Après plusieurs mois passés à scruter les pratiques de Google, et à deux semaines de l'élection présidentielle, le Department of Justice (DoJ) a donc décidé de porter plainte contre le moteur de recherche pour abus de position dominante sur le marché de la recherche et de la publicité en ligne (lire : Le gouvernement américain part à la chasse de Google). L'un des enjeux de la longue procédure qui s'ouvre porte sur les relations qu'entretiennent Google et Apple. Le premier verse chaque année au second des milliards de dollars pour être le moteur de recherche par défaut dans Safari.
Selon les estimations du DoJ, Google signe un chèque annuel compris entre 8 et 12 milliards de dollars, ce qui contribue largement à la bonne santé de l'activité « services » d'Apple. Durant la dernière année fiscale, celle-ci pesait 46,3 milliards de dollars (13 milliards au second trimestre 2020) : il serait bien difficile pour la Pomme de se passer de cette manne, mais c'est tout aussi vrai pour Google. En 2019, quasiment la moitié du trafic lié à la recherche de Google provenait d'appareils Apple.
Des documents internes cités par le ministère américain de la justice confirment que l'accord passé avec Apple représente un « canal significatif de revenus » et que si cet accord venait à disparaitre, ce serait un « code rouge » pour Google. Pour l'un comme pour l'autre des partenaires, pas question donc d'enterrer cette bonne entente, validée au plus haut niveau. Tim Cook et Sundar Pichai, le patron d'Alphabet/Google, se sont à nouveau rencontrés en 2018 pour discuter du deal (dont les prémisses remontent à 2005). Cette réunion avait pour but de trouver des moyens de « stimuler la croissance des revenus de recherche ».
« Notre vision est que nous travaillons comme si nous étions une seule entreprise », a confié un cadre d'Apple à son homologue de Google après cette rencontre. Résultat : cette stratégie a permis d'asseoir la position dominante du moteur de recherche aux États-Unis (et ailleurs dans le monde). Même s'il reste possible de modifier le moteur de recherche par défaut dans iOS et macOS, peu d'utilisateurs le font, relève la plainte.
L'accord pluriannuel entre Apple et Google exclut les concurrents d'accéder à un canal de distribution significatif, déplore le DoJ. Si des enchères étaient organisées pour devenir le moteur de recherche par défaut, elles seraient si relevées que seul Google serait en mesure de remporter la timbale.
Peu après le dépôt de la plainte, Google a rappelé les propos de Tim Cook qui, en 2018, affirmait que Google était le meilleur moteur de recherche et que les mécanismes de gestion des données intégrés à iOS permettaient de protéger l'utilisateur. L'entreprise précise aussi que Bing et Yahoo versent un écot à Apple pour apparaitre dans Safari.