Bruxelles poursuit son enquête sur Apple et l'Irlande

Florian Innocente |

La Commission européenne a publié ses observations préliminaires dans son enquête sur la fiscalité d'Apple en Irlande. Bruxelles en a notifié les parties et leur a demandé un complément d'informations avant de poursuivre ses investigations et rendre ses conclusions [PDF]. Si les anomalies sont avérées, Apple risque de devoir payer plusieurs milliards d'euros au titre d'impôts non payés.

Comme le souligne Tim Wostall chez Forbes, dans ce type de dossiers, une entreprise ne paie pas d'amende à Bruxelles en sus de la somme dont elle est contrainte de s'acquitter. Elle régularise sa situation fiscale auprès du gouvernement concerné.

On n'en est toutefois pas encore là, il faut déjà que la Commission, à la lueur de tous les éléments en sa possession, achève son enquête et en tire ses conclusions. Pour l'heure, Bruxelles exprime ses « doutes sur l'adéquation entre ce qu'elle estime correspondre à des aides d'État perçues par Apple et les règles qui définissent leur attribution.

De telles aides ne peuvent pas être considérées comme compatibles avec le marché intérieur dans le sens où elles ne facilitent pas certaines activités ou régions économiques, pas plus que les incitations en question ne sont limitées dans le temps, dégressives ou proportionnelles à ce qui est nécessaire pour remédier à un handicap économique spécifique aux secteurs concernés.

L'enquête n'a pas permis pour le moment de déterminer que ces réductions d'impôts avaient été consenties pour palier à des contraintes économiques rendant plus difficile l'activité d'Apple, pour aider à la création d'emplois ou encore pour le développement de projets d'intérêt intracommunautaire.

Autre sujet, Apple comme d'autres groupes minore ses bénéfices dans les pays fortement taxés au profit de ceux où les impôts sont plus modérés, ce que l'on appelle les transferts de prix.

Les prix de transfert sont les prix facturés pour des transactions commerciales entre différentes entités d’un même groupe, en particulier les prix fixés pour des biens vendus ou des services fournis par une filiale d’un groupe d’entreprises à une autre filiale du même groupe. Les prix de transfert influencent la répartition du bénéfice imposable entre les filiales d’un groupe établies dans différents pays.

C'est également un point sur lequel se sont penchés les enquêteurs :

Si les autorités fiscales, au moment d’accepter le calcul de l’assiette d’imposition proposée par une entreprise, insistent sur la nécessité de rémunérer une filiale ou une succursale aux conditions du marché, en tenant compte des conditions normales de concurrence, cela permettrait d'exclure la présence d’une aide d’État. En revanche, si le calcul n'est pas basé sur une rémunération aux conditions du marché, il est possible que l'entreprise concernée bénéficie d'un traitement plus favorable que celui qui serait normalement réservé à d'autres contribuables en vertu des règles fiscales des États membres concernés, ce qui peut être constitutif d’une aide d’État.

Si ces calculs d'imposition ont été réalisés sur des coûts établis de manière artificielle, la Commission trouvera alors à y redire.

Ces avantages fiscaux ont été également accordés et jamais réajustés pendant une durée anormalement longue (de 1991 à 2007) par rapport à ce qui prévaut en général et alors que les résultats d'Apple augmentaient constamment. En outre ils ont pu être accordé de manière sélective, c'est à dire au seul bénéfice d'Apple et aux dépens d'autres entreprises.

La litanie des observations de la Commission se conclut donc l'expression de « doutes » et sur une demande de données comptables supplémentaires au gouvernement irlandais qui a un mois pour répondre. Apple pour sa part a fait une déclaration dans laquelle elle réfute à nouveau tout traitement de faveur en Irlande (elle emploie 4 000 personnes à Cork) et en appelle à la « profonde nécessité de réformer le code des impôts sur les sociétés ».

Notre succès en Europe et dans le monde est le résultat du travail acharné et de l'innovation de nos employés, et non pas des arrangements particuliers avec le gouvernement. Apple n'a reçu aucun traitement de faveur de la part de fonctionnaires irlandais au fil des ans. Nous sommes soumis aux mêmes lois fiscales que les nombreuses autres entreprises qui travaillent en Irlande. Depuis l'iPhone Lancé en 2007, nos paiements d'impôts en Irlande et dans le monde ont décuplé.
avatar Claude Pelletier | 

Le traitement de ces affaires de concurrence déloyales bien compliquées prendra de longues années malheureusement. Elles révèleront peut-être plusieurs strates de pratiques déloyales. Qu'est-ce qui sera mis en cause à la fin ?

Peut-être la forte disparité des politiques fiscales d'États qui refusent une mutualisation de leurs fiscalités, une homogénéisation ce qui permet aux grandes entreprises internationales de faire jouer la concurrence entre ces États et de favoriser le moins-disant fiscal ?

Peut-être, seulement des anomalies dues à des aides d'État accordées de façon illégitime ? Des aides d'État qui témoigneraient du chantage économique exercé par une multinationale sur un État faible ? Voire d'un état de corruption des services concernés ?

Peut-être les deux approches seraient validées et l'on assisterait à un progrès notable des Européens. Les États se mettraient enfin d'accord pour s'accorder sur le plan fiscal et mutualiseraient plus de compétences qu'aujourd'hui. On peut toujours rêver.

avatar popeye1 | 

@Claude Pelletier

Et oui l'espoir fait vivre, mais faudrait pas que ça dure encore trop longtemps. Les milliards dégagés ainsi malhonnêtement par les grandes multinationales mettent certains pays dans des situations financières risquées. C'est du vol pur et simple pratiqué par de faux philanthropes.

avatar Neurotron | 

« pour palier à des contraintes » Roooo… double faute !
Zavez pas Antidote à la rédac' ???

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