Incroyable, mais vrai : RagTime n’est pas mort

Nicolas Furno |

RagTime est un nom qui ne devrait pas dire grand-chose à une grande partie d’entre vous, alors sachez que c’est un vétéran de la mise en page sur le Mac. La première version de cet outil de publication assistée par ordinateur (PAO) est sortie en 1986, deux ans seulement après le tout premier Macintosh. L’app conçue en Allemagne a connu son heure de gloire, surtout en Europe, dans les années 1990 avant de disparaître un petit peu des radars à partir de la décennie suivante. Ce qui ne veut pas dire qu’elle est morte, la preuve : ses créateurs ont annoncé cette semaine la sortie d’une septième version.

RagTime 6 était sortie en 2006 pour les Mac PowerPC exclusivement et la version 6.5 — présentée à l’Apple Expo 2008 pour ceux qui s’en souviennent… — qui apportait la compatibilité avec les Mac Intel était sortie deux ans plus tard. Une quinzaine d’années plus tard, l’app se met à l’heure Apple Silicon, même si elle reste naturellement compatible avec les Mac Intel. RagTime 7 s’adapte aux dernières versions de macOS et même si l’éditeur ne mentionne pas Sonoma actuellement en bêta, elle semble correctement fonctionner avec. Au passage, l’app est signée par Apple, une exigence de plus en plus forte ces dernières années.

RagTime 7 ne cède pas à la mode de la fenêtre unique et reste sur une interface (délicieusement ?) rétro, mais qui fonctionne malgré tout parfaitement sur macOS Sonoma, y compris avec Stage Manager.

Les autres nouveautés évoquent autant d’autres monstres du passé comme AppleScript que des fonctionnalités (un petit peu) plus récentes, comme la possibilité d’importer des photos directement depuis un iPhone relié au Mac en USB. La création de PDF, finalité classique d’une telle app, est aussi en progrès avec la possibilité de choisir un niveau de compression différent. Il y a assez peu de nouveautés et l’interface reste dans l’esprit des années 2000, avec plusieurs palettes et une grande barre d’outils qui occupe toute la largeur sous la barre des menus. Un conservatisme qui devrait rassurer les derniers utilisateurs de RagTime, d’autant que le format de fichiers n’a pas changé avec la mise à jour.

Aucun changement également sur le modèle économique, il n’est pas question de céder aux sirènes de l’abonnement. RagTime 7 est toujours vendu sous la forme d’une licence finale, facturée 1 474 € HT avec un prix de lancement à 1 099 € HT pour un seul utilisateur. Des tarifs dégressifs sont prévus pour les entreprises et la transition depuis RagTime 6 coûte 739 € HT (promotion à 599 € HT) en licence individuelle. En France, RagTime est distribué par InfoGraphix et vous retrouverez la grille de tarifs à cette adresse. Une version de démonstration, fonctionnelle pendant 30 jours, est proposée.

RagTime 7 est traduit en français et l’app nécessite macOS 10.12 au minimum. La version Windows n’est pas encore disponible, mais cela viendra dans un deuxième temps.

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avatar switch | 

En effet, Postscript n'a pas de limite théorique de précision, et dans la pratique les applications utilisent bien le point, ce qui leur permet de proposer une précision de l'ordre du dixième de millimètre. Que l'on soit en 1986 ou en 2023, ce "point" là n'a pas changé, car les "standards" ont une inertie considérable.
En pratique, une précision du dixième de millimètre est bien suffisante, surtout pour ne pas trop ralentir l'affichage écran et aussi car (en bureautique avancée) les périphériques de sortie dépassent rarement les 1200 dpi (les 2400 dpi sont souvent émulés).
Il existe bien des imprimantes qui dépassent allègrement les 2400 dpi, mais ce sont des domaines ultra-spécialisés (architecture, cartographie, textile, photo) qui ne sont probablement pas le cœur de cible d'applications comme RagTime.
En se limitant volontairement au dixième de millimètre, le niveau de zoom de 1000 % de RagTime se montre tout à fait suffisant.
Bref…des choix techniques de circonstances et finalement très pragmatiques.

avatar BeePotato | 

@ switch : « dans la pratique les applications utilisent bien le point, ce qui leur permet de proposer une précision de l'ordre du dixième de millimètre. »

Euh… non.
Le point est juste l’unité utilisée en PostScript, mais il ne représente nullement la limite de précision des applications, car comme je l’ai écrit au-dessus elles n’utilisent pas des valeurs entières pour représenter des coordonnées, mais des nombres à virgule. C’est pour ça qu’elle permettent toutes depuis longtemps d’être plus précis que le dixième de millimètre.

« Que l'on soit en 1986 ou en 2023, ce "point" là n'a pas changé, car les "standards" ont une inertie considérable. »

Ce n’est pas une question d’inertie : c’est une unité de longueur, qui n’a pas de raison de changer. Sa définition n’a jamais empêché d’utiliser des dixièmes, centièmes ou millièmes de point.

« En pratique, une précision du dixième de millimètre est bien suffisante, surtout pour ne pas trop ralentir l'affichage écran et aussi car (en bureautique avancée) les périphériques de sortie dépassent rarement les 1200 dpi (les 2400 dpi sont souvent émulés). »

🤣
1200 ppp, ça fait une précision de l’ordre du millième de millimètre.
Et l’affichage sur l’écran retina d’un Mac, c’est avec une précision de l’ordre du centième de millimètre.

Chacun peut bien sûr se dire qu’une précision au dixième de millimètre est tout à fait suffisante pour les travaux qu’il a à faire, mais ça n’a rien à voir avec les raisons avancées ci-dessus.

« Bref…des choix techniques de circonstances et finalement très pragmatiques. »

Et forcément les bons choix et forcément meilleurs que ceux qui ont été faits dans d’autres applications, oui, j’ai compris. 😉 😁

avatar switch | 

On dit la même chose: lors de la sortie de PostScript les écrans avaient une définition de 72 dpi (très proche du point didot (pica)) et le "point" PostScript s'est calé dessus pour faciliter l'affichage à l'écran, mais en effet cela n'a jamais empêché l'utilisation et surtout l'impression de tailles en fractions de point, si tant est que l'application le propose.
En 2023 la plupart des applications proposent les tailles des polices en points, bien que peu de personnes sachent exactement à quoi correspond ce point.
Certes les impressions de 1200 dpi et plus et les écrans rétina sont entre le centième et le millième de millimètre, mais en pratique de PAO et bureautique avancée, une précision du dixième de millimètre pour les tailles des objets et des polices est bien suffisante.
J'avais imprimé des grilles de lignes à 1200 dpi avec les épaisseurs permises par RagTime 6 et les lignes les plus fines n'étaient pas visibles à l'œil nu (j'avais à l'époque une acuité visuelle supérieure à 10/10, ce qui n'est hélas n'est plus le cas aujourd'hui) tant le point laser est minuscule à cette définition (comme avec les écrans rétina).
Dans d'autres domaines (industrie de haute précision et architecture par exemple) il est clairement indispensable de pouvoir créer et imprimer des objets avec une précision supérieure au dixième de millimètre.

avatar BeePotato | 

@ switch : « On dit la même chose »

Pas tout à fait, mais on passera. 🙂

« Certes les impressions de 1200 dpi et plus et les écrans rétina sont entre le centième et le millième de millimètre, mais en pratique de PAO et bureautique avancée, une précision du dixième de millimètre pour les tailles des objets et des polices est bien suffisante. »

Tout à fait d’accord qu’en bureautique un niveau de précision plus élevé que ça n’est généralement pas utile. C’était juste risible de voir la résolution des imprimantes ou les performances d’affichage sur des écrans de résolution bien plus élevée que ça, comme tentative de justification de cette limite de précision.

Mais bon, ça confirme surtout ma remarque initiale : ce niveau de précision n’a plus rien d’exceptionnel depuis longtemps, tout comme l’usage de PostScript, et si ces deux points constituaient des avantages de RagTime lors de sa sortie ce n’est plus le cas aujourd’hui.
Heureusement, il lui reste d’autres fonctions réellement intéressantes, comme toi et d’autres l’avez déjà évoqué.

avatar PhilR | 

Excellent programme que j'ai utilisé pendant plus de 20 ans. Mais le tarif éducation a disparu (≈100€)…
Je peux revoir et adapter d'anciens documents grâce à VMware Fusion qui me permet d'utiliser un ancien système de MacOS avec lequel mon Ragtime 5.6 marche encore.

avatar Gwynpl@ine | 

@PhilR

Si tu demandes aux développeurs par e-mail, tu as moyen d’avoir une version éducation je pense.

avatar nickyrabbit | 

J’ai connu dès les premières versions. Est-ce que ça me donne une réduction Sénior 👴 au Club iGen ? 🤣

avatar Mac1978 | 

Ça ne nous rajeunit pas…
J’ai connu un imprimeur qui a gardé un Mac PPC durant presque 20 ans (G3 Blue) juste pour utiliser Ragtime. Je me demande ce qu’il est devenu

avatar gaurejac | 

@Marc1978 : qui ça, l'imprimeur, le G3 bleu ou Ragtime ?

avatar Mac1978 | 

@gaurejac

L’imprimeur. Il a fermé en plein Covid, et ça faisait longtemps que je n’étais plus passée à l’imprimerie. Je sais que son G3 avait fini par rendre l’âme et je ne sais pas s’il avait continué sur RagTime. Mais je pense que oui car c’était un obsédé de la précision.

avatar petergab64 | 

Je lis "logiciel allemand", il me semble bien que quand Jean-Louis GASSÉ a présenté ce logiciel à une Apple Expo, il avait précisé (et fait venir sur le plateau) deux développeurs autrichiens et non allemands...

avatar iPop | 

@petergab64

« Oui oui, je connais cette théorie »

avatar petergab64 | 

Ce n'est pas une théorie, j'étais à la conférence de JL Gassée, et nous utilisions déjà Ragtime depuis sa version 1.1. Nous avons même été les premiers à le diffuser sur le Sud-Ouest. Turboméca avait particulièrement apprécié ce logiciel.

avatar GaspardNic92 | 

Pour les plus anciens, est-ce que le nom de Calamus vous dit quelque chose ?
Initialement sur Atari ST, il a été porté en tant que iCalamus sur Mac ….

C’était un logiciel de mise, en page, très puissant, assez révolutionnaire pour l’époque en 89 …

avatar iPop | 

@GaspardNic92

Il y aussi Scribus

avatar Madalvée | 

J'ai utilisé la version Ragtime Solo qui était gratuite au milieu des années 2000 et j'en ai de très bons souvenirs. Si ça se trouve je vais lourder Office et QuarkXpress pour passer à cette version.
C'est un intégré, une catégorie de logiciels qui a malheureusement totalement disparu. On préfère maintenant faire une application par tâche (en location), avec chacune une version pour ordi, téléphone, tablette, montre… Je ne suis vraiment pas convaincu que le prix soit cher, par contre savez-vous si les fonctionnalités Opentype avancées sont gérées ?

avatar iKalimero | 

j'ai utilisé RagTime solo début des année 2000 et j'en ai de bons souvenirs

avatar Microbd | 

Mais à ce prix-là, il va mourir 😉

avatar Yves SG | 

Ah oui ça le rappelle bien quelque chose 😂 !
Il n’y avait pas un truc qui s’appelait Calamus aussi ?

avatar mikeosx | 

Un logiciel extraordinaire (version solo gratuite à l'époque) qui m'a super aidé dans mon activité d'archi quand j'etais djeun's.
Faire des cahiers des charges mixant textes, tableurs et images était d'une facilité déconcertante avec une qualité et une précision innateignable avec word et excel.

Le but n'était pas de faire que de la mise en page, et comme l'a précisé @swift et repris par @BeePotato, je n'ai jamais retrouvé cette notion de contenant/contenu aussi bien intégrée dans un autre logiciel.

Les imprimeurs aimaient bien ce logiciel pour faire des catalogue intégrant tableur avec descriptifs, prix et des images à l'intérieur des cellules avec la possibilité de gérer les images par des formules de calculs... et une possibilité d'export en fichiers postscript nickels pour l'imprimerie.

La guerre du Golfe (ça ne me rajeunit pas mon bon monsieur) a eu raison de mon activité d'archi, (je suis passé à autre chose depuis), mais j'ai gardé un super souvenir de cet outil, un OVNI dans les logiciels de l'époque et même d'aujourd'hui.

Après, l'abandon de la version solo et le prix élevé du logiciel ne m'ont pas permis de continuer à l'utiliser de façon personnelle et la version dont je disposais et devenue obsolète au regard des changements de processeurs et de systèmes, mais à chaque sortie d'une nouvelle version, je suis toujours allé faire un tour sur le site hors d'âge de Ragtime avec un doigt tremblant sur la souris pour ne pas l'acheter...

avatar TheUMan | 

Pour les rageux qui viennent déverser leurs biles sur ce logiciel, il a au moins le mérite d'exister et de toujours pouvoir ouvrir ses documents lui.
Hein monsieur Apple avec les docs AppleWorks....

avatar BOUDA33 | 

Le mérite de pouvoir ouvrir et utiliser des documents crées en 1988 sur un mac FX est un avantage dont peu de softs peuvent se vanter. World en premier... Mais bon, quand on pas démarré sur un macplus avec un hyperdrive2000, on peut voir les choses différemment ;-)

Ragtime est un logiciel orienté objet, chose difficile à expliquer et difficile à comprendre. Faut un peu de temps. Faut être organisé dans sa tête.

Tout est individualisé et, dans un document long et complexe, tout es modifiable d'un clic. Et une image répété 100 fois n'est qu'une image. Les choses sont dans les choses qui sont dans les choses, ont des propriétés qui s'appliquent là où on les met. Les développeurs comprennent instinctivement. Pour d'autres, c'est impossible. C'est allemand, n'oublions pas.

L'intégration tableur texte est formidable, la case "contenu et contenant lié" permet de s'occuper du fond puis d'adapter son travail d'un geste à une page, avec une mise en page parfaite et harmonieuse.

Enfin, entre tant d'autre chose, pour faire ce pourquoi il a été conçu, du  « business publishing », à l'époque pour les secretaires dont l'informatique a détruit le job, il est incroyablement pratique, puissant et économique : lettres parfaitement mise en page, tarifs facilement ensuite automatisable avec acrobat, formulaires (tous les cerfa sont reproductible en quelques minutes), fiches techniques, etc.

Quand on l'a utilisé, payer 400 euros tous les six ou sept ans ne m'a jamais sembler honteux.

Voilà voilà.

Ah, le point faible est le correcteur orthographique. Et une petite lourdeur en réseau mais bon, sur les mac récents, c'est indolore.

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