Après 8 ans passés à monter sur PC avec Adobe Premiere Pro, Viva la Zoom a basculé sur Final Cut Pro X. Cette petite entreprise de Manchester, spécialisée dans les films institutionnels, les reportages en entreprises et l’événementiel, a expliqué ses motivations dans deux billets publiés ces derniers jours.
Cet "AdobExit", comme l’ont surnommé en plaisantant les responsables de Viva la Zoom, en référence au Brexit qui agitait le Royaume-Uni au même moment, a été un choix cornélien. Le logiciel d’Adobe était utilisé depuis les débuts de l’entreprise en 2008, au sein d’une équipe complètement versée dans Windows.

Le switch d’Adobe vers Apple a démarré il y a six mois, explique Guille Ibanez, le fondateur de l’entreprise. Une décision difficile, car centrée autour de deux débats : celui du matériel avec le passage sur Mac et celui du logiciel avec l’abandon du Creative Cloud.
Guille Ibanez est un utilisateur averti des solutions de montage. Il a commencé avec Premiere 4.2 en 1998, tâté brièvement du logiciel d’Avid, puis de Sony Vegas Pro. Il a été tenté de basculer vers Final Cut Pro 7 lorsque le logiciel cartonnait auprès de ses pairs, mais étant avant tout un utilisateur de PC et de Windows il s’est fixé sur Premiere avec la Creative Suite 2. Le logiciel d’Adobe était « élégant et paraissait fonctionner parfaitement bien », de plus il était bien intégré à After Effects et Photoshop, grâce au principe des liens dynamiques qui permettent de travailler sur un même projet au sein de ces différentes applications avec un minimum de manipulations.
L’arrivée du Creative Cloud n’a pas inquiété outre mesure l’équipe. Ils se sont posé la question de ce qu’il adviendrait de leurs fichiers et leurs archives s’ils arrêtaient un jour leur abonnement ou s’ils allaient voir ailleurs, mais cette réflexion a été remise à plus tard. Le saut dans le Creative Cloud s’est fait avec les deux pieds et les avantages étaient palpables : « On pouvait utiliser n’importe quel logiciel, développer de nouvelles compétences, en améliorer d’anciennes avec des logiciels toujours à jour. Et dans l’ensemble, tout a fonctionné correctement ».
Mais de petits problèmes ont commencé à entamer cette confiance dans ces applications. Des rendus qui échouaient ou des plantages de la machine par exemple. Est-ce que le matériel utilisé n’était pas trop ancien ? Devant la perspective de devoir changer de PC, l’équipe a été tentée de carrément passer sur Mac.
Pourquoi ? Simplement parce que nous avions toujours travaillé sur de grosses stations de travail qui, bien que puissantes et fiables, prenaient beaucoup de place, étaient bruyantes et obligeaient constamment à bricoler avec le matériel (cartes graphiques, disques internes, etc). C’est vrai que l’on peut en avoir pour son argent en termes de puissance avec un PC, mais il arrive que l’on finisse par se sentir esclave du matériel. Nous avions envie de simplicité. Et qui se débrouille bien pour la simplicité ? C’était difficile à admettre pour un fan de Windows comme moi, mais oui, Apple semblait faire des machines sympathiques.
Du PC à l’iMac
L’équipe de Viva la Zoom a jeté son dévolu sur un iMac 5K qui venait de sortir pour tester la faisabilité de cette migration (l’auteur ne mentionne jamais le Mac Pro). Cet iMac n’était pas forcément le mieux disant pour la puissance au vu de ses caractéristiques, mais l’écran était du meilleur niveau et la machine répondait à cette envie d’une configuration moins compliquée.

Le design de l’iMac s’est révélé un bon point pour l’encombrement. Ensuite, plutôt que d’avoir une tour PC remplie de supports de stockage, la conception assez fermée du monobloc d’Apple a poussé Guille Ibanez à lui adjoindre des disques externes USB 3 et Thunderbolt. Lesquels ont servi de supports de travail par défaut (le disque interne de l’iMac s’avérant rapidement trop juste).
Du coup, il était plus simple de partager ces fichiers entre les machines du studio, en s’échangeant les disques, ou pour emmener l’un de ces disques chez soi pour continuer un montage, « là où précédemment j’aurais eu des copies et des fichiers dupliqués, rendant le suivi d’un projet et de ses médias beaucoup plus difficile ».
De Premiere à Final Cut Pro X
Dans son deuxième billet, Guille Ibanez distribue les bons et les mauvais point à chacun de deux logiciels. S’agissant de Premiere Pro, il cite le principe du Creative Cloud qui donne un accès complet à toutes sortes de logiciels que l’on peut utiliser à volonté, ne serait-ce que pour se perfectionner. Il parle ensuite des liens dynamiques pour travailler sur un projet entre les différentes applications d’Adobe sans être obligé à chaque changement de se lancer dans un long rendu des opérations effectuées. Il apprécie les outils traditionnels proposés pour la colorimétrie, un peu moins les fonctions de correction audio (mais il y a Audition CC pour cela) et enfin, c’est une solution Mac et PC, ce qui peut servir.

Malheureusement, l’utilisation de Premiere Pro a été fréquemment entachée de petits bugs et d’instabilités aléatoires. Des dysfonctionnements qui persistaient même après une succession de mises à jour majeures de l’outil. Le matériel n’était pas responsable au vu de témoignages similaires lus ici et là. Des bugs qui vont de l’anecdotique (un ctrl+clic sur l’un des écrans affiche le menu sur l’autre) aux problèmes plus lourds avec la fonction multicam, les liens dynamiques qui ne marchent pas toujours comme attendu, des rendus qui parfois échouent sans raison claire, etc (détails).
Et puis il y a le coût récurrent associé à la souscription au Creative Cloud. Pour un tarif à peu près égal, on peut utiliser FCP X, Motion et Compressor "à vie" alors que cela représentera moins d’une année d’utilisation du Creative Cloud. Le nuage d’Adobe est certes bien mieux rempli que la besace d’Apple mais, dans le cas de Viva la Zoom, seule une fraction de ces applications est utile au quotidien.
Le passage à Final Cut Pro X a été assez difficile les premières semaines « au point que l’on a failli abandonner », poursuit le dirigeant de la petite société, mais la logique du fonctionnement de l’application a fini par s’imposer et être appréciée, jugée somme toute plutôt intuitive.
Il faut cependant commencer par apprendre un nouveau vocabulaire, prévient Guille Ibanez, car FCP X et Premiere Pro ont des termes différents pour des éléments ou des actions identiques. Puis il faut oublier quelques fondamentaux des logiciels de montage non linéaire pour s’habituer à la la timeline magnétique d’Apple (« on l’aime ou on la déteste »).

Le monteur cite d’autres bonnes surprises de FCP X, comme la sauvegarde permanente sans action de l’utilisateur (pratique pour retrouver son travail où on l’avait laissé en cas de plantage), une grande réactivité sur cet iMac alors que Premiere Pro était plus capricieux, la possibilité d’ouvrir plusieurs projets en même temps, ou encore les classements des prises de vue dans le chutier avec des dossiers basés sur les mots-clefs. Enfin, il y a le prix réduit de cette application, sans location d’aucune sorte.
Final Cut Pro X est un logiciel fiable, constate Guille Ibanez, sans fioritures ni fonctions à moitié finies. Il a toutefois son lot de petits défauts. Il mentionne par exemple le mixage audio plus compliqué que dans Premiere Pro en l’absence de pistes sonores dédiées dans la timeline.
L’absence de courbes pour la correction colorimétrique l’a surpris. L’outil proposé est trop basique pour régler correctement l’exposition et les couleurs, il s’est donc tourné vers des plug-ins tiers. La timeline magnétique impose aussi de beaucoup jongler avec les outils d’édition, un peu trop, à son goût. Laborieuse aussi est l’insertion de transitions.

Premiere Pro demeure un outil puissant, capable de tout faire et si l’on a jamais eu de véritables problèmes avec, il n’y a pas lieu de l’abandonner. À l’inverse, la récurrence de bugs agaçants associée au coût de la location ont fini par pousser Guille Ibanez dans les bras de Final Cut Pro. Les quelques dos-d’âne rencontrés au fil de la route avec le logiciel d’Apple n’ont pas été suffisamment gênants pour remettre en question ce switch, conclut-il.
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