La pression monte encore d'un cran à l'approche de la sortie publique d'iOS 14.5, qui introduira un encadrement du pistage publicitaire. France Digitale, qui rassemble plus 1 800 start-ups et investisseurs du numérique français1, a porté plainte aujourd'hui contre Apple auprès de la CNIL. Selon l'association, les publicités personnalisées intégrées aux services Apple ne respectent pas la réglementation sur la protection des données personnelles, dont le RGPD.
France Digitale ne s'attaque pas ici au futur encadrement du suivi publicitaire d'iOS 14.5, mais aux publicités personnalisées présentes dans l'App Store, dans Apple News et dans l'app Bourse. Ces publicités personnalisées sont activées par défaut, ce que critique l'association.
« Il y a deux poids et deux mesures : nos start-up françaises respectent le droit des données personnelles et l’entreprise avec la première capitalisation boursière mondiale pourrait, elle, en survoler les principes les plus élémentaires ? », s’offusque Nicolas Brien, le directeur général de France Digitale, auprès du journal Le Monde. Bien qu'il soit possible de désactiver les publicités personnalisées au sein des apps Apple, le lobby estime qu'il y a une distorsion de concurrence.
« Les allégations de la plainte sont notoirement fausses et constituent une piètre tentative par ceux qui tracent les utilisateurs de détourner l’attention et de tromper les régulateurs », a réagi vivement Apple. La Pomme assure respecter la loi en ne ciblant pas des utilisateurs individuels mais des « segments » d'au moins 5 000 utilisateurs et en limitant la quantité d’informations collectées.
Selon elle, cette plainte est une stratégie pour mettre à mal la mise en place très prochaine sur iOS de l'encadrement du suivi publicitaire (App Tracking Transparency), une mesure très décriée par les acteurs du secteur, Facebook en tête. À partir d'iOS 14.5, les éditeurs voulant suivre l'activité des utilisateurs à travers les apps à des fins publicitaires devront obtenir leur accord par le biais d'une notification. Seul moyen pour les éditeurs d'éviter cette demande d'autorisation : adopter le framework SKAdNetwork proposé par Apple, qui remonte moins d'infos personnelles.
Quatre acteurs de la publicité (l’Union des entreprises de conseil et d’achat média, l’IAB, la Mobile Marketing Association et le Syndicat des régies Internet) ont déjà porté plainte, auprès de l'Autorité de la concurrence, contre l'App Tracking Transparency. « Apple se crée un avantage sur le marché publicitaire en ajoutant des contraintes aux autres », estime Nicolas Rieul, président de l’IAB France.
De son côté, Apple affirme que ses applications suivent comme les autres les règles de l'encadrement du suivi publicitaire. Toujours est-il que c'est elle qui fixe toutes les règles du jeu, ce que récuse au fond France Digitale, qui a rejoint le mois dernier la Coalition for App Fairness, cette alliance portée notamment par Spotify et Epic qui réclame des réformes profondes dans la gestion des plateformes mobiles, et d'iOS en particulier.
Mise à jour à 14 h 41 : Dans une interview accordée à L'Usine Nouvelle, Nicolas Brien confirme que cette plainte est une façon « d'amener [Apple] à la table de négociations » concernant l'App Tracking Transparency et les relations avec les éditeurs de manière plus générale. « Nous n’avons pas trouvé qu’Apple avait une envie folle de dialoguer, de négocier. […] Cette action aujourd’hui est un premier signal que nous leur adressons. C’est la première d’une série d’actions légales que nous mènerons à l’avenir, avec pour seul objectif de rééquilibrer les relations entre Apple et les start-up françaises », déclare-t-il.
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BlaBlaCar, Doctolib, Back Market, Netatmo, Devialet, Meetic, Treezor… ↩︎