Doucement mais sûrement, l'AV1 est en train de faire son trou dans l'industrie. Ce codec vidéo open source est adopté par de plus en plus de services de streaming et les fabricants de puces enchaînent les annonces à son sujet. Et chez Apple, où en est le support de l'AV1 ? En apparence, nulle part, mais quand on prend une loupe, on observe des germes.
Sans faire un cours magistral sur l'AV1, plaçons tout de même les bases. Il s'agit d'un codec vidéo open source dont le développement a commencé en 2015 et qui a été finalisé en 2018. Il est chapeauté par l'Alliance for Open Media (AOMedia) et a été pensé avec trois objectifs principaux. Le premier, le plus important, c'est qu'il ne nécessite pas de royalties. C'est en effet un des soucis d'autres codecs très utilisés comme le HEVC/H.265 : ils exigent une licence, dont le prix est parfois élevé. Vous ne voyez pas forcément sa présence1 parce que quelqu'un la paye généralement pour vous (Apple, par exemple), mais elle existe bel et bien.
Deuxièmement, le codec a été pensé pour être plus efficace que ses prédécesseurs. Et troisièmement, c'est lié, il visait une prise en charge de l'état de l'art. Les résultats varient selon les études, mais l'ordre de grandeur demeure à peu près le même : l'AV1 est entre 15 et 30 % plus efficace que les codecs concurrents, essentiellement le VP9 de Google et le HEVC. De façon concrète, le débit est donc plus faible pour une qualité perçue identique, ce qui est un avantage évident pour les sociétés qui diffusent en streaming. L'AV1 permet de gérer des définitions très élevées, avec la possibilité de prendre en charge la 8K (7 680 x 4 320) à 120 Hz.
Actuellement, l'AV1 est employé dans l'industrie de manière assez importante, même s'il n'est pas généralisé. Netflix et YouTube, notamment, encodent leurs vidéos en AV1 pour proposer des flux 8K (chez YouTube) ou pour réduire la bande passante nécessaire pour les appareils mobiles. Ce point peut sembler contre-intuitif compte tenu des possibilités de l'AV1, mais il est par exemple déployé pour les très basses définitions, afin de diminuer la quantité de données transmises aux utilisateurs des pays en voie de développement, dans lesquels les offres cellulaires sont limitées en débit et en capacité.
Apple et l'AV1
Nous en arrivons à Apple et à sa prise en charge de l'AV1. Sur ce point, c'est assez simple : les vidéos encodées en AV1 ne sont pas gérées par ses systèmes. macOS, iPadOS, tvOS et iOS ne lisent pas nativement l'AV1. Il faut donc obligatoirement passer par des logiciels qui intègrent un décodeur logiciel pour en profiter. Bien évidemment, c'est lié, les systèmes sur puce Apple (tant les puces Ax et que les puces Mx) ne décodent pas matériellement l'AV1. Ce n'est pas gravé dans le marbre, nous le verrons après, mais c'est le constat qu'il faut faire en mai 2023.
Et nous le verrons dans la suite, c'est un gros problème pour l'écosystème Apple. Même si en théorie un décodage logiciel peut suffire, le décodage matériel a l'avantage d'utiliser moins d'énergie et donc de permettre une meilleure autonomie. L'autre souci, c'est que même s'il est possible d'employer un décodeur logiciel, l'expérience n'est pas la même : les applications de streaming se reposent sur l'OS et ce qu'il propose. Dans les faits, des sociétés comme Netflix ne s'embarrassent pas à intégrer des composants tiers : si l'OS ne le propose pas, le codec n'est pas utilisé. Le résultat est donc évident : si Apple ne fait rien, les utilisateurs d'iPhone, d'iPad ou de Mac ne peuvent pas profiter des avantages de l'AV1.