À contre-courant : pourquoi Félix pense que le Mac est une bonne machine de jeu
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Ce type d’application remplace depuis une dizaine d’années les systèmes que réalisaient auparavant les banques à elles seules. Ces systèmes étaient des monuments dignes de cathédrales (et le budget qui allait avec), ils avaient l’avantage d’être taillés sur mesure, mais au fur et à mesure du temps leur coût de maintenance, leur non-modularité, leur dépendance à leur environnement technique (fabricant de serveur, éditeur de base de données...), la lourdeur et le risque qu’implique la moindre modification de code les ont rendus caducs face aux progiciels standards développés par des éditeurs indépendants (dont Delta Informatique est un éditeur majeur).
L’architecture du progiciel est modulaire, ce qui lui permet de s’adapter à toute taille de banque, d’une grande banque possédant un réseau de plusieurs centaines d’agences à une banque plus modeste de quelques agences. Par ailleurs, il est multilingue (et multi-alphabets), multidevises et permet à la banque de faire des transactions 24 h/24 et 7 jours sur 7.
Pourquoi l’avoir porté sur Mac OS X ? Est-ce les dirigeants qui sont Macophiles ou une demande de plus en plus importante de vos clients ?
Le portage sur Mac OS X de la partie client est une initiative interne. Je me suis lancé dans ce portage à la fois pour pouvoir travailler avec un outil que j’apprécie beaucoup (Mac OS X), mais aussi pour démontrer la qualité du code de notre application.
Par ailleurs, j’ai reçu l’encouragement de développeurs et dirigeants de notre société qui voient le Mac comme un système moderne et mature pour un tel progiciel. J’ai la chance de travailler dans un environnement où l’initiative, la recherche de nouvelles solutions sont encouragées.
Le portage s’est révélé vraiment aisé à faire, car Delta Bank est un logiciel conçu à l’origine pour être le plus indépendant possible des solutions de tierces parties. Nos formats de données sont ouverts et documentés, notre interface graphique repose sur Qt et notre code n’est pas lié à un OS ou à un moteur de base de données particulier.
Delta Bank fonctionne actuellement en production dans plus d’une centaine de banques sur des OS variés (AIX, HP Unix, Solaris, Windows NT...), l’ajout de Mac OS X à la liste confirme la versatilité de la solution.
Mais en dehors du simple côté technique de la chose, l’arrivée sur Mac OS X de notre application nous offre les avantages suivants :
- bénéficier de l’esthétique d’Aqua avec notre logiciel pour les présentations et formations avec le client. C’est un détail qui compte ;
- montrer au management que Delta Bank est vraiment indépendant de la plate-forme. Mettre une machine Windows et un Mac côte à côte avec Delta Bank est plus parlant que de faire la comparaison avec Linux ou autre. Les dirigeants des banques connaissent bien Apple et Microsoft, tandis que les autres Unix sont plutôt identifiés comme des OS à ne pas mettre entre les mains de l’utilisateur lambda ;
- permettre l’usage d’un système simple et sûr au niveau du poste client. La sécurité et la vulnérabilité aux virus sont devenues depuis quelques années des soucis majeurs pour l’administration de parcs de plusieurs milliers de PC.
Notre approche est donc pro-active. Mais il n’empêche que le Mac est aussi pris de plus en plus au sérieux par les DSI des banques qui veulent des applications indépendantes de l’OS et voient les atouts de Mac OS X en terme de support des technologies standards liées à ces applications (Java, outils Unix, Unicode, Open Directory...). Par ailleurs, et l’iPod y est parfois pour quelque chose, il est de plus en plus fréquent de voir des cadres continuer leur travail le soir chez eux avec leur propre portable Apple.
Utilisez-vous le Mac pour d’autres projets ou taches ? Si oui, pourquoi et pourquoi faire ?
Nous utilisons le Mac pour diverses choses en interne. Notamment avec les applications suivantes :
- oXygen XML : je ne pourrai pas travailler sans ce logiciel ! C’est un plaisir de faire des documentations DocBook avec, de travailler avec des bases XML, de «versioniser» ses documents avec Subversion. Nous avons une documentation technique (parmi d’autres) de plus de 20 000 pages qui est entièrement gérée avec cet outil en combinaison avec Apache Ant, Subversion et une base eXist.
- DbVisualizer : une application permettant de faire des requêtes SQL sur n’importe quel type de base de données (Oracle, Informix, Sybase...). C’est un des rares outils de ce type qui dispose d’une interface claire.
- Merlin : beau et dispose des fonctions indispensables pour suivre un projet. C’est un des uniques logiciels de cette catégorie qui ne donne pas une impression de lourdeur et de rigidité à l’usage.
- Keynote : indispensable pour une présentation réussie.
Sinon, nous utilisons le Mac pour différents traitements automatisés de vérification de qualité de notre interface graphique et d’exhaustivité de notre documentation. Par exemple, nous avons conçu un script qui sort les éléments à documenter du code source et vérifie (appel à Spotlight) qu’ils existent bien dans notre documentation. Même si une telle solution est envisageable sur un autre OS, le fait que les outils d’Apple soient facilement scriptables nous offre un gain de temps que nous n’arrivons pas à trouver ailleurs.
Quel a été l’élément déclencheur qui a permis de prendre le Mac en considération ? Est-ce Mac OS X ? Est-ce Xserve ?
Sans hésitation Mac OS X. Son architecture Unix, la qualité de son interface, son support des principaux standards sont de sérieux atouts. Notre approche se concentre pour le moment sur le poste client. C’est un point sur lequel les banques peuvent avoir envie de faire des économies et/ou d’améliorer leur sécurité. Pour ce qui est du côté serveur, nous ne l’avons pas encore étudié. Il faudrait pour cela qu’Apple améliore son image en terme de support. Le support est une chose cruciale lors de la vente de serveurs ou de systèmes de stockages à une banque. Or Apple n’a pas encore la crédibilité d’un IBM ou d’un Sun Microsystems dans ce domaine.
Mais si le support d’acteurs majeurs comme Oracle, EMC2 ou BEA s’affirme, les choses peuvent changer.
Dans le milieu de l’entreprise, on parle souvent d’un effet halo avec Xserve RAID à la place de l’iPod ? Quels sont les regards de vos clients sur le Mac ?
Nos clients, il faut l’avouer, ne perçoivent pas encore le Mac comme une machine bonne pour la production. Certes, de nombreux cadres l’utilisent chez eux, mais peu de DSI ont une vraie culture Mac. Si Mac OS X est de plus en plus populaire, c’est plus du côté des développeurs que des techniciens (administrateurs Unix, administrateurs de bases de données, administrateurs réseau, administrateurs de systèmes de stockage...). On n’entend pas encore beaucoup parler des solutions Apple dans les revues et séminaires dédiés à ces profils de techniciens. IBM, Hewlett Package, EMC2 et autres Sun Microsystems y sont omniprésents.
Par ailleurs, pour percer ce type de marché il faut avoir des partenariats avec des grands intégrateurs, des grands éditeurs de progiciels, ce qui n’est pas encore le cas d’Apple.
Donc, pour répondre à votre question, Apple a encore beaucoup de travail à faire pour avoir un effet halo autour de ses solutions de stockages. En tout cas dans la bancassurance. Par contre, la bonne nouvelle c’est que les clients ne disent plus « n’y pensez même pas » lorsque l’on parle de Mac. Le Mac n’a plus cette connotation de système exotique.
Outre le support, qu’est-ce qu’il manque au Mac pour percer de manière significative ?
Certainement, et c’est plus facile à dire qu’à faire, il faudrait une plus forte présence sur les campus universitaires et dans les IUT. Quand une banque embauche un technicien, elle veut qu’il soit opérationnel dans les plus courts délais. Or, aujourd’hui, il sort beaucoup (trop ?) d’administrateurs qui ont appris des réflexes plutôt que des théories. Ils apprennent plus l’interface que les concepts, ce qui les rend captifs de la plate-forme sur laquelle ils ont fait leurs études. Il faudrait trouver un bon compromis entre avoir de bons réflexes (indispensable en production) et une bonne compréhension des concepts sous-jacents (indispensable pour savoir passer d’un système à un autre). Sinon Apple devra faire la même chose que Microsoft ou IBM, s’associer franchement avec les IUT et les facultés.
Il a beaucoup été question de sécurité sur Mac. Comment placez-vous Mac OS X par rapport à la concurrence ?
Ce n’est pas facile de répondre à cette question. Depuis deux-trois ans, il n’y a quasiment plus de problèmes de virus dans les banques, car elles ont sérieusement relevé leur niveau de sécurité (firewalls, limitation des actions des utilisateurs...), mais cela a terriblement pénalisé la liberté et la capacité d’initiative des utilisateurs.
Je pense sincèrement que le Mac pourrait permettre de faire sauter certains verrous qui n’existent qu’à cause des failles de Windows. Théoriquement, et d’après l’expérience récente, Mac OS X est plus sûr.