Tim Cook et la stratégie d'Apple

Christophe Laporte |
Tim Cook a participé hier à la conférence Goldman Sachs Technology and Internet. S’il a participé à plusieurs reprises à cet événement organisé par la banque d’affaires, c’est la première fois qu’il intervient en tant que PDG. Pas de déclarations fracassantes bien entendu de la part de Tim Cook, mais des précisions sur la stratégie d’Apple et les différents dossiers chauds du moment…




Les conditions de travail des ouvriers chinois
En début de semaine, Apple annonçait par voie de presse qu’elle avait demandé à la FLA de mener un audit indépendant de ses prestataires chinois (lire : Apple diligente une enquête de la FLA en Chine). Ce choix est critiqué par certains, notamment par Sarah Ryan, l’une des responsables de Sumofus.org, qui milite pour qu’Apple revoie en profondeur sa politique de sous-traitance. Dans un entretien au magazine Wired, elle affirme que la Fair Labor Association « n’a pas un bilan très brillant concernant ses inspections ».



Tim Cook, pour sa part, a tenu à rappeler qu’Apple prend soin de l’ensemble de ses employés que ce soit en Amérique, en Europe ou en Asie. Il a déclaré avoir passé beaucoup de temps dans les usines, et pas uniquement en tant que dirigeant. Une manière de dire qu’il est parfaitement au courant des conditions de travail sur les chaînes de fabrication. Et d’affirmer qu'« aucune société dans notre industrie ne fait autant d’efforts qu’Apple pour améliorer les conditions de travail [des ouvriers] ». Apple agit selon lui avec transparence et met tout en oeuvre pour que ses partenaires se plient à ses exigences.

Le code de conduite d’Apple est le suivant : tous les travailleurs ont le droit à des conditions de travail sûres et équitables, sans discrimination. Ils doivent pouvoir gagner un salaire compétitif et avoir la possibilité d’exprimer librement leurs préoccupations. « Les sous-traitants d’Apple doivent faire avec si ils veulent faire affaire avec Apple », a déclaré Tim Cook.

Et d’ajouter : « notre code de conduite est de limiter la durée de travail à 60 heures ». Tim Cook reconnait que cette consigne n’a pas toujours été respectée, mais qu’Apple avait procédé à un certain nombre de changements en début d’année pour contraindre ses partenaires à s’y conformer. Et cela semble déjà porter ses fruits selon lui. En janvier, Apple a recueilli des données hebdomadaires d’un demi-million de travailleurs sur sa chaine d’approvisionnement. Le taux de conformité était en hausse à 84 %. Apple publiera ces statistiques, ainsi que d’autres de manière à ce que tout un chacun puisse se rendre compte des progrès effectués, et ce sur base mensuelle.

Tim Cook a par ailleurs déclaré que « l'utilisation de main-d'œuvre trop jeune est odieuse ». La chose est extrêmement rare dans les chaines d’approvisionnement d’Apple. La priorité de Tim Cook est d’éradiquer totalement ce phénomène.

37 millions d’iPhones vendus. C’est potable !
Lors de cette conférence, Tim Cook s’est même payé le luxe de faire rire son audience et de donner des sueurs froides sans doute à certains de ses concurrents. En effet, il a déclaré que vendre 37 millions d'iPhone en trois mois était tout juste « potable dans le marché actuel ». Et de rappeler qu’Apple avait une belle marge de progression, arguant que « seuls » 9 % des téléphones vendus étaient estampillés d’une pomme.

D’autre part, Apple a à peine attaqué certains marchés en plein développement, comme la Chine ou le Brésil. En Chine justement, Apple a connu un succès impressionnant : les ventes d’iPhone sont passées d’une année sur l’autre de quelques centaines de millions de dollars à 13 milliards de dollars.

De plus, l’effet halo fonctionne selon lui à plein régime. Grâce au succès de l’iPhone, les ventes de Macintosh en Chine ont bondi de plus de 100 %. Si Tim Cook reconnait volontiers que le Mac part de loin dans l’Empire du Milieu, ce chiffre selon lui est à comparer avec les dix petits pour cent de croissance en moyenne en Chine.

Si la Chine a beaucoup occupé Apple ces derniers temps, Tim Cook cible depuis quelques mois de nouveaux marchés : le Brésil et la Russie.

Tim Cook dirige Apple avec son iPad
« 80 à 90 % de mon temps à travailler ou à consommer des médias est passé sur l'iPad » a expliqué Tim Cook. Avec ce chiffre, le CEO d'Apple tenait à renforcer son argument selon lequel les tablettes vont très vite prendre la relève des ordinateurs personnels « conventionnels » — le Mac y compris.



Les chiffres sont il est vrai en faveur de l'iPad : au quatrième trimestre calendaire 2011, Apple a vendu autant de tablettes que HP a vendu de PC. La firme de Cupertino a écoulé 55 millions d'iPad en sept mois — il lui a fallu trois ans pour vendre autant d'iPhone, cinq ans pour vendre autant d'iPod et… 22 ans pour vendre autant de Mac.

Et dans le succès de l’iPad, Tim Cook voit déjà se dessiner un nouvel effet halo : « La raison du succès de l'iPad est qu'il repose sur tout ce qui a été mis en place avant lui. Avant l'iPad, l'iTunes Store et l'App Store étaient déjà en fonctionnement. Les gens étaient déjà habitués à l'iPhone, ils connaissaient le multitouch. Donc vous pouvez littéralement donner un iPad à n'importe qui sans courbe d'apprentissage: j'en ai donné un à ma mère, et elle savait l'utiliser après avoir regardé les publicités ».

L'iPad est d'ores et déjà concurrencé par une myriade de tablettes Android et le Kindle Fire, fait que reconnaît volontiers Tim Cook. Reprenant un argument classique d'Apple, il ne croit cependant pas que la concurrence tarifaire puisse avoir un impact sur l'iPad : « au final, les gens veulent un produit de qualité. […] Je crois [qu'Amazon] va vendre beaucoup [de tablettes]. Mais nos clients ne peuvent se satisfaire d'un produit aux fonctions limitées. » Le patron d'Apple semble prêt à jouer la carte Amazon contre Google et notamment Samsung : « tant que les gens inventent leurs propres solutions, j'aime la concurrence. »

Cook a expliqué que l'iPad permettait à Apple de toucher de nouveaux publics et de pénétrer de nouveaux marchés, comme l'iPhone avant lui : « en 2007, […] le chiffre d'affaires d'Apple en Chine et dans le reste de l'Asie, en Inde, en Europe de l'est, au Moyen-Orient, en Afrique et en Amérique latine était de 1,4 milliard de dollars. L'an dernier, le chiffre d'affaires dans ces mêmes pays était de 22 milliards de dollars. Nous n'avons qu'effleuré la surface. » L'iPhone et l'iPad ont percé sur ces marchés où l'iPod s'était cassé les dents « parce que les gens commençaient déjà à se procurer de la musique avec leurs téléphones. » ; plus polyvalents, iPhone et iPad deviennent peu à peu incontournables.

Que faire avec 98 milliards de dollars en cash ?
De nombreux analystes parient que la firme de Cupertino versera ses premiers dividendes depuis 1995 d’ici la fin de l’année. La question est toujours à l’étude au sein du conseil d’administration d’Apple. Tim Cook a demandé un peu de patience et a affirmé qu’il prendrait la meilleure décision dans l’intérêt des actionnaires.

Un versement des dividendes n’est pas la seule option qui s’offre aux dirigeants d’Apple. Un rachat d’actions n’est pas à exclure !

Apple TV : l’éternel hobby
« C’est un produit cool et je ne pourrais pas vivre sans ». Voilà comment Tim Cook présente l’Apple TV, dont les ventes augmentent gentiment : 3 millions d’exemplaires vendus l’année dernière, dont la moitié quasiment lors du dernier trimestre.

Mais pour Tim Cook, ce petit boitier n’a pas le potentiel du Mac, de l’iPad, de l’iPhone ou de l’iPod, d’où l’appellation de hobby. De manière générale, Apple n’aime pas les hobbies. « Nous pensons que nous devons nous focaliser et travailler sur un nombre restreint de choses ». Pour des raisons expliquées mille et une fois, l’Apple TV ne peut s’imposer sur son marché (lire : Steve Jobs : Le PC est un camion).



Si Apple continue de persévérer avec son éternel hobby, c’est pour deux raisons : d’une part, les utilisateurs de cet appareil en sont extrêmement satisfaits ; d’autre part, il y a chez Apple l’intuition que cela peut éventuellement déboucher sur quelque chose de plus gros. « Nous avons besoin de quelque chose qui soit plus grand public pour que cela devienne un produit sérieux ». Une manière pour Tim Cook d’évoquer l’objet auquel se branche l’Apple TV ?

iCloud : 100 millions d’abonnés
Siri et iCloud, c’est du sérieux. Tim Cook a été clair là-dessus. Il s’agit de deux technologies qui s’inscrivent sur le long terme. Le successeur de MobileMe compte déjà plus de 100 millions d’utilisateurs.

Par ailleurs, Tim Cook est persuadé que Siri va changer profondément la manière dont nous interagissons avec les machines. Tout comme pour l’Apple TV, il affirme qu’il ne pourrait pas vivre sans…

Tim Cook ne veut pas modifier l'ADN d'Apple
Tout au long de la conférence, Tim Cook a expliqué qu’il tenait à ce que la culture et la stratégie d’Apple n’évoluent pas. L’homme a en quelque sorte récité le « petit Steve Jobs illustré » : « nous devons nous focaliser sur un nombre restreint de choses », « nous devons aller sur des marchés uniquement où nous pouvons apporter des changements significatifs à la société, et non vendre beaucoup de produits »…

Devant un parterre de financiers, la scène devait être cocasse. Au lieu de parler de profit et de rentabilité, Tim Cook a conclu en affirmant qu’Apple était un « endroit magique » où travailler. Et ce qui le rendait heureux, c’était de voir des gens un peu partout, que ce soit dans la salle, au Starbucks, ou dans les salles de sports utiliser des produits estampillés d’une pomme !
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avatar JPTK | 
[quote]la conférence [b]Goldman Sachs[/b] Technology[/quote] J'ai peur quand je vois ce nom maintenant...
avatar SugarWater | 
@XiliX De ce que je connais de la Chine, on peut manger pour 50 cts mais c'est très spartiate. Genre un bol de riz plus un condiment dans les cantines pour ouvrier. En plus vue que quelques uns s'enrichissent, les prix augmentent beaucoup, beaucoup de choses sont plus cher qu'en France. Du coup il y a un effet d'entraînement et les plus démuni trinque, comme partout.
avatar Orus | 
Vraiment après avoir lu ça, y a encore des gens pour trouver Apple sympathique et cool ?
avatar aimstar | 
Ouai conference GS cest pas top mais regardez le documentaire sur la strategie du choc de naomie Klein et vous comprendrez en partie la strategie dApple on y voit en autre Al Gore, homme du 20eme siecle tres influant et reside au CA dApple. Apple developpe tout a fait ma strategie du choc qui amene a un capitalisme liberal.. Cest dommage car ils innovent et je privilegerais toujours la bonne innovation au prix bas.
avatar aimstar | 
@aimstar : 'Apple developpe tout a fait LA strategie du choc qui amene a un capitalisme liberal.'
avatar expertpack | 
@Marc-Alouettes MS ne s'est pas arreté a DOS, et sans apple , le monde aurait évolué, ineluctablement aussi. faut arreter de considerer apple comme le dieu ayant permis l'evolution des terriens
avatar Marc-Alouettes | 
@expertpack : "faut arreter de considerer apple comme le dieu ayant permis l'evolution des terriens" Tout ce qui est excessif est insignifiant et il faudrait aussi arrêter de dénigrer systématiquement les avancées incontestables que la a permis dans le monde informatique. Pour ma part, je considère que Bill Gates a été utile aussi mais beaucoup moins que Steve Jobs.

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