iTunes Music Store, le test

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Une chose est claire, même si tout le monde s'y attendait, Apple fait très fort en proposant aux utilisateurs de Mac (et bientôt à ceux de Windows) un service d'achat de musique en ligne. Mais sans s'attarder sur les qualités de négociateur du patron d'Apple qui a tout de même réussi à réunir les titres des cinq majors, jetons plutôt un oeil au fonctionnement d'iTunes Music Store. Précisons toutefois avant de commencer que, à moins d'avoir un ami avec une carte de crédit américaine qui partagera avec vous son compte (étant donné qu'un compte Music Store peut être partagé entre trois Mac) et donc son porte-monnaie, vous devrez attendre qu'Apple ait négocié avec les filiales locales des maisons de disque avant de pouvoir acheter des chansons. Ceci ne vous empêche par contre pas de naviguer sur le service pour jeter un oeil à son catalogue.




Un enregistrement facile

L'enregistrement se fait très simplement en remplissant un formulaire avec vos coordonnées, vient ensuite la phase de la carte de crédit (qui permettra justement de déterminer si vous êtes autorisé à utiliser ce service) et c'est tout. Donc, à part le prix des morceaux téléchargés, l'utilisation d'iTunes Music Store ne coûte rien. Le système fonctionne sur le principe du "One Click", une technologie licenciée par Amazon à Apple et qui vous permet d'acheter d'un simple clic de souris la chanson de votre choix sans avoir a sortir votre carte de crédit à chaque transaction.




À la découverte d'iTunes Music Store

Découvrir iTunes Music Store ne coûte donc rien, si ce n'est télécharger la dernière version du logiciel de lecture MP3 d'Apple et QuickTime 6.2. Lorsque vous entrez sur le service, vous trouvez une page d'accueil qui vous présente une sélection d'artistes et d'albums avec des classements divers (choix du staff, meilleurs téléchargements, nouveautés...). Le système permet de naviguer très facilement selon plusieurs méthodes :


Un menu déroulant vous propose d'aller directement visiter le catalogue d'un genre particulier dans lequel vous retrouverez également divers classements.


Un moteur de recherche disponible en permanence vous permet de tenter de trouver votre bonheur et si vous avez un besoin très précis vous pouvez accéder au moteur de recherche avancé qui vous propose d'effectuer une requête avec le choix de l'artiste, du genre, du nom de l'album, du compositeur ou encore du titre de la chanson.





La fonction "Explorer" permet, tout comme dans le mode de visualisation par colonnes du Finder de Mac OS X, d'explorer la hiérarchie du catalogue avec une sélection tout d'abord par genre, par artiste ensuite, puis par album pour finalement trouver les morceaux. Cette solution est certainement la plus rapide puisque l'interface ne contient aucune image ou élément superflu.





En ayant utilisé un concept ergonomique ressemblant à un navigateur Web et que tout le monde connaît, Apple permet de s'y retrouver très facilement. À tout moment, l'utilisateur sait à quel niveau du service il se trouve. Et bien sûr, chaque fois que vous désirez écouter un morceau, il suffit de cliquer 2 fois dessus ou appuyer sur le bouton de lecture pour obtenir un extrait de 37 secondes qui vous permettra d'apprécier ou non la chanson. Sur une connexion câble ou ADSL la chanson démarre immédiatement et la qualité d'écoute est excellente (la compression est faite à 128 Kbps). Ceux qui auraient une petite connexion peuvent toujours, dans les préférences d'iTunes, définir qu'ils désirent télécharger en cache l'aperçu avant de l'écouter.


Moins d'un $ la chanson

Passons maintenant à l'achat des chansons et album. Il n'y a en fait rien de plus simple puisque, comme expliqué plus haut, le système est basé sur le OneClick qu'Apple utilise déjà pour son magasin en ligne. En résumé :


- Choisissez votre chanson ou votre album.


- Cliquez sur le bouton d'achat (une boîte de dialogue (qui peut être désactivée) vous demande si vous désirez vraiment acheter l'élément choisi)





- La ou les chansons se téléchargent sur votre disque dur.




Pour ceux qui ont tendance à être impulsifs et craignent de se ruiner, il est possible d'aller dans les préférences d'iTunes afin d'activer l'option panier d'achats ce qui permet d'effectuer une sélection de morceaux ou album avant de passer à la caisse.





Vous vous demandez ce qu'il se passe si, au milieu du chargement, votre connexion s'arrête ? Apple a pensé à tout : dans le menu "Avancée" l'option "Rechercher la musique achetée..." vous permet de télécharger tous les morceaux dont le téléchargement n'aurait pas abouti. Nous nous sommes également posé la question de savoir, si, par la plus grande malchance, vous perdiez le contenu de votre disque dur il serait possible de télécharger à nouveau les morceaux perdus. Apple qui offre pour son service d'achat de musique en ligne une "hotline" avec une réponse assurée dans les 4 heures durant les heures d'ouverture (promesse tenue) nous a répondu que cela n'était pas possible. "Chaque utilisateur est responsable du contenu de son disque dur et de sa sauvegarde" et la société conseille donc de bien sauvegarder vos morceaux "ce qui est très facile avec iTunes grâce à ses nombreuses options qui permettent de transférer la musique sur un iPod, CD audio traditionnel et des CD ou DVD de données...", dixit le support d'Apple.


Rapport qualité/poids

Chaque morceau téléchargé arrive sur votre disque au format AAC encodé à 128 Kpbs ce qui, selon Apple, correspond à la qualité d'un fichier MP3 de 160 Kbps. Le fichier est donc plus petit que le format MP3 pour une qualité équivalente. Cela permet donc, même avec une connexion pas trop rapide, d'avoir une écoute de qualité sans devoir passer trop longtemps à télécharger. La qualité du AAC à 128 Kbps est vraiment très bonne et n'a aucun complexe à éprouver face à un CD audio standard. Mais on n'utilisera toutefois pas le terme "excellent" car on entend quand même une différence, surtout sur un système sonore de qualité ou par exemple dans le cas d'écoute de musique classique. Partant de ce constat, on regrette qu'Apple ne donne pas l'option de pouvoir télécharger en 2 qualités ce qui aurait, un peu, réconcilié les puristes avec ce genre de format informatique et ce d'autant plus que l'iPod permet de lire les fichiers AAC jusqu'à 320 Kbps


Et le partage ?
Vient bien entendu la question du partage des fichiers ainsi téléchargés. Une fois sur votre disque, ceux-ci portent le suffixe .m4p et peuvent être lus indépendamment par le Finder, iTunes bien entendu ou tout autre application utilisant le moteur QuickTime (iMovie, iPhoto, ...). Mais ces fichiers au format AAC sont codés et contiennent votre nom et email (pour voir à qui appartient le fichier, il suffit de demander à lire les informations du morceau dans iTunes). Comme Steve Jobs l'a dit, un morceau peut être partagé entre trois ordinateurs. Les autres machines que vous aurez choisies devront donc s'identifier avec votre nom d'utilisateur et mot de passe et pourront également télécharger (et forcément acheter) des morceaux. Il est donc possible de transférer (par mail, FTP ou tout autre moyen) sur les deux autres ordinateurs des fichiers que vous avez achetés avec ce compte partagé. Notons encore que ce format n'est, pour l'instant, pas reconnu par Windows.





Maintenant, si vous envoyez le fichier à une personne qui n'aurait pas l'autorisation de l'utiliser, celle-ci ne pourra strictement rien en faire, des messages lui demanderont de s'identifier ou lui rappelleront qu'il ne lui est pas possible d'utiliser le fichier, que ce soit dans le Finder, iTunes ou tout autre application. Il est bien entendu impossible de convertir la sélection en MP3 depuis iTunes. Par contre pour ceux qui aimeraient se graver un CD (rappelons qu'Apple n'est pas très restrictif à ce sujet puisque vous pouvez graver dix CD avant de devoir simplement changer l'ordre de votre liste pour pouvoir à nouveau graver dix CD...) puis le graver à nouveau au format MP3 ou AAC il n'y a aucun problème, une fois cette manipulation effectuée les fichiers perdent toute protection. Et les bidouilleurs ne vont certainement pas attendre longtemps avant d'essayer de comprendre et contourner le système de protection d'Apple.




Mais pourquoi j'arrêterais de pirater ma musique ?

De ce côté la question est surtout personnelle. Certains estiment que tout travail mérite salaire, d'autres ne paieront jamais un seul morceau et les autres attendront le bon moment : celui où la musique vaudra le prix qu'ils estiment juste. Apple tente de convaincre que pour 0.99 dollar cela ne vaut plus la peine de pirater de la musique. Si l'on compare le prix des disques, le dernier CD de U2 par exemple, celui-ci est vendu 9.99 $ sur le Music Store d'Apple alors qu'il coûte autour de 13 $ sur les magasins en ligne américains et autour de l'équivalent de 22 dollars pour un achat en France.





Mais l'intérêt du système réside certainement plus dans le fait de pouvoir télécharger uniquement les morceaux que l'on apprécie et ne plus devoir acheter un CD complet qui ne contient pas forcément (et c'est malheureusement de plus en plus le cas) des morceaux de qualité. Dans tous les cas, si vous avez la chance de pouvoir vous procurer un compte maintenant, cela sera nettement plus avantageux que d'acheter des albums en France notamment en raison de la différence de prix et de la force actuelle de l'Euro. Reste maintenant à savoir si, lors du lancement de son service dans nos contrées, Apple va pouvoir négocier avec les distributeurs un prix intéressant. Quoi qu'il en soit, la société a d'ores et déjà prévu d'ajouter la TVA à ses prix comme le montre l'image ci-dessous.


Par rapport à un système de Peer2Peer comme LimeWire et en mettant de côté les considérations éthiques, l'avantage du système d'Apple est clair, notamment grâce à la possibilité d'écouter un extrait de la chanson qui vous intéresse (37 secondes avec un extrait qui n'est pas le début de la chanson) sans rien avoir à télécharger sur votre disque. Le système de navigation et le moteur de recherche très performant qui permettent, en un clin d'oeil, de trouver ce que l'on désire (à condition bien entendu que le titre soit au catalogue) sont un avantage considérable. De plus, on est certain de télécharger un morceau de qualité, et ce, depuis un serveur distant qui permet un excellent taux de transfert. Finalement, on retrouve sur ces solutions de P2P de plus en plus de virus ou de faux morceaux envoyés par les maisons de disques pour contrer le piratage et ces dernières, dans leurs dernières actions vont même jusqu'à contacter directement les adeptes de ces systèmes pour leur dire qu'ils ne sont pas anonymes et risquent des amendes. Bref, dans ce cas, l'honnêteté paie.


Mais encore ?

Notons quelques "gadgets supplémentaires" dont la possibilité de visiter directement le site Web de certains artistes, de regarder des clips vidéo ou d'accéder à des morceaux exclusifs. De plus, pour chaque morceau que vous téléchargez, la couverture originale du CD (à la bonne taille) est incluse. Parmi les autres avantages on notera par exemple que, grâce au moteur de recherche, il est possible de dénicher l'interprétation d'une chanson par plusieurs artistes ou plusieurs interprétations d'un seul artiste qui permettra de choisir celle que l'on préfère et, grâce au système "telle personne a également acheté ce CD" vous découvrirez sans aucun doute quelques perles que vous n'auriez jamais trouvées en allant télécharger de la musique sur un système de P2P ou chez votre disquaire.




Pas que du positif
Notons toutefois une série de points négatifs qui dénotent surtout de l'âge de ce service. En effet, malgré 200 000 morceaux annoncés et les quelques exclusivités proposées, cela ne représente "que" 16 500 albums (à une moyenne de 12 morceaux par album). C'est une paille quand on sait que les marchands de musique en ligne proposent plusieurs centaines de milliers d'albums. On se heurte donc vite à la limitation du service (moi qui étais prêt à télécharger la collection complète des Rolling Stones).


Malgré quelques disques de Gainsbourg, le choix du catalogue a bien entendu été fait pour un public américain, mais on ne doute pas qu'Apple tentera de localiser au mieux son magasin


Notons encore que l'on se retrouve parfois dans situations assez ridicules notamment quand, pour certains albums, on trouve des morceaux ( souvent d'introduction ou de transition) qui font moins de 30 secondes et qui sont toujours vendus 99 cents. Et finalement, certains morceaux ne sont pas disponibles à la pièce ce qui force à acheter l'album entier, dommage pour un système dont justement l'intérêt repose sur l'avantage de pouvoir choisir ses morceaux indépendamment de l'album.




Et on regrette

Pour certains Apple innove, pour d'autres la société ne fait que suivre la tendance. Il faut l'avouer, malgré deux ou trois petits gadgets sympathiques comme la possibilité de consulter des clips vidéo, on regrette quelques fonctions qui auraient été bien pratiques. On pense notamment à la possibilité d'avoir les paroles pour chaque morceau, celle d'avoir dans iTunes la possibilité de créer les couvertures de CD (même si Apple propose la couverture, il n'est pas possible de l'imprimer ou l'exporter facilement puisqu'il faut passer par la demande d'information du morceau, choisir le bon onglet et finalement faire un copier-coller...). Faire cela aurait ajouté de la valeur ajoutée à ce service. Cela aurait également confirmé la réputation d'Apple, celle d'une société capable d'enchanter l'utilisateur par des petits plus que d'autres n'offrent pas toujours.




En conclusion

Si iTunes Music Store ne révolutionne pas la distribution de musique en ligne il est pourtant clair qu'il devrait favoriser le développement de ce segment de marché. Les talents de négociateur et le charisme de Steve Jobs ne sont pas étrangers au fait que les cinq majors ont accepté de signer avec Apple tout en profitant d'un marché, somme toute de petite taille, qui leur permet de tester en grandeur nature ce nouveau mode de distribution. Malgré une ergonomie excellente qui devrait contribuer à son succès, Apple ne peut pas se permettre de se reposer uniquement sur cette partie de son savoir-faire. L'avenir du Music Store dépendra grandement de l'élargissement de son catalogue, des prix pratiqués et sans aucun doute de son déploiement sur la plateforme Windows qui sera déterminant et permettra à Apple de lui faire atteindre une taille critique.

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