Editeurs : l'abandon de Flash ne va pas de soi

Anthony Nelzin-Santos |
Début février, Steve Jobs a fait la tournée des éditeurs new-yorkais, s'arrêtant notamment au Wall Street Journal, où il ne s'était pas gêné pour critiquer Flash, affirmant au passage que l'abandon de Flash par les quotidiens en ligne était « aisé ». Ce n'est pourtant pas le sentiment de plusieurs éditeurs de journaux aux moyens limités.

Un responsable anonyme du site d'un journal américain d'importance moyenne confie ainsi que la transition de Flash à d'autres technologies, notamment la paire HTML5 et JavaScript, ne va pas de soi : « l'utilisation de Flash pour des contenus interactifs est incontournable […] [ce n'est pas uniquement le cas] des diaporamas, mais aussi des présentations interactives et des graphiques, qui peuvent être incorporés facilement et rapidement à nos articles. »

À cette flexibilité de la technologie se combine la connaissance de l'outil : « Oh, bien sûr, nous pourrions utiliser JavaScript : mais devinez quoi, nous n'avons pas plusieurs cracks du code dans notre salle de rédaction. Mais nous avons quelques bons créatifs qui ont appris suffisamment Flash et Actionscript pour être très efficaces ».

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Un diaporama avec fichier audio inclus en Flash sur le site du Monde


C'est bien un problème de formation et de moyens qui se pose pour ses journaux aux rédactions réduites : alors que Flash permet à des créatifs de développer des animations assez poussées avec un minimum de code, le couple HTML5+Javascript nécessite de s'offrir les services de personnes plus techniques, ou de former les équipes déjà en place, qui n'en ont ni forcément l'envie, ni forcément les capacités.

Comme l'explique Thomas Amabisca, un consultant pour le Wall Street Journal et d'autres publications de News Corp., « Les fournisseurs de contenus ont besoin d'outils qui leur permettent de se concentrer sur le contenu sans avoir à embaucher des consultants […] mais ces outils n'existent pas encore [pour le HTML5] ».

Un designer interactif free-lance en remet une couche : « Steve ne se rend pas compte que le Web est un bric-à-brac d'échafaudages montés par des gens inexpérimentés et de fatras expérimental assemblé à la dernière minute pour répondre aux demandes des clients ».

On cite là encore les moyens, avec une pointe d'ironie teintée d'amertume : « tout le monde n'a pas une équipe d'experts travaillant à plein temps pour satisfaire à la perfection que veulent offrir les ingénieurs de M. Mac ».

Et c'est toujours l'environnement intégré de Flash, convenant à la fois aux créatifs et aux codeurs, qui est mis en avant comme nœud du problème : « Steve n'offre pas de solution [aux personnes orientées vers la création qui aiment simplement Flash pour sa simplicité et son intégration]. Où est mon outil de développement HTML5 ? »

Un comble, lorsque l'on connaît l'amour d'Apple pour le mot « intégration » et la logique de plateforme. De tous ces témoignages, on retient donc qu'il manque un outil de développement facile à prendre en main, une sorte de Flash Builder pour HTML5 et JavaScript. Et si le prochain logiciel d'Apple, c'était un iWeb Pro orienté vers la création d'applications riches en HTML5 et JavaScript ? (lire Apple prête à concurrencer Flash et Photoshop ?).

Sur la question du problème que peut poser l'absence de Flash avec l'iPad où les exigences en matière de consultation de sites seront plus fortes que sur l'iPhone, lire également l'interview de Thomas Sarlandie, directeur technique de Backelite, pourvoyeur de grosses applications sur l'App Store : "On va créer de nouvelles expériences avec l'iPad".

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avatar Goldevil | 
Bonjour à tous. Je suis chef de projet IT dans le domaine des technologies Internet depuis un peu plus de 10 ans et je tiens à faire certaines remarques. L'utilisation de Flash pour les videos est anecdotique. Si Youtube et Dailymotion se débarrassent de Flash du jour au lendemain, cela ne va pas signer l'arrêt de mort de la technologie. Flex/flash est énormément utilisé dans le monde professionnel et bien souvent pour des applications que vous ne verrez jamais car ils s'agit d'appli sur mesure pour une utilisation interne à l'entreprise. Dans nos développements nous utilisons un peu HTML/Javascript et beaucoup Flash, plus précisément Flex. Silverlight et JavaFx sont hors jeu à cause (trop propriétaire et trop immatures) Javascript et Actionscript sont très proches (tous les deux des version de ECMAScript). Il est donc facile pour un développeur d'appréhender la syntaxe en passant de l'un à l'autre. Mais la syntaxe n'est que la partie la plus courte de l'apprentissage. Le plus important c'est le framework (librairies, méthodologie de programmation...). A notre époque, si l'on désire afficher un menu déroulant, on utilise une librairie qui le fait. Vous vous contentez d'appeler les fonctions à partir de votre code. Dans ce domaine, en Javascript, on a beaucoup de librairies dont certaines très riches. Mais il y en a beaucoups, très différentes, basées sur des concepts différents, de qualité et fiabilité variables. Même si la situation a évolué favorablement ces dernières années on a parfois des différences de fonctionnement selon le browser. Par contre en Flex/Flash, vous avez directement un ensemble de librairies très riches, très fiables, très bien documentées et très cohérentes. Pour comparer les deux écosystèmes, Javascript c'est un peu Linux (un joyeux chaos) et Flash c'est plutôt le Mac (c'est clean et ça marche).
avatar Goldevil | 
Flash est sous certains aspects beaucoup plus performants que HTML/Javascript. Flash supporte de le protocole AMF3 et la communication avec le serveur est considérablement accélérée. Je ne parle pas de 40 ou 50% de gains. Je parle de 4 à 5 fois plus vite ! Mon test favoris d'un framework graphique c'est le test de vitesse de datagrid. Il s'agit du tableau de données, genre tableaux Excel, liste d'email,... Comme c'est un des composants les plus communs et donc très utilisé. Il s'agit d'une bonne cible. Je n'ai rien vu de probants en Javascript quand on parle de plus de 2000 lignes. Nous utilisons des datagrids en Flex avec parfois 20000 lignes. Et cela marche vite. J'aime beaucoup le concept de l'iPad et je compte en acheter un. Mais cela me fait râler que je ne puisse pas développer la même application qui tournerait sur iPad et sur mon Mac. Et pourtant Adobe Air aurait été LA solution idéale de développement pour iPad. Une dernière chose. Flash est un format public. Le SDK Flex est gratuit. Cela coute donc moins cher de développer pour Flex/Flash/Air que pour iPad. Etonnant non ? Enfin un toute dernière chose. C'est sur les forum Mac que je vois autant de discussions animées à propos des lenteurs de Flash. Prenons le problème par l'autre bout. A tous les développeurs un peu expérimentés qui lisent ce message, je leur propose d'écrire un plugin graphique pour navigateur web. Un truc tout con genre une animation fractale mais qui demande des ressources de calcul. - Faites en une version pour Safari ou Firefox sous Mac. - Faites en une version pour IE ou Firefox sous Windows. Peut-être qu'après vous serez plus indulgent envers les équipes d'Adobe.
avatar elamapi | 
Serieusement, à part les videos et les jeux, ça sert a quoi le flash ???
avatar pitav | 
@ elmapi et d'autres Loin de moi l'idée que flash serait La panacée dénuée de défaut... Mais soyons un peu sérieux. Je constate, une énorme méconnaissance, plus basé sur la rumeur que la connaissance du sujet, voir une grosse incompétence pour certains. Alors à quoi sert flash à part les vidéo ou les jeux ? Et bien déjà rien que là, ça représente un très, très gros pourcentage des jeux et vidéos sur le net ! Ça doit bien signifié quelque chose, non ? Ça sert aussi à faire des applications professionnelles en flash ou flex pour le net, mais aussi stand alone grâce à air... bref a peu près tout ce que tu veux ! Flash rame ? C'est vrai dans une certaine mesure (la sortie du player 10.1 devrait calmer les commentaires). Mais c'est surtout du à ces putains de sites infestés de bannières publicitaire et aussi il faut bien le dire aux développeurs du dimanche qui ne font pas correctement leur boulot. Par exemple, qui ne désactivement leur gestionnaires, leur tweens quand ils change de frame ect. Utiliser correctement, Flash est une bonne techno... n'en déplaise à SJ dont j'achète les produits depuis... ha oui quand même :-)
avatar gigi | 
Demandez a ses mêmes petit journaux si ses Designer son passé de quarkxpress a indesign? Pourtant le même problème de contrainte de production et de connaissance se posait et de nos jours une grande majorité on fait le switch sur indesign il y a un peu de paresse la, mais vite ils se rendront compte qu'il n'ont plus le choix
avatar jeminiijey | 
Je ne souhaite pas alimenter le débat "HTML5 vs. Flash" car il y a plein de choses à dire, les 2 sont intéressants et il est vrai qu'ils ne visent pas tout à fait le même public. Cependant, pour rebondir sur la phrase "Où est mon outil de développement HTML5 ?", j'ai envie de mentionner Adobe qui, lorsqu'ils ont racheté Macromedia, ont fait l'acquisition de Dreamweaver en même temps que Flash ; et il me semble que le 1er est un éditeur HTML bien foutu et relativement accessible pour des non développeurs. Il suffit donc de s'assurer que la dernière version soit compatible HTML5, non ?
avatar françois bayrou | 
@jeminiijey Dreamweaver permet de faire du html5, oui, mais il n'a pas l'ergonomie de l'éditeur flash. Pour que les utilisateurs de flash se passent de flash, il faudrait un éditeur "wysiwig" : si je veux faire un diagramme en camembert, j'ouvre la liste des components, je clique sur "pie component", je le fais glisser sur la scène, je le redimensionne, clic droit, je change la liste des couleurs, la police de caractère, je rentre mes données, je décoche la case "zoomer au clic", rajoute des liens, etc. etc. Je suis persuadé que le jour ou on aura un tel soft, ben les animes en javascript vont déferler, avec des diaporamas, des players vidéos et des diagrammes qui pèsent 300k et prennent 100% du CPU, et feront planter les navigateurs, malgré tous les gardes fous et sandbox mis en place. Pour info, je bosse actuellement sur un player vidéo en flash ( je suis flasheur ) qui doit remplacer un ancien player, fait par un non flasheur, à base de components. le sien pesait 400k et prenait 110% de CPU. Le mien, codé "à la main", avec les mêmes fonctionnalités, pèse 17Ko et prends 40% de CPU sur mon macbook pro pre unibody, 2.2Ghz. Bref, tout ca pour dire que quand tout ce petit monde se sera mis à javascript, beaucoup vont regretter flash ! ( et en attendant je me mets à Cappuccino ^^)
avatar makidoko | 
Un Vrai Type, Avant de décider de se débarrasser d'IE6, on a proposé Firefox, Opéra, Chrome, et les versions successives d'IE. Avant de se débarrasser des disquettes 5"1/4 on a proposé les 3 pouces, puis les CD-ROM, les clés USB etc.. Avant de se débarrasser de Flash, Apple a décidé que les autres n'auront qu'a s'adapter à sa politique. Il n'attendront pas que la moindre alternative soit mûre (spécifications, implémentations, formation, déploiement d'échelle) . Bref, une sorte de vision vintage du futur.. du steam-punk, où les machines à vapeur voyagent dans l'espace. Heureusement que les exemples que tu fournis n'ont pas fonctionné sur le même principe, sinon y'aurait eu de sacrées périodes de creux entre une techno et son successeur.
avatar noAr | 
@ Alex56 Je compte plus les exemples d'incompétence créative des développeurs. Chacun son job.
avatar Liam128 | 
@jeminijey : Il y a une différence entre "être compatible HTML5" (tu peux faire un site compatible HTML5 au design digne des sites de 1995) et "tirer partie des nouvelles technologies du HTML5 pour permettre de faire tout ce que pouvait faire Flash, aussi simplement qu'avec Flash, et avec une vitesse d'exécution semblable à Flash ou meilleure". A l'heure actuelle, on peut faire du HTML5 mais il n'y a rien qui permette de faire du contenu riche et super zouli de manière un tantinet simple, ça s'affiche pas pareil sur tous les navigateurs (et pas du tout sous IE), et sur les meilleurs des meilleurs navigateurs, ben le résultat rame quand même énormément.
avatar Pihrra | 
@Liam128 Le problème c'est qu'a toujours vouloir maintenir la compatibilité avec du vieux matériel et des vielles technologies on n'avance pas ! De temps en temps il faut que quelqu'un vienne secouer la ruche pour faire bouger les abeilles. On peut critiquer le fait qu'Apple pousse régulièrement à changer de matériel, mais honnêtement quand je vois un ami galérer avec son vieux PC de 8 ans sous XP, je me dis que je suis bien content de ne pas en être resté là. Ce qu'Apple fait avec Flash et le HTML 5 c'est pareil et pour le bien du plus grand monde ! Oui il faudra s'adapter, oui ça ne va pas être de tout repos, mais franchement, je crois qu'on a tous à y gagner. Je comprend bien que pour certain usage Flash à ses avantages, il faut être aveugle pour le nier mais honnêtement combien utilisent Flash à bon escient ? Certains utilisent ClickToFlash, moi je désactive simplement Flash. Il est tellement rare que je trouve un contenu suffisamment intéressant pour me donner envie de l'activer que c'est encore plus simple comme ça. Oui en entreprise on utilise souvent des outils que le commun des mortels ne verra jamais (dont certains en Flash), mais quand je vois avec quoi travaillent certaines entreprises aujourd'hui ça me fait vraiment peur !
avatar Un Vrai Type | 
@ makidoko : 1) Tu devais tenir le même discours en 1998 quand l'iMac n'avait plus de disquette... 2) Je le REDIS : Apple n'abandonne pas Flash. Apple ne le met pas sur des appareils mobiles. La nuance est de taille, Flash continuera sa route sur les macs de bureau. QUand aux alternatives, elles existent bien sur de petits écrans et des machine dont l'autonomie est importante : Javascript+xHTML/HTML5, Application native dédiée. "Avant de se débarrasser de Flash, Apple a décidé que les autres n'auront qu'a s'adapter à sa politique." Quand je parlais de veille technologique... On y est. En 1998, on a vendu des imprimante pour iMac avec des drivers sur une disquette...
avatar makidoko | 
Oui, ce dont je me souviens de cette époque glorieuse dont tu parle, c'est que dans le service client que nous gérions à cette époque, nous n'adoptions pas la vision toute particulière de l'informatique d'Apple et notamment de l'interopérabilité, en renvoyant systématiquement nos clients chez leur revendeur ou d'utiliser nos produits soit sous Windows, soit, au pire, sous Linux, mais jamais sous MacOS. Ce qui était drôle c'était l'exaspération de nos clients Macistes touts satisfait de s'être fait vendre par Apple le dernier ordinateur à la mode mais de se faire refouler à toutes les portes pour le support logiciel de leur plateforme, le prix mis dans l'appareil leur donnant une sorte de supériorité sur le reste du monde qui n'était pas en phase avec la réalité du marché (solutions de développement trop couteuses en licences, formation, et ressources humaines par rapport à la part de marché concrète).

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