La vérification de l'âge des utilisateurs des sites pornographiques, une mesure phare du projet de loi consistant à tenter de protéger les internautes, va se contenter pendant au moins six mois d'une solution bancale, tant sur le plan technique que sur le plan pratique. Selon L'informé, l'Arcom a validé l'utilisation d'un numéro de carte bancaire, en attendant de trouver une solution plus pérenne (et plus efficace) comme celle proposée par certains sites de rencontre américains : laisser cette tâche au système d'exploitation.
Nos confrères publient le document de référence de l'Arcom, qui détaille les mesures nécessaires. La première partie indique tout ce qui est nécessaire : un floutage complet tant que l'âge n'a pas été vérifié, une vérification fiable (autre qu'un simple message demandant à l'utilisateur d'indiquer qu'il est majeur, donc), des protections contre le partage de compte, etc. La seconde partie est centrée sur la vie privée, ce qui n'est pas une mince affaire. Enfin, la troisième partie explique que le numéro de carte bancaire est accepté à titre dérogatoire.
Les problèmes de cette possibilité, même mise en place de façon temporaire, sont nombreux. Le plus évident vient du fait que des mineurs peuvent légalement posséder une carte bancaire dès 16 ans (10 ans dans certains cas précis). Les autres viennent du fait que l'Arcom demande une réelle vérification de la carte, par exemple en émettant un paiement de 0 € qui impose une double authentification, et pas uniquement une simple vérification du numéro de la carte. Et cette vérification risque d'amener des vagues d'hameçonnage pour tenter de récupérer des numéros de carte des utilisateurs, avec d'éventuels faux sites pornographiques. Qui plus est, de nombreux utilisateurs tendent à ne pas porter plainte dans ce genre de cas, de peur de devoir expliquer les raisons qui ont pu permettre l'arnaque.
Si cette solution est annoncée comme temporaire, elle devrait malheureusement être mise en place rapidement par les sites français et les sites qui ne sont pas basés dans l'Union européenne car les solutions conformes au référentiel de l'Arcom n'existent pas réellement actuellement. En effet, les sanctions prévues sont assez élevées si les mesures ne sont pas en place : jusqu'à 250 000 euros ou 4 % du chiffre d'affaires mondial (500 000 et 6 % en cas de récidive). Paradoxalement, comme nous l'avons expliqué dans une actualité précédente, l'Arcom aura moins de pouvoir sur les sites qui ne sont pas basés en France mais opèrent depuis l'Union européenne.
Seuls les sites pornographiques français pourront être contraints par l'Arcom. Merci qui ?
Enfin, les utilisateurs pourraient aussi tout simplement se tourner vers un VPN pour éviter d'être localisé en France et donc donner leur numéro bancaire. C'est un mouvement vu récemment dans certains États américains. Des spécialistes ont par exemple montré une demande en hausse pour les connexions (+275 %) en mars dernier au Texas, au moment où Pornhub a été bloqué officiellement dans l'État.
Source : Image d'ouverture