ICANN : vers une réelle gouvernance mondiale d'internet

Mickaël Bazoge |

Après des années de controverses, l'ICANN pourrait finalement sortir du giron du département du Commerce américain. Dans un communiqué daté du 14 mars, le secrétaire adjoint au Commerce, Lawrence Strickling, annonce que « le temps est venu de lancer un processus de transition », en ajoutant que « toutes les parties prenantes méritent d'avoir voix au chapitre de façon égale dans la gestion et la gouvernance de cette ressource mondiale ». Une première pour cet organisme à but non lucratif, qui a la charge d'administrer les noms de domaine et l'adressage IP.

La compétence de l'ICANN, créé en 1998 sous l'égide de l'ex-vice président Al Gore (qui émarge au conseil d'administration d'Apple depuis), est contestée depuis des années par l'Union européenne et l'ONU mais jusqu'à présent, les autorités américaines ont su préserver leur tutelle sur la société, basée à Marina del Rey, en Californie. Le département du Commerce lâche donc la bride autour du cou de l'ICANN, alors que les États-Unis sont devenus cette année un des membres du club des « Ennemis de l'Internet ». Ce classement, tenu par Reporters sans Frontières, compte également dans ses rangs Cuba, l'Iran, la Corée du Nord ou la Chine.

Difficile donc de ne pas penser que ce relâchement est l'une des conséquences des écoutes de la NSA, qui ont tendu les relations diplomatiques entre les États-Unis et ses alliés. Le Brésil accueillera une conférence internationale en avril afin de repenser la gouvernance mondiale d'internet.

Une conférence surprise comme le souligne Electron Libre. Le patron de l'ICANN, Fadi Chehadé, et la présidente brésilienne Dilma Rousseff ont décidé de ce sommet en moins d'une heure. Stéphane Van Gelder, président du comité de nomination de l’ICANN, juge qu'il y a « un vrai changement de mentalité [qui] s’opère dans le management. » « Fadi Chehadé bouscule beaucoup d’habitudes, y compris des habitudes de gens qui (dans un environnement très américano-anglosaxon) avaient l’habitude d’être systématiquement consultés et d’être capables de freiner des avancées "non-désirables" », explique-t-il auprès d'Electron Libre.

avatar bugman | 

Je n'ai pas tout compris. :/
Qui veut quoi, pourquoi et où ?

avatar oomu | 

les DNS racines (serveur racine de DNS) que gèrent l'ICANN sont le fondement du système DNS (le Système de Nom de Domaine) qui permet aux machines de trouver un serveur nommé "macg.co" ou "Facebook.com".

Ils gèrent les serveurs qui vont pouvoir aiguiller vers les serveurs des domaines de premier niveau (.com, .net , .edu etc) et les machines des opérateurs internet (ou entreprises ou particuliers qui fait tout chez soi) se réfèrent à eux pour s'informer des grandes modifications.

Les dns racines sont charger de communiquer les adresses des serveurs qui gèrent un domaine donné. Ces informations sont critiques pour en arriver de demande en demande à connaître l'adresse du site que vous voulez lire.

avatar bugman | 

@ oomu : Oui.

D'ailleurs ces serveurs communiquent entre eux. Ce que je ne comprend pas n'est pas la technique mais plutôt le coté "frontière" de la chose. Le choix de serveurs DNS (des entreprises ou des universités les gérants) sont (ou devraient) plus être une question de confiances (de toutes façon, le choix appartient à tout le monde de choisir "sa route" au risque effectivement de scinder l'Internet) qu'une raison politique.
La gestion des DNS devrait être géré par des organismes indépendants, à buts non lucratifs, sans questions politiques ou géographiques.

J'ai vraiment un peu de mal (dans le sens comprendre) avec cet article.

avatar patrick86 | 

Il est bizarre le club des « Ennemis de l'Internet », il manque la France.

--

Si ça apporte du mieux dans la gouvernance d'Internet, plus d'indépendance vis-à-vis des US, c'est une bonne chose. A surveiller tout de même, car ce changement pourrait permettre la mise en place d'un contrôle de la ICANN "type ONU" (une voix par pays) qui ne serait pas une bonne chose, dans la mesure où bon nombre de pays ont très envie (ou sont très tentés) de contrôleur "leur" Internet.

Un bon article sur le sujet : http://www.franceculture.fr/emission-ce-qui-nous-arrive-sur-la-toile-ce-qui-se-passe-a-l-icann-tout-le-monde-s-en-fout-a-tort-20

avatar iRobot 5S | 

Pour ceux qui n'ont pas compris, internet ne sera plus américain (ce sont eux qui l'ont créé, ils l'ont gardés) comme actuellement, mais mondial.

avatar bugman | 

@ iRobot 5S : Effectivement c'est certainement pour cela que je ne comprend pas trop.
L'Internet fait souvent reference (bien qu'il n'est pas que) au WWW (pas à l'AWW).

avatar Manao | 

C'est une bonne chose de déplacer cette gouvernance au-dessus de toute frontière et difficile de pas y voir une relation avec les déboires de la NSA.
Ce sujet passionnant. À suivre de prêt et surtout à "surveiller".
Bon article.

avatar oomu | 

au dessus de "toute frontière" ne veut pas dire laisser lentement la chose être sous le contrôle de l'ONU.

L'ONU est une instance où chaque nation discute de comment imposer LEURS frontières: TOUTES.

avatar oomu | 

à mon sens c'est une mauvaise chose.

-
#Rant Gigantesque#

Le contrôle du DNS root ne sera plus sous la surveillance exclusive du département du commerce des USA (avec qui l'ICANN était en contrat exclusif ).

OR les serveurs racines de DNS sont importants si on souhaite faire de la censure, segmenter internet en des internets séparés, etc.

Les politiciens de tous les pays ou presque (dont l'EU au sens large), principalement Chine, Etats d'Amériques du sud, Etats Arabes Unis et Russie ont milité pour que la gestion des DNS soient sous l'égide de l'ONU. On pense qu'une fois sous l'ONU, il sera facile pour les pays de demander X modifications ou d'orienter son évolution pour - de transparence et + de censure. (ou par exemple avoir la possibilité simple et facile que le domaine .com soit différent par pays)

-
Mon point: jusqu'à présent, les USA n'ont jamais manipulé les serveurs DNS racines pour empêcher la création de nouveaux services, domaines ou sites déplaisant à leur politique internationale ou intérieure. C'est un Etat de droit, avec sa tonne de défaut, mais qui est prévisible et dont les institutions sont stables.

Combien même le département du commerce est évidemment un organe politique, les USA ont continué à maintenir avant tout le net comme quelque chose pour et par l'industrie privée. (par idéologie ou pragmatisme, qu'importe).

Sous cette direction, internet n'a fait que croître (vous en êtes tous la preuve) et les services et contenus se multiplier prodigieusement année après année. Et malgré la supposée influence, ils n'ont pas fait disparaitre The Guardian ou New York Times lors des fuites sur la NSA, la CIA, l'Irak (Manning) ou autre scandale délirant de nos dernières années.

-
Ce ne sont pas les DNS root qui ont permis à la NSA (et les services anglais et français n'oublions pas) de faire de l'espionnage et du ramassage d'information à grande échelle. Ni il y a (pour l'heure) la moindre évidence que les USA auraient manipulé secrètement via l'icann pour tromper les gens vers de faux sites.

-
Pour l'heure les USA vont interdire à l'ICANN d'avoir comme seuls investisseurs un gouvernement ou un consortium de gouvernements, obligeant à ce qu'il y ait aussi des investisseurs privés (ce qui est une bonne chose: faut éviter une totale influence politique).

On est pas encore donc à ce que désirerait par exemple le Bresil, mais c'est un premier pas. (les USA cessent de s'opposer à toute réforme).

-
C'est évidemment une réponse à la pression politique depuis les fuites "Snowden". Mais je ne pense pas qu'on y gagne à politiser et permettre à tous les gouvernants d'avoir une influence sur la base d'internet.

Le net devrait être avant tout privé et libéral. Ce que bon grès mal grès, les USA ont préservé.

QUID quand ça sera l'ONU et les turpitudes de décisions consensuelles où se trouvent des pays puissants et pas très démocratiques ni aimant l'information et la transparence ?

avatar Pan666 | 

@oomu

Sur le fond tu as raison, le contrôle des DNS root est l'une si ce n'est la première clés d'Internet, oui les américains n'ont pas pour l'instant abusé de ce grand pouvoir ou si c'est le cas de manière très discrète.
Par contre à mon avis tu fais fausse route, la situation actuelle ne peut perdurer et finira à long terme par devenir problématique. Le contrôle des DNS root est trop important pour être laissé sous contrôle d'un unique pays, gouvernement. A mon avis la question ici est plutôt comment mettre en place une autorité de tutelle mondiale pour l'ICANN qui préservera la liberté du net ?
Je te rejoins néanmoins sur plusieurs points : la première évidence est de ne pas confier cette autorité uniquement à des pays et donc à des politiques qui ne servent de toutes façon que les intérêts de quelques uns. Les intérêts privés ont le mérite de faire preuve d'un certain pragmatisme qui devrait effectivement limiter les phénomènes de censure et de segmentation mais ne sont pas tout blanc non plus.
Un mélange des deux semblerai un minimum.
L'ONU n'est à mon avis pas une solution, trop noyauter par les trafics d'influences et les conflits d'intérêts.
Ils serait intéressant de définir clairement le rôle et limites du gestionnaire des DNS root. Rôle qui devra s'inscrire dans la garantie du respect des grands principes du net liberté, neutralité des réseaux.
Parallèlement il faudrait imaginer des institutions de contrôle déconnecter du pouvoir politique et des intérêts privés. Personnellement je verrai d'un bon œil qu'on confie ce rôle à des institutions du type reporter sans frontières et autres défenseurs du net (là je rêve tout haut).
Au moment ou le réseau est devenue une ressource en lui même, au même titre que les ressources naturelles ou énergétiques, la mise en place d'une gouvernance mondiale de l'Internet est un vrai défi, certes la solution actuelle fonctionne, malheureusement elle n'offre aucune garantie d'avenir.

Après je dois reconnaître que comme d'habitude au bout du compte on risque fortement de se faire enfumer voire enculer.

avatar Charled | 

Une interview trés intéressante de Fadi Chehade dans l'excellente émission PLace de la Toile : http://www.franceculture.fr/emission-place-de-la-toile-rencontre-avec-le-chef-d-internet-2014-02-22

avatar USB09 | 

Pas sur que ce soit une bonne chose. À partir de là, la neutralité ou la liberté sur le net prendrons un coup.

CONNEXION UTILISATEUR