Témoignages : ils ont abandonné leur Mac pour un PC

Stéphane Moussie |

Quelle mouche pique les possesseurs de Mac qui choisissent sciemment de passer sur un PC Windows un beau jour ? C'était la question de notre dernier appel à témoins auquel vous avez été une cinquantaine à répondre.

Le phénomène est mineur en nombre d'utilisateurs, mais il est particulièrement intéressant car il ne s'est jamais vendu autant de Mac qu'aujourd'hui. Apple est l'un des rares constructeurs, sinon le seul, à résister à l'effondrement des ventes d'ordinateurs. Alors pourquoi des utilisateurs, pour certains de longue date, délaissent maintenant leur Mac pour le meilleur ennemi Microsoft ?

Crédits : Steve Jurveston CC BY

Les prix « horribles » d'Apple

La première raison invoquée n'est pas une surprise, c'est le prix. « Horribles », « scandaleux », « démesurés », « aberrants »... les termes péjoratifs ne manquent pas pour décrire des prix jugés (beaucoup) trop élevés. Gulien88 a vite fait le compte :

 Quand j'ai créé mon PC (Core i5-4690K, 16 Go de RAM, 1 SSD et 3 disques durs, GeForce GTX 970, écran LG 29") j'en ai eu pour 1640 € tout frais inclus. Je me suis amusé à comparer en version Apple. Pour ces performances, cela m'aurait coûté 2 à 3 fois plus cher !

jplogut fait le même constat, mais avec un PC portable :

Portable 15 pouces, Core i5 Skylake, 8 Go de RAM extensible à 32, 1 To HDD, Nvidia GeForce GTX 950, emplacement pour SSD M2 PCIe, et j'en passe, le tout pour 750 €… J'aurais quoi chez Apple ??? […] Je n'ai pas le sentiment d'avoir abandonné Apple, j'ai le sentiment d'avoir été abandonné par Apple !!!!

Pour Link1993, ce sont les machines de milieu de gamme qui posent problème : « Il y a encore 3 ans, vous aviez des Mac intéressants pour 1400-1500 €. Oui les Mac d'entrée de gamme étaient à éviter, mais le milieu de gamme était très bien équilibré. » Difficile de lui donner tort quand on voit l'iMac Retina 21,5" (1 699 €) équipé d'un disque dur par défaut ou le MacBook Pro Retina 13" (1 449 €) n'ayant que 128 Go de stockage en standard.

Il y a 20 ans...

fte, qui n'a pas quitté le Mac depuis 1986, mais qui a un PC en complément depuis quelques années, relativise de son côté ces tarifs élevés. Il explique que si le prix d'entrée est effectivement très élevé, le coût total sur environ 5 ans d'exploitation est « très raisonnable ». Pourquoi ? Parce que la cote des ordinateurs Apple reste élevée sur le marché de l'occasion.

Lorsque je renouvelais une machine l'an, revendant l'ancienne que j'avais augmentée, le coût global restait très contrôlé. La cote à la revente était excellente, et je revendais des machines qui n'existaient pas au catalogue Apple, car sensiblement mises à jour.

Et d'ajouter que ses machines actuelles, qui ont 6 et 7 ans, ont par ailleurs bien vieilli. Reste que si l'on veut garder des machines aussi longtemps, mieux vaut se diriger dès le départ sur des configurations un minimum « musclées ».

Pour en savoir plus :

Des Mac de plus en plus fermés

La deuxième raison n'est pas étonnante non plus pour qui lit les commentaires postés sur MacGeneration lors de la présentation de nouveaux Mac. Il s'agit de la difficulté, voire de l'impossibilité, de faire évoluer une machine après son achat. Année après année, il devient plus compliqué de remplacer la batterie, la RAM ou le disque dur/SSD. Le MacBook parachève ce processus ; tous ses composants sont soudés.

C'est le prix à payer pour avoir des Mac toujours plus compacts et légers. Un prix à payer trop lourd pour certains, comme fte :

Depuis 2010, les nouvelles machines, si elles étaient intéressantes de par les avancées technologiques comme l'USB 3, SSD, Thunderbolt (quoique, après coup, voilà), Retina, venaient avec des limitations nouvelles agaçantes. Et de sauter une mise à jour. Bah, on verra la prochaine génération… Et voilà, sautons une autre génération, puis une autre… Bilan, bientôt 6 ans sans renouveler mes Mac. […]

Je suis un technique, un geek. L'impossibilité de bricoler mes machines me tue. L'aspect monolithique est très pénible. Je veux pouvoir brancher un 34" panoramique sur ma bécane, ce format de dalle est exceptionnel… Je n'ai pas besoin de CPU et SSD rapides, j'ai besoin de GPU rapide(s) et d'un gros SSD… Voilà ce qui m'a poussé loin d'Apple.

MacBook Retina 12". Crédits : iFixit CC BY-NC-SA

Sur son PC, fte va pouvoir remplacer la carte-mère, le processeur et la mémoire pour passer à Skylake, la nouvelle génération de puces Intel. Les composants actuels ne seront pas perdus, ils seront recyclés pour monter un nouveau PC et améliorer son serveur. « Recycler les pièces est un bon moyen de rentabiliser au maximum ces matériels, mais je suis néanmoins curieux de voir le budget sur 5 ou 10 ans, comparé au budget Mac que je connais bien », s'interroge-t-il tout de même.

tophe631 en profite pour faire passer un message aux ingénieurs de Cupertino :

Un petit lien qui pourrait être utile pour les ingénieurs de chez Apple : https://fr.wikipedia.org/wiki/Vis_de_fixation

C'est la page Wikipédia qui explique ce que c'est qu'une vis. C'est un organe mécanique qui permet de faire des assemblages démontables, très pratique pour pouvoir ouvrir les appareils pour les dépanner. Pour certaines utilisations, ça serait plus pratique que de la colle. Par contre je n'ai pas besoin de leur expliquer ce que c'est que la colle ! Ça ils le savent bien, car ils collent tout.

La nostalgie de Snow Leopard

L'instabilité ou le manque de finitions des dernières versions d'OS X est la troisième cause de switch vers le PC. Yosemite en prend particulièrement pour son grade. Il est accusé de ralentir les machines et d'être rempli de bugs. Pour plusieurs utilisateurs, il y a eu une cassure après Snow Leopard, que Jacti idéalise comme « THE SYSTEM et le meilleur jamais conçu, toutes plateformes confondues. »

Crédits : Tambako The Jaguar CC BY-ND

Pour sa part, glop06 se plaint d'iCloud, qui ne tient pas ses promesses selon lui. ll blâme la photothèque iCloud qui lui aurait perdu des photos et la bibliothèque musicale iCloud (Apple Music) qui a mis le « bordel » dans sa musique.

Des machines pas adaptées pour les gamers

Les témoignages déplorant le manque de jeux sur Mac sont moins nombreux, mais pas absents. Il y a bien sûr l'option Boot Camp, qui permet d'installer facilement Windows sur un Mac, mais elle est peu satisfaisante pour les gamers qui ont besoin de puissance. « Sur le marché PC, je vois passer du matériel moins cher et plus performant », observe MrGame&Watch. zorg2000, jpeps71 et Gulien88 confirment que l'on peut profiter à fond des jeux sur PC sans vider son compte en banque.

fte rappelle que ça n'a pas toujours été comme ça sur Mac :

Avant, il y avait l'Apple II et les premiers Mac, et Apple avait une réputation d'avoir des jeux de qualité. Le Mac a été longtemps perçu comme un joli jouet. En face, il y avait des PC sérieux avec tableur. Puis il y a eu Sculley. Il a changé l'image du Mac créatif et ludique pour en faire une machine crédible et sérieuse. En face, le DOS laissait libre accès au hardware, puis Microsoft a proposé une API dans Windows 95 spécialement pour les jeux (et a lancé la première Xbox). Les éditeurs de jeu ont été poussés dehors du Mac par Apple et accueillis par Microsoft.

L'absence de CUDA

Plus spécifique encore, mais pas moins important pour ceux qui sont concernés, l'absence de cartes graphiques Nvidia dans les derniers Mac, tout particulièrement le Mac Pro, et donc de CUDA. Cette technologie répandue dans les logiciels professionnels permet de tirer parti de la puissance de calcul des GPU. zorg2000 détaille le temps que lui fait gagner cette solution :

Mon PC de bureau a une GeForce 970 et mon portable une GeForce 860M, ces deux cartes utilisent Iray (pour du rendu d'images photoréalistes, ndr) de Nvidia et font les calculs en GPU. Pour exemple, un calcul de 2 heures dans DAZ 3D en photoréalisme sur un gros processeur Core i7 ou un GPU Intel HD 5000+ passe à 30 minutes sur la GeForce 860M et environ 5 minutes sur la GeForce 970. Je n'ai plus peur de pousser le curseur en résolution. ATI n'apporte rien à tout cela, Nvidia a beaucoup plus de possibilités que son concurrent. Le choix d'ATI sur Mac me déçoit beaucoup techniquement.

Des switcheurs globalement satisfaits

L'herbe est-elle vraiment plus verte sur Windows, comme le fond d'écran de XP semble l'indiquer ? Globalement, la réponse est oui dans les témoignages recueillis.

Gulien88 explique que l'on peut passer à Windows tout en gardant un pied dans l'écosystème Apple :

Windows synchronise mon compte Apple (contacts, mails, calendriers, historique et favoris navigateur) automatiquement et instantanément. Il faut juste cliquer sur « ajouter un compte iCloud » [dans l'utilitaire iCloud pour Windows], rentrer ses identifiants et terminé.

Le passage sur Windows n'a pas posé particulièrement de soucis non plus à lolodolo. « Cela a impliqué une migration de ma photothèque d'Aperture vers Lightroom, ce que j'aurais dû faire dans tous les cas compte tenu de l'abandon du soft par Apple », indique-t-il.

L'utilitaire iCloud pour Windows

« Windows 10 est étonnamment agréable », déclare fte. Un avis partagé par snake626 et crazy_c0vv, entre autres. Pour dragao13, le PC portable de sa femme à 700 € « n'a rien à envier à [son] MacBook Air au niveau de la stabilité et de la rapidité. Globalement, elle ne regrette pas son Mac, ni OS X. »

MrBingo, qui est aussi passé sur Windows Phone, cite d'autres points forts :

  • Un écosystème qui est — et de loin — plus ouvert que celui de Mac OS.
  • Les Live Tiles, la fonctionnalité phare de Windows Phone, est très bien intégrée, je retrouve cette interface qui m’est familière (d’autres peuvent ne pas aimer, je trouve ça pratique).
  • Rapide et fluide : démarrage, extinction, gestion de la mémoire, tout se fait rapidement et bien.
  • Le centre de notifications ne désarçonne pas quand on vient de Mac OS.

fte, qui ne supporte pas de ne pas pouvoir bricoler les derniers Mac, est aux anges :

J'adore mon PC. C'est la meilleure machine que j'ai eu depuis le Quadra 840 je pense. Je peux sereinement et facilement changer n'importe quel composant, ajouter des bidules, je peux recycler les machins au fil des mises à jour et monter ou mettre à jour d'autres PC en cascade, il a une super gueule et ne fait pas le moindre bruit…

« C'est très cool. Mais n'empêche, ça craint », ajoute fte. Pourquoi ça craint ? Parce qu'il n'avait pas prévu que son PC devienne spontanément sa machine principale.

J'ai, pas plus tard qu'aujourd'hui, déplacé mon interface audio, micro et casque Senn sur mon PC. J'ai mis une année et demi pour déplacer tout ce qui était déplaçable, morceau par morceau, activité par activité, les ultimes petits bouts transférés aujourd'hui. Deux mois avant mes 30 ans de Mac.

Hier j'ai pour la première fois dit à mes collègues que m'envoyer un fichier Keynote ne me rendait pas la vie facile et que je préférais un PDF, un Google Slide ou… un PowerPoint.

Ça craint.

Les inconvénients des PC

Tout n'est pas rose non plus dans l'univers des PC. MrBingo regrette le Finder. Il trouve que l'explorateur de fichiers de Windows a peu évolué (il aimerait notamment des onglets) et qu’il est « bien trop brouillon ». Il n'aime pas non plus les « mises à jour automatiques » (il faut certainement comprendre les mises à jour qui s'appliquent automatiquement lors d'un redémarrage) et le fait de devoir désactiver de nombreuses options pour rendre le système plus respectueux de ses données personnelles.

Les critiques de Link1993 portent sur le matériel : les angles de vision de l'écran, la disposition du clavier et le trackpad ne sont pas aussi bons que sur un Mac… mais son PC Acer coûte 800 €.

Un PC Acer vendu environ 800 €

Il met en avant un autre avantage du Mac complètement différent : son cœur UNIX. « Je déteste le BIOS de Windows, mais je peux passer des heures dans le Bash (un interpréteur de commandes, ndr) de Mac OS ! », s'exclame-t-il. Un avis partagé par iPal, selon qui l'absence de Bash sur Windows est un défaut rédhibitoire pour un développeur.

Le cas Surface

Nous vous avions également interrogé spécifiquement sur la Surface, un produit qui symbolise la nouvelle génération de PC et qui est capable de remplacer les tablettes, selon Microsoft.

C'est au moins le cas pour la femme de dragao13 qui, après avoir essayé un iPad Air 2 et une Surface, a choisi le second. « La raison de son choix : Windows 10 plutôt qu'iOS qu'elle ne trouve pas pratique pour travailler. Et pour elle, avoir le même système sur sa tablette et son PC est un avantage indéniable par rapport à Apple. »

Il ajoute que sa compagne a toujours détesté iOS à cause de certaines limitations : « ne pas pouvoir se connecter via USB sur une clé ou sur un disque dur externe est, pour elle, totalement rédhibitoire vu qu'avec ses collègues, ils n'arrêtent pas d'échanger des données par ce moyen. »

Surface Pro 4 et iPad Pro

1ber, qui est sur Mac depuis 1988 et qui s'était mis au tactile de bonne heure avec le Modbook, a pour sa part hésité entre un iPad Pro et la Surface Pro 4... et a opté pour le produit de Microsoft.

Pour moins d'un kilo, j'ai un appareil ergonomique (le pied est génial), puissant, bien doté en mémoire et en stockage. Il est surtout ouvert : écrans externes, ports USB et cartes mémoire.

Même cas de figure pour Nicolas90340, qui a préféré une Surface Pro 3 à un iPad pour gagner en productivité. « Je fais tourner Lightroom et Photoshop avec des fichiers de plus de 50 Mo en RAW depuis le NAS. Ça fonctionne à merveille. » Il met un bémol toutefois sur l'interface qui n'est pas aussi « rapide » que sur iPad. Et il ne désespère pas de voir un iPad Pro plus efficace grâce à un système optimisé.

Surface Pro 4

Dans un témoignage très complet, snake626 dit tout le bien qu'il pense de la Surface :

Quoi qu’on en dise, ce n’est pas un frigo mixeur, ou tout autre hybride bizarroïde ! C’est surtout un appareil extrêmement polyvalent qui s’intègre à merveille dans mon environnement professionnel pour la prise de notes, pour les outils Microsoft Office bien plus développés que leurs pendants mobiles ou Mac, la possibilité d’y installer des applications professionnelles exigeantes, etc. [...]

Face à l’iPad, je dirais qu’il n’y a quasiment que des points forts : plus polyvalent, plus simple d’exécuter des workflows complexes, possibilité de passer rapidement en mode PC.

Face au Mac, et mon MacBook Pro 15 pouces, je ne retrouve certes pas le confort d’utilisation de la machine d’Apple, ni la même garantie de protection de ma vie privée, mais force est de constater que la capacité de la surface me permet d’empiéter très largement sur celle de mon MacBook Pro.

C’est la machine qui se cale parfaitement entre un iPhone et un Mac (fixe ou gros portable très puissant), presque la tablette ultime, un outil qui entre petit à petit dans mon quotidien et que l’on aura du mal à en faire sortir. Dans un sens ça me rappelle les produits Apple qui se sont introduits petits à petit dans mon environnement Windows avant de tous les remplacer. L’aube d’un renversement de tendance ?

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