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Les relations Apple et Sony racontées en anecdotes

Florian Innocente

Wednesday 05 February 2014 à 15:55 • 34

AAPL

Apple et Sony, ce fut une grande histoire de respect mutuel, raconte Nobuyuki Hayashi. Ce journaliste japonais relate des anecdotes qu'il avait recueillies auprès de Kunitake Andō, qui dirigea le groupe nippon entre 2000 et 2005. Steve Jobs a plusieurs fois fait état de son admiration pour le cofondateur de Sony, Akio Morita. Notamment en lui rendant hommage durant une Macworld Expo, après l'annonce en 1999 de la disparition du célèbre dirigeant (vidéo). Morita lui rendait bien cette affection, explique Kunitake Andō. Le cofondateur appréciait tout particulièrement deux célébrités américaines : Michael Jackson et Steve Jobs. Chacun des deux hommes était de temps à autre invité par Morita pour faire un tour de son entreprise.

Jobs rendant hommage à Akio Morita après sa disparition

Le billet décrit aussi à quel point les relations entre Apple et Sony furent étroites et régulières (aujourd'hui encore c'est Sony qui équipe Apple en capteur photo pour son iPhone) et même durant toutes les années où Jobs n'était plus chez Apple. Les deux sociétés ont étroitement collaboré sur certains projets. Par exemple, l'équipe QuickTime a aidé Sony à mettre au point son format audio ATRAC, utilisé sur les MiniDisc puis sur la PlayStation Portable. L'un des anciens concepteurs de QuickTime dirigea chez Sony le développement des appareils photo numériques Cyber-shot. Sony utilisa aussi QuickTime sur ses téléphones et PDA Clié.

Cyber-shot DSC-F717 2002 - Wikipedia

À propos de ces Cyber-shot, Andō attribue à Jobs l'idée de les doter en puces GPS :

Steve Jobs a toujours eu une opinion sur chacun de nos produits, a déclaré Andō. Lorsque nous avons lancé la PSP (PlayStation Portable), il se plaignait du fait que nous utilisions toujours des disques. De son point de vue, les disques étaient complètement dépassés. Jobs était particulièrement intéressé par la gamme d'appareils photo, peut-être parce que c'est l'une des catégories de produits dans laquelle, à l'époque, Apple était absente. Une fois, il a pris en main l'un des derniers Cyber-shot et il a dit « Si cette chose avait un GPS intégré, je pourrais enregistrer tout ce qui se passe dans ma vie ». Sony a pris ce conseil au sérieux et, aujourd'hui, la plupart des appareils photo Sony ont un GPS intégré.

Jobs n'hésitait pas à appeler Kunitake Andō au pied levé pour lui demander s'il pouvait passer le voir au siège, à Tokyo. Et le patron japonais de laisser son homologue se promener. Jobs savait apprécier le travail fourni par l'entreprise de son hôte « Tout ce que j'ai voulu faire a déjà été fait par Sony » a-t'il une fois affirmé à son interlocuteur. Il demandait à voir les derniers produits sortis et visiblement en savait déjà beaucoup à leur sujet. Le patron de Sony fut également convié par Jobs à l'un de ses keynotes, en 2005, pour montrer une nouvelle caméra numérique tandis qu'Apple lançait Final Cut Express (à 7 min dans la vidéo).

Le patron d'Apple marqua aussi son intérêt pour la chaine de boutiques "SonyStyle". Il demande à Andō pourquoi Sony s'évertue à avoir ses propres magasins. « Les distributeurs savent vendre vos produits, mais ils ne savent pas expliquer aux clients ce que vous pouvez faire avec. C'est ça que nous voulons faire dans nos magasins » lui répond le patron de Sony. Ce à quoi Jobs rétorque « Et c'est exactement de ça dont nous avons besoin ». À cette époque les Apple Store n'existent pas encore. Il faut aussi rappeler que Jobs fut présent entre 1999 et 2002 au conseil d'administration de Gap, un autre poste d'observation intéressant pour comprendre le marché de la vente au détail, même si le PDG d'Apple ne s'y fit pas remarquer pour son assiduité aux réunions.

Un autre aspect des relations entre Jobs et Sony aurait pu avoir des conséquences importantes, celles de voir les PC Vaio fonctionner avec une licence d'OS X. Jobs ordonna en 2001 qu'un prototype d'OS X sur Intel soit installé sur un Vaio pour en faire la démonstration au PDG de Sony (lire aussi OS X sur Intel : aux origines du projet Marklar). Jobs, à son retour aux commandes, avait mis fin au programme de licences de Mac OS auprès des quelques cloneurs existants. Mais quelques années plus tard, il était prêt à faire une exception et laisser son OS fonctionner sur les machines de Sony.

À la toute fin 2001, Jobs et l'un de ses lieutenants rencontrèrent leurs homologues de Sony à Hawaï. Le patron d'Apple avait apporté un VAIO avec un OS X version Intel. Une déclinaison qui ne sera officialisée auprès du public et des développeurs qu'en 2005.

Andō appréciait également les ordinateurs d'Apple, dont le nouvel iMac. Les deux groupes, disait-il, avaient une philosophie assez proche dans la manière dont ils concevaient leurs machines. Toutefois, le timing n'était pas approprié pour l'arrivée d'un OS X sur les VAIO. Andō a expliqué au journaliste que cette famille d'ordinateurs commençait à avoir du succès et que les ingénieurs de Sony venaient d'en optimiser le matériel et le logiciel pour Windows. La plupart de l'équipe VAIO s'opposa à cette idée de travailler avec Apple, avec une simple question « est-ce que ça en vaut la peine ? ». L'aventure s'arrêta là.

Pour ajouter un élément au billet de Nobuyuki Hayashi, on peut rappeler l'anecdote qui marqua peut-être le tout début des relations entre les deux sociétés. Lorsque le premier Mac était en développement, Jobs souhaitait y installer un lecteur de disquettes 5,25" fait maison (surnommé Twiggy, en vidéo ci-dessous avec un prototype) dont la capacité de stockage devait être doublée. Mais Sony arrivait à ce moment-là avec son premier lecteur 3,5", ses petites disquettes que l'on pouvait glisser dans une poche et qui étaient protégées par un boitier en plastique rigide.

Jobs ordonna à ses ingénieurs de s'inspirer ouvertement de ce support pour améliorer le projet de lecteur 5,25" déjà en chantier. Mais à sept mois de la sortie du Mac, l'équipe de Steve Jobs était bien plus consciente que lui de la quasi-impossibilité d'être prêt dans les délais impartis.

Le lecteur 3,5" de Sony dans le premier Mac, une merveille d'innovation à l'époque dont le Mac 128K eut la primeur
 - CoM/iFixit

Ces ingénieurs travaillèrent alors secrètement avec Sony tout en continuant à discuter avec le partenaire japonais d'Apple engagé dans la fabrication du Twiggy. Un jour, l'homme de Sony dépêché discrètement auprès de l'équipe Mac dut se cacher précipitamment dans un placard à balai lorsque son homologue chez Apple entendit la voix de Jobs résonner dans les couloirs. Hide Kamoto, l'ingénieur japonais en question, ne s'en offusqua pas, mais une fois sorti de son refuge il dit à ses collègues qu'il trouvait les « pratiques américaines étranges, très étranges ». Andy Hertzfeld relate plus en détail cet épisode de la conception du Mac.

Au final, le partenaire japonais d'Apple estima qu'il lui faudrait 18 mois pour réaliser le lecteur de disquettes voulu. Jobs ravala sa fierté et remercia ses ingénieurs pour leur désobéissance lorsqu'ils lui révélèrent qu'ils avaient travaillé sur un plan B avec Sony…

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