ARM voudrait plus de royalties sur ses puces

Pierre Dandumont |

La saga liée à Arm (la société à l'origine des puces ARM) continue. Après le rachat par Nvidia qui a été annulé, la compagnie devrait entrer en bourse cette année, aux États-Unis. Et dans cette optique, Arm voudrait modifier la façon dont ses clients sont facturés, selon le Financial Time.

Des royalties plus élevées

Il faut rapidement expliquer comment Arm fonctionne : la société ne vend pas directement de produits finis, elle conçoit des CPU ou des cartes graphiques (les Cortex et les Mali, par exemple) et vend les plans à des sociétés, qui payent une licence pour y avoir accès, ainsi que des royalties sur les produits vendus. Les clients en question peuvent ensuite intégrer le tout dans un système sur puce adapté à leurs besoins. C'est le fonctionnement le plus courant (nous parlerons d'Apple dans la suite) et la majorité des sociétés qui fabriquent des puces ARM passent par cette voie.

Un SoC Mediatek (Raimond Spekking, CC BY-SA 4.0)

Sans que les détails soient publics, la façon dont Arm récupère les royalties est à peu près connue. Prenons l'exemple d'une compagnie comme Mediatek : elle dispose d'une licence auprès d'Arm et obtient les plans des puces Cortex. Elle intègre ensuite le tout dans un système sur puce, qu'elle vend à ses clients pour le placer dans un smartphone. Arm récupère de l'argent à travers la licence de Mediatek mais aussi un pourcentage du prix de vente du système sur puce (1 à 2 % selon les différentes sources). Le prix de la puce en question varie évidemment, mais il est généralement lié à son âge, sa puissance, etc. Les sources indiquent que Qualcomm facture en moyenne 40 $ quand Mediatek est aux alentours de 17 $, par exemple.

Arm veut faire payer le vendeur final

Visiblement, la nouvelle méthode serait différente. Arm ferait toujours payer le concepteur du système sur puce, mais en se contentant de la licence. Les royalties, elles, seraient prélevées chez le fabricant du produit fini, en prenant en compte le prix moyen du produit. C'est une manière très différente de faire, qui risque d'amener de nombreux problèmes. Le premier est évident : les vendeurs de puces ne vont probablement pas baisser leurs prix à cause de la disparition des royalties, mais les fabricants des produits finis, eux, risquent de répercuter la hausse.

La nouvelle organisation selon le Financial Time.

Le second problème est nettement plus complexe : comment gérer le montant des royalties ? Il semble difficile de garder le même pourcentage pour toutes les puces en prenant uniquement en compte le prix du produit fini : certains fabricants installent des systèmes sur puce puissants en rognant sur d'autres points pour garder des produits avec un coût compétitif, quand d'autres préfèrent installer un système sur puce moyen mais suffisant en se concentrant sur d'autres aspects, par exemple.

Et les royalties doivent aussi évidemment différer en fonction du produit : il semble difficile d'imaginer qu'Arm demande le même pourcentage à un fabricant de téléviseurs et à une société qui installe un système sur puce dans une clé HDMI, malgré le fait que les composants sont identiques à ce niveau. De même, certains produits intègrent parfois des dizaines de puces, ce qui risque de compliquer le calcul des royalties. Et les puces ne se limitent pas à l'électronique grand public : comment gérer les cas des voitures électriques, par exemple ?

Le problème des licences particulières

Nous en parlions au début, il existe d'autres licences. Certains constructeurs peuvent partir des plans d'un CPU en particulier et le modifier pour l'améliorer ou l'adapter à leurs besoins, comme Qualcomm a pu le faire dans une partie de ses Snapdragon. Dans d'autres cas, comme Apple (et Qualcomm et Samsung dans une certaine mesure), le client d'Arm paye une licence pour concevoir son propre CPU, ce qui élimine a priori le problème des royalties, sans que les détails soient connus, encore une fois.

Une hausse des royalties ne va pas plaire à tout le monde

Le problème, selon l'article du Financial Time, c'est que la nouvelle manière de calculer risque de plomber les comptes de certaines marques. Nos confrères citent un fabricant de smartphones chinois qui indique que le montant pourrait être plusieurs fois plus élevé qu'actuellement, ce qui serait évidemment un problème.

Et actuellement, il n'y a pas véritablement d'alternatives dans certains domaines. S'il reste possible de se tourner vers d'autres types de puces pour une partie des usages — RISC-V, par exemple nous en reparlerons bientôt —, ce n'est pas réellement le cas dans les smartphones. Pour en fabriquer un sous Android, la seule solution viable est une puce ARM. Si l'OS est compatible x86 en théorie, Intel et AMD n'ont pas de puces compétitives pour cet usage, et la version RISC-V de l'OS n'est pas attendue avant plusieurs années, sans même prendre en compte le fait que les systèmes sur puce actuels ne rivalisent absolument pas avec les ARM modernes.

Si de grosses sociétés comme Qualcomm ou Samsung pourraient se permettre de repartir vers une conception en interne — et c'est tout le sujet du procès entre Arm et Qualcomm — la majorité des sociétés qui intègrent des CPU de chez Arm n'ont pas les compétences ou le budget nécessaires. Et ils devront donc d'une façon ou d'une autre probablement gérer la hausse des royalties… en vous faisant payer la différence.

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avatar reborn | 

Ça ressemble au modèle de Qualcomm avec les modems non ?

avatar Rez2a | 

Question sans doute idiote : on est sûrs que ça concerne également Apple ? Il me semble qu’ils disposaient d’une licence perpétuelle en tant que cofondateurs de ARM ?

avatar appleadict | 

@Rez2a

"cofondateurs de ARM"

ARM sortait le BBC quand Apple sortait l'Apple 2 , basé sur un 6502 ... pas certain qu'Apple ait été cofondateur de ARM

avatar Rez2a | 

@appleadict

C’est Acorn qui sortait le BBC, et c’est l’autre cofondateur de ARM avec Apple si je ne dis pas de bêtise :)

avatar House M.D. | 

@appleadict

Cofondateur, non… par contre, au moment où Acorn, filiale d’Olivetti, était dans un état si catastrophique que le petit créateur risquait de disparaître, Apple est arrivé et a injecté de quoi sauver ARM de la faillite, tout en prenant 30% des parts (revendues depuis). Les 2 autres « gros » étaient Acorn qui gardait 30%, et VLSI qui mettait aussi au godet (mais 6 fois moins qu’Apple, et donnait des outils et des connaissances en contrepartie) pour les derniers 30%.

avatar Rez2a | 

@House M.D.

Ah je crois que je vois d’où vient ma confusion, l’entreprise ARM dont on parle aujourd’hui à bien été fondée en 1990 par Acorn, Apple et VLSI, mais le sigle ARM désignait précédemment le projet de Acorn.

Apple a l’air d’avoir fait un peu plus que jeter quelques millions dedans quand même, le premier CEO d’ARM était un VP de chez Apple.

avatar House M.D. | 

@Rez2a

La manœuvre de sauver ARM vient de l’idée de deux ingés d’Apple qui s’amusaient bien avec un ARM2 😉

avatar Adodane | 

Je que j'ai lu c'est que Apple voulait un processeur pour son Newton, VLSI qui fabriquait les puces ARM à suggéré la petite entreprise anglaise à Apple. Une joint-venture fut crée.

Les puces pour le Newton a été la première grosse rentrée d'argent pour ARM, avec 20$ de royalties par puce et les plus de 60000 Newtons vendus.

La machine était lancée.

avatar House M.D. | 

@Adodane

C’est aussi une variante de l’histoire, qui s’adapte bien avec l’autre « version »… en gros à deux on a la totalité ;)

avatar BeePotato | 

@ appleadict : « ARM sortait le BBC quand Apple sortait l'Apple 2 , basé sur un 6502 ... pas certain qu'Apple ait été cofondateur de ARM »

Chipotons, chipotons… 🙂
Le BBC n’est apparu que plusieurs années après l’Apple II, qui était déjà sorti avant même la création d’Acorn.

Et Rez2a, comme il l’a précisé ensuite, parlait bien de l’entreprise ARM (créée plus tard, effectivement en partenariat avec Apple, pour poursuivre le développement et la commercialisation de la gamme de processeurs créés par Acorn) et non d’Acorn.

avatar Insomnia | 

@Rez2a

Je doute que Apple ait pu récupérer une licence perpétuelle 😌

avatar House M.D. | 

@Insomnia

Elle n’en a pas le nom, mais elle en a la saveur. Pour avoir sauvé ARM de la faillite, ils ont une licence « spéciale ».

avatar Insomnia | 

@House M.D.

Elle n’a même pas la saveur, proposer une licence éternel serait un suicide pour ARM ou toutes autres entreprises 🫥

avatar House M.D. | 

@Insomnia

Il est des choses qu’on peut difficilement refuser à son repreneur… après ce ne sont que spéculations, les termes de la licence accordée à Apple étant non publics. Ceci dit, on sait déjà qu’elle est bien plus accommodante que celle proposée aux autres.

avatar Insomnia | 

@House M.D.

Certes mais il ne faut pas oublier que Apple n’est pas le seul client de ARM si un tel contrat avait été émit ARM risque de prendre très cher surtout quand celui ci décide de changer la donne. Dans tous les cas ARM se tire une balle dans le pied, à force de demander plus les constructeurs vont finir par accélérer le développement de l’architecture RISC V pour mettre un coup dans ce monopole.

avatar Fredouille14 | 

@Insomnia

Enfin, une autre architecture, pourquoi pas, mais quand et à quel prix ?
Il faut aussi de sacrées compétences à la fois matériel et logiciel

avatar Insomnia | 

@Fredouille14

Apple s’y intéresse déjà c’est bien qu’il tente de trouver une autre solution

avatar DahuLArthropode | 

@Insomnia

"Dans tous les cas ARM se tire une balle dans le pied, à force de demander plus les constructeurs vont finir par accélérer le développement de l’architecture RISC V pour mettre un coup dans ce monopole."

Je pense que c’est déjà en route, mais les finances et la spéculation ont le trimestre pour horloge, alors que le développement se compte en années. Il y aura une alternative compétitive face à ARM un jour ou l’autre. Il faut donc tirer tout le potentiel financier de l’avantage d’ARM tant qu’il existe.

avatar DrStax | 

@Rez2a

Il n’y a jamais de question idiote ceci dit une lecture entière de l’article répondait à la question ☝️

avatar Rez2a | 

@DrStax

Effectivement, je ne sais pas comment je me suis débrouillé pour rater la phrase qui répondait à ma question, désolé !

avatar iPop | 

@Rez2a

Sans oublier que Apple conçoit elle même ses design. Elle n’a que la licence d’utilisation.

avatar Pierre Dandumont | 
Ben c'est expliqué : Apple paye probablement pas de royalties pour les puces principales
avatar Adodane | 

@Pierre Dandumont

Les royalties sont reportées, Macron l'a dit.

avatar Dr. Kifelkloun | 

ARM voudrait plus de royalties sur ses puces

Mon chien aussi.

avatar Fredouille14 | 

@Dr. Kifelkloun

😂

avatar Mrleblanc101 | 

2% d'une puce a 40$ vs 2% d'un téléphone à 1000$, clairement les % serait ajustés sinon personne n'accepterais

avatar sisl12 | 

Ce qui va être génial est le fait de définir quel est le produit final…..
Prenons un carte graphique avec un chip ARM.
Le produit final est la carte graphique ou le PC livre avec cette carte?
😵‍💫

avatar FrDakota | 

Est-ce que Raspberry va souffrir ?

avatar Patrick_C | 

Dans le schéma explicatif, il est indiqué que les fabricants ne pourraient vendre qu’à des clients ARM. Je ne suis pas certain que ce truc tienne la route juridiquement.

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