Après dix ans d’expérimentations qui n’ont pas abouti, Evan Williams abandonne Medium

Nicolas Furno |

Evan Williams a annoncé sur Medium, évidemment, qu’il abandonnait le poste de CEO de Medium. Tony Stubblebine va lui succéder à la tête de l’entreprise qu’il a lui-même fondée en 2012. En près de dix ans, il a tout fait pour que ce service devienne le lieu par défaut où l’on publie des textes plutôt longs et de qualité. Des années d’expérimentations en tout genre et surtout de changements radicaux de politiques qui n’ont jamais abouti, le site n’ayant jamais réellement décollé tout au long de cette décennie, même s’il a servi à héberger des auteurs et des personnalités de renom.

Evan Williams en 2014 (photo Christopher Michel (CC BY 2.0)).

Ce départ ressemble à un aveu de défaite pour Evan Williams, qui avait d’énormes ambitions en créant Medium. Il a souvent évoqué ses envies de sauver internet, mais ce nouveau service n’a jamais eu le succès de Blogger qu’il a fondé et encore moins de Twitter qu’il a co-fondé. Il y a de multiples raisons derrière l’échec relatif du service, mais l’absence de modèle économique clairement défini et surtout les multiples idées annulées dans la foulée n’ont certainement pas aidé. Nieman Lab avait dressé en 2019 une chronologie de toutes ces expérimentations et elle donne le tournis.

En 2013, le service embauche des personnes chargées de mettre en avant des collections d’articles intéressants. L’année suivante, des journalistes sont embauchés à plein temps par la plateforme, dont Steven Levy qui a travaillé pour Newsweek, Rolling Stones et Wired et l’entreprise expérimente avec la publicité en signant un accord avec BMW pour publier des articles sponsorisés. Étape importante en 2015, quand Medium invite des gros sites à publier sur la plateforme, mais sous leur nom de domaine. L’année suivante voit le lancement des abonnements payants, puis l’abandon des publicités en 2017 et l’arrivée d’une formule à 5 $ par mois pour accéder à l’intégralité du contenu.

L’entreprise a aussi tenté d’augmenter les contenus et fonctions proposés, avec de l’audio en 2017 et un clone des stories de Snapchat la même année. Puis ces dernières années, une liste de lecture payante, encore plus d’audio et même des livres numériques payants. Ces multiples essais ont tous plus ou moins échoué et surtout érodé la confiance en Medium, qui a embauché et licencié beaucoup de monde et en particulier beaucoup de journalistes au fil des années. Sans pour autant percer, un service concurrent comme Substack qui propose aux auteurs de créer des listes de diffusion payantes ayant trouvé un public et la rentabilité bien plus vite, par exemple.

La page d’accueil de Medium (capture MacGeneration).

Techniquement, Evan Williams n’abandonne pas Medium, puisqu’il en devient président du conseil d’administration, un poste créé pour l’occasion. Il explique dans le même temps qu’il compte lancer une nouvelle entreprise ou un laboratoire de recherche pour explorer de nouvelles idées, autant dire que son attention ne sera plus vraiment centrée sur le service qu’il a créé en 2012.

avatar Furious Angel | 

Qui dit contenu long dit besoin de temps et de moyens, donc je ne vois pas pourquoi on le publierait sur Medium. Le journalisme et les analyses sérieuses, ça demande rémunération…

J’ai vu des choses passionnantes sur Medium, généralement des blogs d’apps pour qui cette activité était plus que secondaire, comme le blog tech de Netflix ou Transit qui détaille des concepts. Et je vois mal un autre modele possible pour Medium.

avatar marenostrum | 

les sérieux écrivent pour laisser quelques choses derrière et pas pour une rémunération quelconque temporaire.
et ça le numérique ne peut pas le faire mieux que le papier et une bibliothèque en bois (ou metal, ça ne change pas grand chose). une oeuvre virtuelle si elle n'es pas en première page elle est perdue pour toujours. tandis que dans une bibliothèque jamais. parce que une bibliothèque a dès le départ que quelques auteurs triés par son propriétaire. c'est une chance pour que quelqu'un de grand survit. bref un auteur sérieux n'écrit pas pour le net. la tradition seule a donné les preuves. les meilleurs auteurs ont tous survécus.

avatar IceWizard | 

@marenostrum

« bref un auteur sérieux n'écrit pas pour le net. »

T’es pas sérieux dans tes propos, alors ?

avatar v1nce29 | 

Il n'écrit pas pour le net, il écrit pour lui.
Comme les orateurs qui se moquent d'être entendus mais qui aiment bien le son de leur voix.
😉

avatar marenostrum | 

le mot sérieux je l'ai mit par rapport à son commentaire, où y avait "analyses sérieuses". en fait c'est le mot Grand que j'avais en tête.
y a que le Grand qui pense pas pour la rémunération. lui il cherche la gloire éternelle. (on peut se demander pourquoi il faisait la guerre Napoleon ? pourquoi ne s'est pas contenté de régner en paix pour plus d'années. il cherchait la gloire, pas autre chose).

ici en fait il s'agit de presse et journalistes (où y en a pas de grands), bref y a rien avoir avec ce que j'ai dit. à vrai dire j'ai pas été sérieux. avant de commenter il fallait lire au moins l'article.

avatar IceWizard | 

@marenostrum

« y a que le Grand qui pense pas pour la rémunération. lui il cherche la gloire éternelle. « 

Le personnage le plus connu de Conan Doyle est Sherlock Holmes, connu de milliards de personnes dans le monde. Il détestait pourtant profondément ce personnage qu’il n’avait créé que pour écrire un livre policier à la demande de son éditeur, histoire de rembourser une dette.

Tout ce qu’il a écrit sur le détective a été sous la contrainte, son éditeur lui donnant de très généreuses avances sur chaque manuscrit, pour le motiver.

Il en avait tellement marre qu’il a finalement tué le personnage dans l’une de ces nouvelles. Le professeur Moriarty, son ennemi juré a été inventé juste pour justifier cette mort.

Le public n’a pas apprécié cette mort, encore moins l’éditeur. A tel point que Conan Doyle a été obligé de le ressusciter quelques années après, en échange d’un très gros chèque ! Et de recommencer à écrire ce qu’il détestait, pour remplir la marmite..

La gloire éternelle a rarement remplie le garde-manger, même si c’est plaisant d’imaginer des créateurs quasi-désincarnés ne vivant que pour leurs œuvres, loin des tracas du quotidien !

avatar IceWizard | 

@marenostrum

« ici en fait il s'agit de presse et journalistes (où y en a pas de grands), »

Ouais, tout le monde sait bien que les journalistes ne sont que des auteurs ratés, n’ayant même pas réussi à devenir prof de littérature dans un lycée de province !

avatar BeePotato | 

@ marenostrum : « et ça le numérique ne peut pas le faire mieux que le papier et une bibliothèque en bois (ou metal, ça ne change pas grand chose). une oeuvre virtuelle si elle n'es pas en première page elle est perdue pour toujours. tandis que dans une bibliothèque jamais. »

Jamais entendu parler de l’incendie de la bibliothèque d’Alexandrie ? 😉

avatar Ensearque | 

@Furious Angel

Je vais parler pour le cas du milieu dans lequel je travaille et fréquente à savoir la recherche et les data science/IA

Une bonne partie des boites et où cabinet de conseils spécialisé en data suivent la recherche et les chercheurs, et copient donc l’habitude de publier des articles pour expliquer leur trouvailles.
Le problème est que les journaux scientifiques académiques sont chers d’accès, et ignorés du public. Un article sur Medium c’est pouvoir partager facilement son travail et montrer que l’on est une boîte qui avance dans la recherche.

Pour les chercheurs académiques, c’est une méthode (qui reste sérieuse) pour partager un récapitulatif de ce que l’on a publié, mais aussi pour partager facilement du code et faire en sorte que l’expérience puisse être reproduite par n’importe qui. La plupart des journaux où l’on publie ne veulent pas que le code soit fourni avec le papier, et il faut donc trouver un autre canal pour partager le code et en faire la promotion.

avatar Furious Angel | 

@Ensearque

Ah mais je ne nie pas l’intérêt de Medium, mais comme tu le dis c’est un cas très spécifique. Medium a besoin de sujets bien plus nombreux.

On trouve de tout sur Medium mais ce qui semblait vouloir devenir un « Twitter où on développe ses idées » ne prend pas, parce que c’est rarement un modèle économique cohérent pour devenir le lieu de ces idées développées.

avatar iftwst | 

Jamais entendu parler de cette boîte.

avatar marenostrum | 

pour ça que lui s'en va. il a pas pu arriver dans ton oreille et la mienne aussi. il propose quelques chose d'impossible. déjà la qualité littéraire n'intéresse pas les foules, même en publication papier celui qui fait un bestseller n'est jamais un grand auteur. il résiste pas au temps.

avatar IceWizard | 

@marenostrum

« même en publication papier celui qui fait un bestseller n'est jamais un grand auteur. il résiste pas au temps. « 

Ouais, cela ne fait que 2700 ans qu’Homere a écrit l’Illiade et l’Odyssé ! Il sera oublié dans 15 mn ..

avatar marenostrum | 

t'as raison en fait. le plus grand auteur est aussi celui qui se vend le plus ou se partage le plus. lui se vend toujours de Peu. les autres, même les bestsellers finissent par s'oublier un moment, quand un autre comme eux devient à la mode.

avatar anton96 | 

@iftwst

J’ai l’impression qu’il y a trop de boîtes qu’on découvre uniquement quand elles ferment.

avatar Kenny31i | 

Médium est flou ou approximatif, voir hors standards de mon point de vu.
Toujours eu du mal avec cette plateforme. Mais la communication est inexistante aussi donc…
Jamais vu une seule pub ou redirection vers Medium. A chaque fois que je tombe dessus c’est via une recherche Google.

avatar Spinaker | 

Medium a voulu aller dans la cour des grands en faisant exactement ce qu’il ne fallait pas faire : cultiver l’élitisme.
L’élitisme ne paie pas semble t-il.

avatar iPop | 

Il manquerait peut être une Review et un journal dont le contenu serait en ligne, cela permet d’en mettre plus d’infos dans le journal.

avatar Mike Mac | 

Après le medium, penchons nous sur le fakir...

Vous ne connaissez pas Julien Fomenta Rosat, mais vous l'avez peut-être lu sans le savoir.

https://www.fakirpresse.info/moi-journaliste-fantome-au-service-des-lobbies?utm_source=pocket_mylist

avatar guyotlo | 

Peut-on, en France, être journaliste sans être de gauche ?
Vous avez 4 heures.

avatar hartgers | 

Oui.
Demandez le Point ou Valeurs Actuelles, chez votre marchand de journaux. Par contre faut pas s'attendre à de la qualité.

avatar Wolfstein | 

Pour moi Medium ça a toujours été le repaire de ceux qui pondaient des articles "Comment j'ai planté ma startup", et depuis je n'y ai plus prêté attention.

avatar jopaone | 

Pour lire les articles en illimité sans payer il suffisait de mettre son navigateur en mode privé , forcément leur modèle économique en a pris un coup 😅😅

avatar hartgers | 

Dommage si Médium ne marche pas bien, j'aime bien la présentation du site et le système des annotations. J'ai jamais trop été fidèle à la plateforme mais je suis tombé plusieurs fois sur des articles cools publiés dessus. Les longs formats s'adressent à une minorité d'intellos mais vu que j'estime en faire partie, ça m'embête si l'objectif de rentabilité force une plateforme comme celle-ci à fermer.

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