.
L’A380 a pris le virage du CDROM mais pas avant chez Airbus

avatar DahuLArthropode | 

Pour les avions, je soupçonne que le coût n’est pas tellement de concevoir une solution de remplacement et de l’installer (c’est comme rien): ce serait surtout de refaire toutes les certifications pour avoir le droit de voler avec.

avatar ShepardN7 | 

J'avais lu un article du Monde sur la place encore omniprésente des disquettes au Japon. Tout simplement édifiant et paradoxal pour le pays ayant toujours l'image d'être technologiquement le plus avancé au monde. Mais dont l'administration est assimilée à un dinosaure...

Certaines old techs ont du mal à mourir. Est-ce une si mauvaise chose au fond ? ;)

source : https://www.lemonde.fr/pixels/article/2022/09/09/pourquoi-le-japon-a-tant-de-mal-a-se-defaire-du-fax-et-de-la-disquette_6140931_4408996.html

avatar marc_os | 

@ ShepardN7

> édifiant et paradoxal

Ce n'est pas paradoxal si les gens qui ont travaillé ont bien travaillé* et n'ont pas livré de produit jetable au bout de six mois comme on sait si bien le faire dans l'administration française, le ministère de l'intérieur gagnant si j'ai bien compris la palme de l'incompétence en matière d'informatisation de ses services (à moins que ça soit volontaire, une façon de trainer le pieds pour délivrer les cartes de séjour aux étrangers en situation régulière - à ces salops d'étrangers).
C'est comme pour le "bogue" de l'an 2000 qui n'en a été un que parce que les logiciels de gestion (écrits souvent en Cobol) ont été bien développés et qu'ils fonctionnaient comme voulu après des années de services, même jusque « l'an 2000 ».

(*) A priori, le Japon est comparable à l'Allemagne de ce point de vue. « Ça rigole pas » question qualité.

avatar guijou | 

Tout ça a désormais un charme fou…
Ce qui est beau également, c’est que ça fonctionne, tout simplement!

avatar FrDakota | 

J’ai des Zip, Syquest mais plus possible des les connecter en SCSI maintenant. 😩

avatar melaure | 

Les disquettes sont encore bien pratiques pour les collectionneurs, c’est pas Pierre qui va me contre-dire ;)

avatar leinuo88 | 

Ca me fait pense à Microsoft internet explorer qui ne veut pas mourir et qui est encore demandé pour des opérations bancaires en Chine
:’(

avatar Darkgam3rz | 

Bon que personne ne se moque, mais j’utilise au quotidien une platine minidisk 😁 et qu’elle son encore aujourd’hui ! C’est simple, les enregistrements qui ont facilement 20 ans aujourd’hui fonctionnent et sonnent comme au premier jour! Un RÉGAL !

avatar Biking Dutch Man | 

Je viens de connecter mes 2 lecteurs/enregistreurs DVD sur mon Mac Book Air M2 (13.2.1), un LG et 1 Apple et les deux semblent fonctionner sans problème. J'espère qu'il en est de même pour vous.

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