Interview, suite et fin...

Christophe Laporte |
Dans cette dernière partie, François Rondeau nous présente Xserve Raid et Cluster Node. Le responsable marketing d'Apple France nous parle également de l'impact de ces produits dans les comptes de la société de Cupertino.


- Apple a fait beaucoup d'annonces dans le domaine des serveurs ces derniers temps. Pour le néophyte, qu'est-ce que Xserve RAID apporte à l'offre d'Apple en matière de serveurs ?


- C'est très simple. La plupart de nos clients de la prépresse, presse, des secteurs créatifs ou audiovisuels ont de gros besoins de stockage. Si vous prenez des journaux, des agences de presse, on parle à chaque fois de téraoctets. Xserve n'était pas une réponse pour ces gens-là. Quand il est sorti, on pouvait mettre 480 Go. Pour un certain nombre de clients, c'était loin d'être suffisant.


On a beaucoup de clients dans le domaine de la presse, de la vidéo, dans les universités, pour qui ils manquaient une baie de stockage. XServe Raid répond à ce besoin. Maintenant la combinaison Xserve/Xserve RAID/Mac OS X Server, au-delà d'apporter une solution de stockage volumineuse, leur apporte une architecture redondante que Xserve n'offrait pas tout seul puisqu'il n'avait pas de Raid matériel et d'alimentation redondante.


- Pourquoi avoir sorti un Cluster ?


Il était dans les cartons depuis très longtemps. La genèse du Cluster est très simple. Le G4 a un certain nombre d'avantages au niveau calcul. On avait beaucoup de clients avant la sortie du Xserve qui faisait du calcul avec des G4, des G3... Il y a un hébergeur en Suisse qui est un joint-venture de la société 4D qui a une ferme de G4 Cube, la plus grosse en Europe. Tous ces gens-là exploitaient comme ils pouvaient la puissance du G4. On avait donc déjà un terreau favorable, sachant que d'un point de vue puissance, le G4 et l'architecture G4/Altivec est en terme de calcul l'une des meilleures solutions du marché pour ce qui est des calculs en entier et des calculs à virgule flottante en simple précision (jusqu'à 6 chiffres après la virgule). Pour les calculs à virgule flottante en double précision (12 chiffres après la virgule), il faut être honnête, le G4 a une performance équivalente aux autres processeurs du marché.


La clientèle intéressée par un cluster, principalement des chercheurs, a des caractéristiques très spécifiques. Tout d'abord, ils connaissent bien tout ce qui est Unix/Mac OS X Server. Ensuite, ils n'ont pas beaucoup d'argent et ils touchent leur budget une ou deux fois par an par dotation. Quand vous regardez les universités françaises et comment ces gens-là sont équipés en terme de ferme de calcul, ils ont en général des boîtes Linux qu'ils ont montées eux-mêmes. Monter des clusters pour eux, c'est une question de puissance, mais également d'économie. Quand ces gens-là nous ont montré les budgets qu'ils avaient, on savait qu'on avait une optimisation à faire. C'est ce qu'on a fait avec Xserve Cluster Node. On a pris une plate-forme Xserve et on l'a optimisé au maximum en coût.


On a regardé comment les clients utilisaient des serveurs Linux pour faire des centres de calcul, on a regardé notre Xserve et on a décidé de supprimer tous les éléments superflus. On a retiré le lecteur de médias (les installations se font par le réseau), trois des emplacements pour le disque dur (un noeud de calcul n'a pas besoin d'une grosse capacité de stockage), on a retiré toutes les cartes accessoires : carte vidéo, et la deuxième carte réseau. Le retrait de la seconde carte Ethernet peut paraître surprenant, parce qu'en général les Clusters sont des clusters Ethernet/Gigabit. On propose une autre solution de connexion encore plus rapide : le FireWire 800.


Cette cure d'amaigrissement nous permet d'avoir un serveur 1U bi-processeur G4 au même prix qu'un Xserve monoprocesseur. On propose avec Cluster Node, Mac OS X Server 10 licences qui nous permet de baisser encore le prix. C'est une optimisation de la configuration pour avoir un prix agressif vis-à-vis d'un cluster 1U Linux de base et capable d'être intéressant pour ces chercheurs et universités qui ont des budgets restreints.


- D'un point de vue pratique, comment cela fonctionne-t-il ?


La première chose, il faut être très clair là-dessus, ce qu'on propose, ce sont des fermes de calculs de cluster logiciels. Mac OS X Server au niveau de son noyau n'est pas un système UNIX qui permet de faire du cluster matériel comme HP/UNIX ou Solaris peut le faire.


On ne peut pas aujourd'hui prendre un, deux, trois, quatre ou cinq Xserve et simplement avec Mac OS X Server virtualiser l'ensemble de ces Xserve pour n'en faire qu'une machine. Ce qu'on fait, c'est qu'on a un Xserve qu'on va appeler Xserve maître qui va être capable de piloter un ensemble de Xserve ou de Xserve Cluster Node et qui va distribuer sur cet ensemble une application de calcul, c'est ce qu'on appelle une ferme de calcul, une ferme de calcul parallèle, une ferme de calcul partagé ou encore un cluster logiciel.


Il y a plusieurs manières de travailler. Certaines applications sont capables nativement, en utilisant certaines librairies de calculs partagés, de répartir le calcul sur plusieurs machines. Ça va être le cas d'Oracle DB 9i.


D'autres applications - la majorité des cas - nécessitent plus de travail. Les gens ont une série de bibliothèques de programmation qui viennent en général du monde Linux et qui permettent d'aller faire du calcul parallèle sur un Cluster à partir d'une application que ces gens-là ont développée en général eux-mêmes. Il faut recompiler le programme sous Mac OS X, c'est simple, car on est dans un monde Unix. De notre côté à Apple, nous tâchons d'optimiser les librairies de calculs partagés pour Altivec, ce qui procure un gain de performance de l'ordre de 30 à 40 %.


La dernière utilisation de Xserve Cluster Node, c'est dans le domaine de la vidéo. Je pense qu'on va avoir de plus en plus de choses suite aux annonces qu'on a faites avec Final Cut Pro 4, Shake 3 et DVD Studio Pro 2. Beaucoup de clients sont en train d'évaluer des clusters de rendus à base de Shake ou de Final Cut Pro. Ces applications n'ont pas forcément des fonctionnalités de calculs parallèles intégrés, mais on peut les coupler à des logiciels de calcul parallèles. Il est également possible de faire du calcul parallèle avec des logiciels 3D comme Maya.


Final Cut 4, Maya, Shake, on va avoir normalement une explosion des ventes de Xserve Cluster Node. On a maintenant des solutions qui vont tirer profit de Xserve Cluster Node. C'était donc le bon moment pour nous de le faire.



- iPod et Xserve sont deux produits sur lesquels Apple croit beaucoup. Est-ce que ces produits ont aujourd'hui un véritable impact sur les comptes d'Apple ?


- Depuis son introduction, Xserve compte de manière significative dans les comptes d'Apple. Je pense que la comparaison avec iPod, même si iPod est un succès, n'est pas la comparaison la plus idoine. Xserve pèse plus dans les comptes d'Apple que l'iPod et d'un point de vue investissement et direction stratégique, c'est encore bien plus important, vous l'imaginez, qu?iPod. Tout simplement parce que Xserve c'est un peu notre cercle vertueux.


Si un client achète du Xserve, il achète du Mac OS X Server. Si il achète du Mac OS X Server, il a les moyens de mettre en place une architecture client/serveur Mac OS X compétitive. S'il y a les moyens de le faire, on espère qu'il va migrer ses postes sous Mac OS X. S'il décide de migrer sous Mac OS X, il va racheter de nouveaux Mac sous OS X. S'il rachète de nouveaux Mac sous Mac OS X dans une architecture client-serveur, il y a fort à parier, si on a été bons au niveau support, qu'il achètera la prochaine version serveur.


Xserve, c'est la manière dont on matérialise aujourd'hui toute notre stratégie Mac OS X. Ça a un poids stratégique et un poids sur le plan investissement sans commune mesure avec iPod, même si iPod est un succès emblématique d'Apple. C'est vraiment notre focus commercial. C'est notre principal investissement depuis un an, et ça va le rester même si je vous le concède d'un point de vue communication, Steve Jobs parle moins dans ses keynotes de Xserve que de iPod, mais la logique derrière est facile à comprendre. Apple est quand même un petit acteur du monde informatique, on n'a pas le poids d'IBM ou de HP,mais on a une marque fantastique et communiquer sur des produits emblématiques comme le PowerBook 17 pouces, iPod ou le digital hub permet d'avoir un retentissement et un impact d'un point de vue communication similaire peut-être à IBM ou HP, en tout cas bien au-delà de notre part de marché. C'est pour cela que nos efforts de communication vont vers nos produits phare grand-public. Par contre, notre effort commercial et notre investissement vont vers notre offre pro et Xserve.


Et puis, peut-être qu'un jour, quand on aura tiré tout le potentiel commercial des plateformes Xserve et Xserve Raid, on communiquera peut-être plus dessus. Mais, comme l'a dit Steve Jobs lors de la WWDC l'année dernière, on pense qu'on a de bons produits, qu'on a intégré un certain nombre de compétences pour faire de Xserve un succès. Maintenant, Sun ou HP ont mis des années à s'installer dans le monde des serveurs. On va essayer de bien faire notre boulot et d'être modeste. Et quand on aura un succès plein et entier, peut-être qu'on communiquera sur ces sujets comme Apple sait le faire.


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