Une année Snow Leopard, est-ce une bonne chose ?

Christophe Laporte |

Invité à commenter en décembre dernier les difficultés auxquelles faisait face Apple en matière de bogues et de failles de sécurité, Phil Schiller avait cherché à minimiser les problèmes :

Nous avons simplement eu une mauvaise semaine. Plusieurs choses sont arrivées, voilà tout. L'équipe mène un audit des systèmes et regarde soigneusement les processus et elle fait un peu de "soul searching" [elle recherche des négligences]. Elle fait tout ce qu'elle peut pour empêcher que cela ne se reproduise.

On rappellera que par la suite, la liste des problèmes rencontrés par Apple s’est encore accrue avec le « batterygate» et de manière indirecte avec les failles Meltdown et Spectre. La coupe est pleine !

Quoi qu’il en soit, cette « mauvaise semaine » va avoir des répercussions sur l’année entière. Des informations d'Axios (opportunes pour Apple ?) indiquent que cette année les priorités seront la stabilité, la fiabilité et la chasse aux bogues, quitte à retarder certaines fonctionnalités, aussi bien pour iOS que macOS.

En ce qui concerne iOS, certains changements dans les tuyaux comme le rafraîchissement de l'interface de l'écran d'accueil et des améliorations d'applications phares sont donc remis à plus tard (lire : Apple va repousser plusieurs nouveautés pour se concentrer sur la fiabilité d'iOS).

Mais est-ce une bonne chose ? Pour les plus anciens, cette décision ravive de bons souvenirs, ceux liés notamment à Snow Leopard, qui jouit d’une excellente réputation (lire : Pourquoi Snow Leopard est-il si populaire ?). Il convient de séparer les deux cas que sont macOS et iOS, qui ne sont pas du tout dans la même situation.

Prenons tout d’abord le cas du système d'exploitation mobile. Il a connu une évolution exceptionnelle, tout comme Android d'ailleurs. Dans l’histoire des systèmes d’exploitation, ce sont sans doute les deux qui ont le plus évolué en une grosse décennie. Qu’Apple s’accorde une pause n’a rien d’infamant. Google a fait de même l’année dernière avec Android Oreo (lire : Android O : cap sur l'Optimisation).

La situation de macOS est sans doute plus difficile à appréhender. D’un point de vue utilisateur, le système d’exploitation du Mac évolue par petites touches. Il serait faux de dire toutefois qu’il fait du surplace. Car Apple est en train de mener une politique de grands travaux. On le voit avec High Sierra qui a changé de système de fichiers, ce qui est tout sauf une sinécure, et avec la montée en puissance de BridgeOS qui sur les machines « hybrides » fait de plus en plus l’interface entre le hardware et macOS (lire : Test de l’iMac Pro 2017 : tout ce que vous n’avez jamais voulu savoir sur la puce T2 et Secure Boot).

Paradoxalement, les versions où Apple mise beaucoup sur la stabilité ne sont pas toujours des longs fleuves tranquilles. Beaucoup l’ont oublié, mais Snow Leopard a connu des débuts difficiles. Vous vous souvenez de ce bogue dans l’installeur qui effaçait le disque dur dans certains cas ? De ces nouveautés qui étaient encore loin d’être fonctionnelles quand la première version est sortie ou encore de ces gains de performances qui n’étaient pas mirobolants ? (lire : Snow Leopard vs Leopard : tests de performances). Mais ce qui rend sans doute Snow Leopard populaire, c’est que d’une part c’est le dernier système d'exploitation qui était encore distribué à l’ancienne, sur CD, et d’autre part que son successeur, Lion, n’a pas laissé un souvenir exceptionnel aux utilisateurs.

Si Apple lève le pied de l’accélérateur, cela ne signifie pas pour autant que les développeurs en feront autant. Au contraire, ils pourraient même être particulièrement sollicités à la WWDC. Et d’une certaine manière, Apple a commencé à « déclencher les hostilités » en leur mettant à disposition un nouvel outil permettant d’analyser plus finement la gestion de l’énergie de leurs apps sous iOS (lire : Batteries d'iPhone : les développeurs ont maintenant leur part du boulot à accomplir).

Certains chantiers sont déjà connus (et en cours) comme la fin annoncée du 32 bits sur macOS qui devrait beaucoup occuper certains éditeurs. L’arrivée toujours au programme de Marzipan devrait également leur offrir de nouvelles opportunités, mais également du travail sur la planche (lire : Marzipan : est-ce une bonne idée d'unifier les apps iOS et macOS ?). Ils pourraient également être invités à revoir l'intégration poussée de leurs apps au système en prenant en compte un système de plug-ins Multiverse exécutés directement par la puce T2.

Pour Apple, cette décision impliquera sans doute un gros travail de pédagogie. Et si elle décide de se concentrer sur la stabilité et les performances, il faudra également inclure deux trois nouveautés qui valent le détour de manière à marquer l’esprit des utilisateurs. Sinon, elle pourrait connaître la même déconvenue que Microsoft il y a plusieurs dizaines d’années de cela avec Excel.

À l’époque, les utilisateurs avaient supplié Redmond pour qu’il se concentre sur la stabilité et les performances de son logiciel phare. Microsoft avait exaucé les vœux de ses utilisateurs, qui une fois le logiciel sorti, s’étaient plaints du manque flagrant de nouveautés de cette version. Bref après les bogues et les failles de sécurité de fin 2017, la ritournelle de fin 2018 pourrait être « Apple n’innove plus ! ».

En attendant, venez-nous dire dans ce sondage ce que vous pensez de la décision d’Apple de se concentrer sur les questions de fiabilité, de sécurité et de stabilité au détriment des nouveautés fonctionnelles.

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