Rétro MacG : l’emblématique Macintosh SE/30

Anthony Nelzin-Santos |

À l’occasion de son trentième anniversaire, on a beaucoup parlé du Macintosh. C’est un ordinateur important, historique même, mais pas forcément celui auquel les « vieux de la vieille » pensent lorsqu’on leur demande de parler de leur machine préférée. Cet honneur est bien souvent réservé au Macintosh SE/30, sans aucun doute un des tout meilleurs Mac jamais produits par Apple.

Vingt-cinq ans plus tard, ce Macintosh SE/30 fonctionne comme au premier jour.
Vingt-cinq ans plus tard, ce Macintosh SE/30 fonctionne comme au premier jour.

Le Macintosh SEx

Commercialisé cinq ans après la présentation du premier Macintosh, le Macintosh SE/30 est l’ultime représentant de la première génération de Mac tout-en-un. Comme son nom l’indique, il tient énormément du Macintosh SE, le premier Mac doté d’une baie d’expansion (SE veut dire « system expansion »), d’un disque dur interne, de ports ADB… et d’un ventilateur.

En bas à gauche, les emplacements pour les boutons Reset et Interrupt (utile aux développeurs lors du déboguage de leurs applications). Il suffit de les faire sauter et de dévisser quatre vis Torx pour accéder aux entrailles du SE/30.
En bas à gauche, les emplacements pour les boutons Reset et Interrupt (utile aux développeurs lors du déboguage de leurs applications). Il suffit de les faire sauter et de dévisser quatre vis Torx pour accéder aux entrailles du SE/30.

Le Macintosh SE était construit autour d’un processeur Motorola 68000 à 8 MHz : son successeur à processeur Motorola 68030 aurait dû reprendre son nom augmenté d’un « x », de la même manière que le Macintosh IIx a suivi le Macintosh II. Un Macintosh SEx serait assurément rentré dans l’histoire, mais Apple a préféré s’épargner quelques moqueries et trouver un autre nom. Un petit arrangement qui fait qu’aujourd’hui encore, le Macintosh SE/30 est le seul et unique ordinateur Apple dont le nom comporte une barre oblique.

Le logo Apple multicolore découpé au laser et le nom de l'appareil en Apple Garamond.
Le logo Apple multicolore découpé au laser et le nom de l'appareil en Apple Garamond.

Le Macintosh SE/30 tient d’ailleurs tout autant du Macintosh IIx que du Macintosh SE. Il n’a par exemple qu’un seul lecteur de disquettes 3” ½, alors que le Macintosh SE en avait deux. Mais c’est le lecteur du Macintosh IIx, un des tout premiers compatibles avec les disquettes haute densité 1,44 Mo : le SuperDrive, une appellation par la suite réutilisée pour les graveurs de CD et DVD. Il intègre le même processeur Motorola 68030 à 16 MHz, le même FPU Motorola 68882, le même disque dur 40 ou 80 Mo et surtout la même mémoire SIMM.

Parenthèse « Le Chat Mauve »

Les processeurs Motorola 68000 étaient des processeurs 32 bits adressant la mémoire sur 24 bits et donc capables de gérer jusqu’à 16 Mo de mémoire (2^24 octets). À une époque où la mémoire valait extraordinairement cher et les ressources étaient limitées, Andy Hertzfeld a eu l’idée d’exploiter les 8 bits restants pour stocker les informations du système de gestion de la mémoire. Une idée « stupide », de son propre aveu.

Cet exemplaire a été fabriqué en Irlande. Remarquez le « vrai » bouton d'allumage physique, alors les boutons d'allumage actuels sont contrôlés par le logiciel.
Cet exemplaire a été fabriqué en Irlande. Remarquez le « vrai » bouton d'allumage physique, alors les boutons d'allumage actuels sont contrôlés par le logiciel.

Car les processeurs Motorola 68030, eux, adressaient la mémoire sur 32 bits : soudainement, les 8 bits autrefois disponibles ne l’étaient plus. Pour éviter tout problème, les premières machines 68030 tournaient en « mode 24 bits » avec une limite de 8 Mo de RAM. C’était le cas du Macintosh SE/30, alors qu’Apple vantait sa capacité à gérer jusqu’à 128 Mo de RAM, une quantité incroyable à l’époque.

Ceux qui ont connu cette époque se souviennent sans doute de MODE32, un utilitaire de l’indispensable Connectix qui permettait de patcher la ROM pour passer en mode 32 bits et donc profiter d’une grande quantité de mémoire. Menacée de poursuites par des utilisateurs mécontents, Apple finit par acheter MODE32 et le distribuer gratuitement : on peut d’ailleurs toujours le télécharger sur son site.

Avec son blanc cassé, sa légère texture, ses rainures et ses coins arrondis, le Macintosh SE/30 est un excellent représentant du langage visuel Snow White.
Avec son blanc cassé, sa légère texture, ses rainures et ses coins arrondis, le Macintosh SE/30 est un excellent représentant du langage visuel Snow White.

Le Système 7 permettait au Macintosh SE/30 de gérer 128 Mo de RAM sans MODE32, sans toutefois modifier sa ROM — or comme 7.6 demandait une véritable ROM « 32 bits », le Macintosh SE/30 était limité à 7.5.5. Du moins officiellement : officieusement, les plus débrouillards remplaçaient sa ROM par celle d’un Mac IIsi pour profiter des dernières versions du Système 7. Et les plus téméraires remplaçaient carrément son processeur par un Motorola 68040 pour passer à Mac OS 8.

L’ultime « vrai » tout-en-un

Un Macintosh SE/30 acheté en 1989 et régulièrement mis au goût du jour a donc pu profiter de toutes les évolutions logicielles jusqu’en 1999. Une durée de vie exceptionnelle, mais le Macintosh SE/30 a été populaire dès son premier jour : il faut dire qu’il coûtait 1 300 $ de moins que le Macintosh IIx dont il était si proche, alors qu’il intégrait un écran noir et blanc 9 pouces 512 x 342. Mais il valait tout de même 6 500 $, l’équivalent de 8 650 € aujourd’hui.

De gauche à droite : deux ports ADB pour le clavier (qui comporte lui-même deux ports ADB, un pour être connecté au Mac, l'autre pour accueillir une souris) et d'autres périphériques, un port DB-19 pour un lecteur de disquettes, un port DB-25 SCSI, deux ports série RS-232/RS-422 (230.4 Kbaud maximum) et une fiche stéréo.
De gauche à droite : deux ports ADB pour le clavier (qui comporte lui-même deux ports ADB, un pour être connecté au Mac, l'autre pour accueillir une souris) et d'autres périphériques, un port DB-19 pour un lecteur de disquettes, un port DB-25 SCSI, deux ports série RS-232/RS-422 (230.4 Kbaud maximum) et une fiche stéréo.

Or Apple a longtemps continué à vendre le Macintosh SE, une machine certes trois à quatre fois moins puissante, mais aussi deux fois moins chère — et qui pouvait être « transformée » ultérieurement en Mockintosh SE/30 à l’aide d’un pack comprenant une carte-mère et une façade de remplacement. Le Macintosh SE/30 est en fait une exception dans la lente descente en gamme des Mac tout-en-un : le Macintosh Classic II qui lui a « succédé » était une machine moins puissante, moins évolutive, et surtout bien moins chère.

Ce modèle est accompagné d'un clavier Apple Standard Keyboard. Le client pouvait choisir entre ce clavier d'entrée de gamme ou le très réputé Apple Extended Keyboard.
Ce modèle est accompagné d'un clavier Apple Standard Keyboard. Le client pouvait choisir entre ce clavier d'entrée de gamme ou le très réputé Apple Extended Keyboard.

Car à l’époque, sous la pression d’une partie de sa clientèle professionnelle et la concurrence des fabricants de PC, Apple met en avant des Mac plus modulaires. L’ombre du Macintosh original se dissipe progressivement et les Macintosh II puis les Quadra prennent l’ascendant pour former le cœur de la gamme. Dès lors, les tout-en-un ne reviendront qu’en pointillés, jusqu’à ce que Steve Jobs ne les ressuscite avec l’iMac G3.

Un Mac emblématique

Mais c’est justement parce que le Macintosh SE/30 est une exception dans ce mouvement qui a conduit à la banalisation d’Apple qu’il est resté dans les mémoires. John Gruber, le célèbre auteur du blog Daring Fireball, dit par exemple :

Le Macintosh SE/30 est le sommet de l’architecture du Mac original. Il ressemble beaucoup à ses prédécesseurs, mais il était beaucoup plus rapide — c’était le premier tout-en-un qui permettait aux logiciels de vraiment s’exprimer. Ses spécifications, comme le disque dur de 40 Mo ou l’écran 9 pouces avec seulement 512 pixels sur 342, semblent ridicules par rapport aux normes actuelles. Mais comme tous les grands Mac, le SE/30 n’était pas seulement une formidable machine à son lancement ; il est resté extrêmement confortable pendant des années. Lorsque je pense à l’époque du Mac original, je pense au Mac SE/30.

Le développeur et auteur Jon Siracusa est sans doute celui qui résume le mieux la position unique occupée par le Macintosh SE/30 dans l’histoire d’Apple :

Il fut un temps où chaque nouveau Macintosh égalait ou améliorait tous les aspects de son prédécesseurs. Le Macintosh SE/30 est arrivé à la toute fin de cette époque, et représente l’apogée du format du Macintosh original. Tout aussi puissant que l’incroyablement cher Macintosh IIx, le SE/30 était comme un moteur V12 que l’on aurait casé au chausse-pied sous le capot d’une Honda Civic. […] C’est le roi incontesté des Mac d’origine et, donc, de tous les Mac jusqu’à la fin des temps.

Dans cet épisode de Seinfeld, on voit régulièrement un Macintosh SE/30 sur le bureau de Jerry.

C’est un Mac qui a marqué toute une génération, non pas seulement parce qu’il a été le premier Mac de quelques-uns des acteurs les plus influents de ce qu’il reste de la « communauté Apple », non pas seulement parce qu’il trônait sur le bureau de Seinfeld, mais aussi parce que beaucoup des premiers sites web étaient hébergés sur des Macintosh SE/30. Un Mac si emblématique que même les services secrets s’en sont servis !

avatar melaure | 

Ces machines étaient assez sensibles aux surtensions de l'époque. Deux fois le Mac Plus m'a fait le coup ...

avatar marc_os | 

Ce fut mon premier Mac ! (Acheté d'occasion, avec DD de 40 Mo)
Je l'ai toujours, et il est toujours opérationnel.
Il dort dans sa belle housse qui le rendait effectivement facilement transportable pour l'époque…

J'ai écrit ma thèse avec Word 4 dessus, et fait mes premières armes en programmation sur Mac avec Think C… Mais il est resté en 6.0.4. Car à côté, j'ai "hérité" (indemnité de licenciement) d'un Mac IIcx upgradé plus tard en IIci… Lui aussi est à priori toujours fonctionnel et endormi depuis un bail.

avatar claudde | 

arff. c'était à Lyon dans une petite boite (créabilis?) et je créait ma première illustration sur illustrator number 1!. l'ecran était en noir et blanc, mais l'illustration en couleur. et la séparation (cmjn) se faisait en enlevant 3 des couches en laissant la bonne couleur. et ainsi de suite 4 fois. Et maintenant, quand je proposes mes services en dessin ou graphisme, on me regarde avec de grands yeux...

avatar JeevesGre | 

Débuté sur un Mac+ (512K), puis, assez vite, un SE/30.
Ce SE/30 a été mon premier Mac perso, racheté à mon employeur.
Il démarre toujours au quart de tour.
Un grand plaisir : les “Fiches cuisine” de “Elle”, réalisées sous Hypercard ;-)
Les machines passent, les recettes restent !
Un ingrédient semble passablement manquer aux machines d’aujourd’hui, la durabilité.
PS : Il me semble que certains de ces Macs “portables” ont traversé l’Atlantique, assistant des navigateurs au long cours dans des courses toujours d’actualité. Un test osé pour l’époque, non ?

avatar Dr Fatalis | 

J'ai aussi un vieux SE/30 acheté d'occasion, qui avait aussi l'avantage d'être "portatif" à une époque où les portables étaient rares et plus qu'onéreux... J'y ai terminé une ou deux thèses, sous word 5, même si je préférais JAZZ, et j'y ai réalisé une présentation de thèse sous forme d'une pile hypercard.
Je regrette hypercard...

avatar sekaijin | 

Ha mon premier Mac
un SE/30 avec un deuxième écran un "double page" (capable d'afficher deux page A4 côte à cote)

Que d'heures de Dev 4D j'ai pu passer dessus.
rien à voir avec les PC de la fac et tubo pasal

bon c'était celui de ma boite mais quelle première expérience. alors que mes camarades de fac développaient des applis DOS....

A+JYT

avatar reno732 | 

C'est peu être une conséquence de l'augmentation de la finesse de gravure qui d'un côté permet des puce plus économes mais peut être plus fragile ...

On n'allait pas à l'économie à cette époque sur les matériaux ! Tout le monde était dans une logique de qualité, de positionner sur le prix était pas très bien vu il y a 30 ans tout était mis sur la qualité ...

Aujourd'hui qui n'a jamais dit c'est trop cher je trouve la même chose à moitié prix ...

Par exemple cette histoire des téléviseurs Samsung il me semble avec un condensateur Low cost qu'il suffit de remplacer par un condensateur mieux dimensionné mais plus cher, on veut tous ou presque des produits pas cher ou presque et on se plains que ça tombe en panne ... Tous les Macs ancien que j'ai fonctionne encore ... Le SE/30 entre autre y compris mon TO5 et mon atari 520STf ...

Même mes anciens iPhone fonctionne quand je vois le nombre d'écran fracturé sur les autres smart phone que je répare au magasin ... Il y a plusieurs explications possibles :

Soit le produit est plus solide
Soit l'utilisateur est plus soigneux de son produit
Soit les deux ...

Un petit enquete pour savoir si les possesseur d'objet Apple soit plus soigneux de leurs objets ...

Pages

CONNEXION UTILISATEUR