Retour sur Creative Suite 3

Christophe Laporte |
Avec l'arrivée de Creative Suite 3 sur le marché, Apple peut estimer que la transition logicielle vers les Mac Intel est terminée. Certes, il reste encore Microsoft Office et deux trois autres poids lourds, mais les professionnels de la création n'ont désormais plus d'entraves majeures pour adopter les Mac Pro et autres MacBook Pro. Cependant pour Adobe, la sortie de Creative Suite 3 est loin de se résumer à cela. C'est la première réalisation majeure depuis le rachat de Macromedia par Adobe. L'intégration de logiciels comme Flash ou Dreamweaver à CS3 permet à l'éditeur de San Jose de renforcer son offre. Robert Raiola, Directeur Marketing Adobe Europe, revient pour nous sur la genèse de cette Creative Suite 3.

L'une des choses qui frappent le plus avec cette nouvelle Creative Suite, c'est sa capacité à s'adresser à tous les supports. Qu'en est-il exactement ?

Je suis heureux que vous ayez remarqué cela. C'est au coeur de notre stratégie développement. Cela fait des années qu'Adobe décline toujours le même message, c'est-à-dire que l'on essaie de faire évoluer l'ensemble de nos logiciels graphiques afin de leur permettre d'adresser n'importe quel type de média. On avait initié cela il y a quelques années avec le network publishing.

Fondamentalement, on poursuit la même idée depuis plusieurs années. On cherche à offrir à l'utilisateur les meilleurs outils pour créer de façon très très libre, puis lui permettre le plus simplement possible de réutiliser ses créations sur tous les types de média. C'était notre vision à la base.

Il y avait des éléments sur lesquels nous étions forts et des éléments sur lesquels nous avions plus de difficultés. Le rachat de Macromedia a véritablement permis d'accélérer la mise en place de solutions qui couvrent vraiment le spectre de tout l'univers créatif.

La Creative Suite 3 est sans aucun doute le plus grand chantier de l'histoire d'Adobe. Quelles ont été les contraintes pour amener à bien le développement ?

Ce qui rend cette version particulière, c'est qu'elle nous met face à trois défis importants pour nous.

Le premier est lié à l'ampleur de la tâche : parvenir à synchroniser le développement et la mise sur le marché de l'ensemble des offres destinées au print, à la vidéo et au web. C'est quelque chose qu'on n'avait jamais tenté de faire auparavant. On a bien là au moins trois grandes équipes de développement qui étaient sur des calendriers différents. Le fait de resynchroniser tout et de penser simultanément le développement de tous ces logiciels, c'est quelque chose d'incroyablement complexe à réaliser.

Deuxième défi : apporter un maximum de synergie entre des produits qui, jusqu'alors, avaient vécu des cycles de développement distinct dans des sociétés distinctes. Repenser comment synchroniser les interfaces, comment harmoniser les technologies pour faire en sorte de minimiser les problèmes de compatibilité, comment faire en sorte que chaque produit individuellement bénéficie de suffisamment d'innovations pour que le créatif qui utilise par exemple un logiciel seul ou avec d'autres fournisseurs qui ne soient pas Adobe, soit heureux de l'évolution du logiciel.

Le troisième et pas des moindres, ça a été la prise en compte des nouvelles plates-formes matérielles qui évoluaient au même moment que nos propres développements avançaient. Dans l'univers Macintosh, il a fallu prendre en compte l'arrivée de Mac OS X sur architecture Intel ainsi que Leopard qui est toujours en cours d'élaboration.

Pourquoi avez-vous décidé de porter à nouveau vos solutions vidéo sur Macintosh ?

Adobe s'est donné pour ambition d'être un acteur majeur dans le domaine de la vidéo. Notre objectif est de permettre à l'utilisateur de développer une idée et de la traduire en création sur tous types de médias. Avec l'explosion de la vidéo sur Internet, la vidéo prend de plus en plus d'importance. Étant donné qu'Adobe au travers de la technologie Flash vidéo, est très présente dans cet univers, il devenait de moins en moins possible de pouvoir jouer un rôle important dans cet univers en n'étant que sur l'une des deux plates-formes

Le choix de revenir sur Mac a été pris ou en tout cas a été étudié d'autant plus sérieusement qu'Apple est passé sur Intel. Il y a quelques années, nous avions décidé de réduire nos investissements vidéo sur Macintosh. À cette époque, notre analyse était la suivante : la puissance nécessaire pour le traitement vidéo à l'avenir ne pourrait pas être concurrentielle en dehors de l'univers Intel. Apple a quelque part fait la même analyse en venant sur Intel après beaucoup d'années passées sur une autre architecture. La décision d'Intel nous a permis d'envisager à nouveau notre présence sur Mac. Après, entre la décision et la concrétisation, il se passe du temps.

Votre coup de coeur dans cette nouvelle Creative Suite ?

J'en citerai deux. Mon coup de coeur personnel, c'est InDesign. La raison pour laquelle, c'est InDesign, c'est parce que c'est véritablement un logiciel qui est parti il y a quelques années de zéro, d'une page blanche, qu'on a introduit sur le marché à un moment où n'avions pratiquement aucune part de marché dans l'univers de la publication professionnelle. C'est un logiciel qui n'a pas cessé de s'améliorer, de s'enrichir pour technologiquement être reconnu sur le marché comme le numéro un, mais qui a eu besoin de notre soutien pendant des années pour pouvoir gagner petit à petit des parts de marché.

Aujourd'hui, c'est d'après nos études et les rapports de part de marché, le logiciel qui est devenu numéro un sur le marché. On a toujours cherché à faire d'InDesign, certes le logiciel le plus productif, mais aussi celui qui permet le plus de créativité.

Dans cette version CS3, il y a par exemple des avancées en matière de productivité, qui sont très très fortes telles que le multiplacement d'images ou de texte dans des blocs. Ça, c'est mon coup de coeur.

Je pense que le marché retiendra Photoshop, parce que c'est le logiciel le plus utilisé dans l'univers créatif. Avec cette CS3, on voit l'arrivée d'un Photoshop qui est incroyable, c'est Photoshop Extended qui s'ouvre véritablement sur le futur c'est l'ouverture avec la 3D c'est l'ouverture en dehors de l'univers purement graphique, c'est l'univers de la vidéo, de la retouche d'images à l'intérieur d'une vidéo. Il y a énormément de choses très innovantes dans Photoshop et c'est un logiciel qui est de très très loin à la pointe de l'innovation sur ce marché-là.

Plusieurs études affirment que la commercialisation de la Creative Suite 3 pourrait avoir un impact important sur les ventes de Macintosh ? Qu'est-ce que cela vous inspire ?

J'ai lu les mêmes études. Je pense que c'est tout à fait logique et probable. Il est très difficile de changer de système d'exploitation ou de plate-forme, si on n'a pas d'applications nouvelles. Avoir une application seulement optimisée ne suffit pas. Ce qui est fondamental, c'est d'avoir des applications nouvelles, innovantes et qui tirent parti de la plate-forme. C'est en général ce qu'attendent les utilisateurs pour renouveler leurs outils de production.

Après Creative Suite 3, le prochain gros chantier pour Adobe, c'est Apollo. Qu'avez-vous à nous dire au sujet de cette technologie ?

C'est un très gros chantier qui montre qu'Adobe est une société qui, malgré sa réussite dans certains domaines, ne se repose pas sur ses lauriers et continue d'innover. C'est un chantier très excitant puisqu'il nous met en concurrence avec Microsoft.

C'est une technologie très intéressante pour Apple et le Macintosh puisqu'Apollo permet à un développeur d'adresser l'univers du Mac autant que l'univers du PC. Aujourd'hui, si un développeur a des ressources limitées, il y a de fortes chances pour qu'il se concentre sur l'univers du PC, parce que le marché est plus large.

Avec Apollo, un développeur n'aura pas à se restreindre. Son exécutable fonctionnera immédiatement et de façon identique sur Mac et sur PC. Exécuter de façon identique ne signifie pas qu'on va pas tirer parti de l'interface du Mac et ainsi de suite. Au niveau du codage, on pourra indiquer les spécificités de Mac OS X. Les développeurs vont pouvoir beaucoup plus simplement développer de grandes applications qui tourneront bien sur les deux plates-formes.

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