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Prise en main d’Orion, le navigateur qui reprend le meilleur de Safari et les extensions de Chrome

Nicolas Furno

mardi 12 octobre 2021 à 12:30 • 35

Logiciels

Orion est un nouveau navigateur web qui se base sur WebKit, le moteur de rendu d’Apple. C’est devenu plutôt rare de nos jours, la majorité des apps dans ce secteur reposant désormais sur Chromium, le moteur de rendu de Google. Certes, ce dernier était à la base un fork (version dérivée) de WebKit, mais le spécialiste de la recherche l’a fait évoluer depuis pour ses propres besoins. En utilisant Orion, vous aurez exactement le même rendu que dans Safari et surtout ses meilleures performances.

Ce n’est pas Safari 14, mais bien Orion.

Pourquoi choisir Orion plutôt que Safari si le moteur de rendu est le même ? Peut-être parce que vous n’aimez pas la nouvelle interface de Safari 15, qui reste différente de la précédente même en désactivant la coloration de la barre d’outils et même en n’activant pas la présentation compacte. En comparaison, ce nouveau-venu actuellement en bêta privée est proche de Safari 14, avec ses onglets qui ressemblent à des onglets et sa barre de favoris placée au-dessus des onglets.

Si vous préfériez l’interface « historique » du navigateur d’Apple, Orion la propose par défaut et l’import des données depuis Safari offre une transition sans heurts. Le navigateur ne récupère pas seulement les favoris, il transfère aussi l’historique complet, les pages web ouvertes au moment de l’import, les mots de passe enregistrés (qui devront toutefois être exportés par vos soins) et même les données de sites et autres cookies, ce qui veut dire que vous ne perdrez pas la connexion dans la plupart des sites.

En revanche, vous perdrez deux fonctions de Safari, ce qui peut être rédhibitoire selon vos usages. D’une part, la synchronisation iCloud est évidemment hors d’atteinte, si bien qu’Orion ne sera pas synchronisé avec Safari sur vos iPhone, iPad et autres Mac. Une version iOS de l’app est toutefois en préparation et elle pourra synchroniser ses données avec l’app macOS, ce qui éliminera ce défaut. D’autre part, les extensions pour Safari ne sont pas compatibles avec cette alternative, mais ses créateurs ont une promesse intéressante : Orion est compatible avec les extensions web de Chrome et Firefox.

Orion avec le panneau dédié aux extensions sur la gauche et l’extension 1Password issue de Firefox en haut à droite.

C’est une excellente idée, puisque ce catalogue est le plus riche qui soit et Orion s’ouvre ainsi à une immense collection d’extensions dans tous les domaines. L’intégration est parfaite en outre, avec la possibilité de les installer directement depuis les boutiques d’extensions de Chrome et Firefox. Mais le navigateur est encore en bêta et cette prise en charge est partielle — les développeurs donnent le chiffre de 70 % d’extensions gérées —, ce qui se voit vite. Sur toutes les extensions que j’ai testées, bien peu ont fonctionné correctement, souvent parce que leur interface n’était pas rendue.

Même une extension aussi simple que Tab Reloader, qui permet de recharger régulièrement un onglet, n’affiche pas son icône dans la barre d’outils, même si son interface s’affiche bien et même si elle fonctionne correctement. En revanche, l’extension Web Archives n’affiche qu’un carré blanc. Celle de 1Password fonctionne très mal, bloquant plusieurs pages de connexion où je voulais l’exploiter, et c’est la version indépendante de l’app macOS qui est plus lente à utiliser. Quant à SingleFile, son interface ne s’affichait pas et je n’ai jamais réussi à télécharger une page.

Si vous comptez sur des extensions précises, c’est un problème, même si les créateurs d’Orion annoncent que la prise en charge sera bien meilleure à la fin de la phase de bêta. En attendant de voir si la promesse sera tenue, il faut aussi souligner que le navigateur propose de multiples fonctions de base, y compris un bloqueur de contenus intégré par défaut. On retrouve aussi un mode lecteur pour améliorer la lisibilité des articles, et plusieurs outils qui remplacent des extensions listées précédemment (l’un pour faire une capture d’écran complète de la page web, l’autre pour ouvrir la page en cours sur archive.org).

En option, Orion peut afficher les onglets dans une barre latérale sur la gauche de sa fenêtre. La barre peut être agrandie pour afficher le titre de l’onglet, en plus du favicon comme ici.

Orion a encore d’autres arguments à faire valoir : son absence totale de statistiques collectées sur l’utilisateur, son mode économie d’énergie qui permet d’économiser de la batterie sur un Mac portable1, son mode focus qui masque toute l’interface pour mieux se concentrer sur le contenu ou encore l’affichage en option des onglets dans une barre latérale à gauche. Le tout en étant plus rapide et léger que Safari d’après ses concepteurs, ce qui tient notamment à la présence d’un bloqueur de contenus. D’après ce que j’ai pu constater avec la bêta, c’est vrai, mais les extensions web peuvent peser lourd dans la balance.

Les créateurs d’Orion sont clairs dans la foire aux questions affichée sur le site : ce nouveau navigateur ne sera jamais financé par la publicité ou les données des utilisateurs. L’objectif est d’offrir à terme un abonnement payant (un tarif de 5 $ par mois ou 50 $ par an est évoqué) avec une version « Pro » qui permettra de financer le projet, sans pour autant offrir de fonction supplémentaire. Comme Chrome, Orion est également adossé à un moteur de recherche qui pourra contribuer à son financement.

Kagi Search, c’est son nom2, est un moteur de recherche concurrent de Google, Bing ou DuckDuckGo. Actuellement en bêta privée, il met lui aussi en avant la vie privée des utilisateurs et surtout l’absence totale de publicités, si bien que son financement passera par ses utilisateurs. Contrairement à ses concurrents, ce moteur ne vise pas le grand public, mais les professionnels prêts à payer pour une recherche débarrassée de publicités3. En échange, s’il exploite les moteurs concurrents (Google et Bing) comme base de son index, il constitue sa propre base de données de sites web avec à l’heure actuelle environ six millions de domaines connus et scannés.

Voici à quoi ressemble la bêta de Kagi Search, avec une présentation fortement inspirée par celle de Google, mais dénuée de toutes publicités (image Kagi).

Six millions de sites, c’est bien peu à l’échelle d’internet, même si la qualité est mise en avant et tous les sites taillés uniquement pour la publicité et le SEO sont exclus. Cela dit, Kagi Search fait preuve de transparence et souligne que cet index maison ne représentera que 5 à 10 % des résultats de recherche. Je n’ai pas pu tester le moteur pour vérifier ce qu’il valait, mais Orion peut en faire votre moteur préféré, même si ce n’est pas le cas par défaut. D’ailleurs, le navigateur web ne choisit pas de moteur par défaut pour vous, c’est à vous de sélectionner celui que vous préférez lors de la première utilisation de la recherche.

Orion comme Kagi Search sont deux outils prometteurs, si les bugs et limitations des bêtas sont bien corrigés d’ici la version finale. Si vous voulez les tester, vous pouvez laisser votre adresse mail sur le site officiel. Orion nécessite à l’heure actuelle macOS 10.14 au minimum, mais macOS 10.13 sera prise en charge à l’avenir. Le navigateur est optimisé Apple Silicon, mais il n’est pas traduit en français à ce stade.


  1. Seul l’onglet ouvert est alors actif, les autres sont vidés et le contenu devra être rechargé lors de l’ouverture. Une fois le mode en place, les onglets ouverts sont maintenus pendant cinq minutes avant d’être vidés à leur tour.  ↩︎

  2. Rien à voir avec le Kagi bien connu des acheteurs de logiciels Mac dans les années 2000.  ↩︎

  3. Aucune mention d’un tarif à ce stade et la bêta privée est entièrement gratuite.  ↩︎

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