macOS Server présente-t-il encore un intérêt ?

Stéphane Moussie |

À quoi sert encore macOS Server aujourd’hui ? Où Apple le mène-t-elle ? Ce sont les questions qui se posent quand on observe les évolutions du système pour serveur, la dernière en date étant le retrait de deux fonctionnalités au profit de High Sierra.

Le déclin de macOS Server

« J’avoue que j’ai du mal à comprendre le mouvement d’Apple, sauf à vouloir intégrer petit à petit toutes les fonctions serveur dans macOS, pour ensuite éliminer complètement l’application, nous confie Guillaume Gete, consultant indépendant spécialisé dans la gestion de parc et le déploiement macOS et iOS. Pourtant ça me semble compliqué car certaines parties n’intéressent clairement pas le grand public ».

Pour Bertrand Pourcel, un autre membre du réseau Apple Consultants Network, la migration des serveurs de mise en cache et Time Machine vers High Sierra est au contraire assez logique. Time Machine était déjà présent dans les Préférences système de macOS et le serveur de cache avait fait une apparition discrète dans Sierra : « Ça évite les confusions pour un utilisateur qui voudrait configurer un petit serveur. Où devait-il aller paramétrer les choses ? Dans Server.app ou dans les Préférences système ? Ça me paraît plutôt cohérent d’un point de vue ergonomique. »

Lion Server : le passage d’un système d’exploitation serveur complet à une application dédiée.

Ces deux retraits succèdent à une longue série de signes de désintéressement de la part d’Apple. Il y a bien sûr eu l’abandon des Xserve en 2010, puis le passage d’un système d’exploitation à part entière vendu au prix fort (à partir de 500 €) à une application très abordable (39,99 € puis 21,99 €) s’installant sur macOS.

Avec le recul, l’objectif n’était pas tant de démocratiser le serveur que de faire passer la pilule de sa dépréciation. « Apple a préféré investir ses ressources de développement vers macOS et iOS, en laissant de côté une partie qui ne devait pas lui rapporter autant… », commente, fataliste, Guillaume Gete.

La montée en puissance des NAS

Le déclin de macOS Server est d’autant plus prégnant que les NAS ont progressé significativement dans le même temps. « Les NAS ont souvent deux baies de disque, coûtent de moins en moins cher, leurs configurations matérielles sont de plus en plus puissantes… Et leurs interfaces web sont désormais très sympas, expose Guillaume Gete. Si vous avez envie d’un support pour gérer vos ressources multimédias, partager des fichiers en famille ou même en pro, un NAS peut tout à fait être adapté. »

« On trouvera des fonctions de partage de fichier, de partage collaboratif (CalDAV), ou de fonctions réseau (DNS, DHCP, VPN) sur des environnements dédiés tels que des NAS ou des Box », confirme Marc Saliou d’iNet System.

Et puis les NAS progressent régulièrement sur le plan matériel, ce qui n’est plus le cas des Mac mini. Le Mac mini Server qui présentait l’avantage de posséder deux disques durs ou SSD a été abandonné en 2014, et les autres modèles n’ont pas évolué depuis cette même année.

Quand les NAS ne sont pas utilisés comme serveur central, ils servent au moins de support de sauvegarde pour les Mac mini en l’absence de RAID interne. Bertrand Pourcel les exploite aussi pour accéder aux données à distance de manière plus sécurisée qu’en accédant directement au serveur. « Il faut mixer les solutions pour en tirer le meilleur parti, et ne pas baser tout sur une seule technologie », explique-t-il.

Malgré tout, les Mac mini sont toujours appréciés pour leur fiabilité. « Je suis assez surpris de la capacité de ces petites machines à encaisser sans broncher 20 a 30 postes connectés sans problème », déclare Bertrand Pourcel, appuyé par Guillaume Gete :

Les Mac mini, c’est du matériel indestructible, sûrement le modèle de Mac le plus fiable que j’ai rencontré. Il dégage peu de chaleur, tient dans un mouchoir de poche, ne fait aucun bruit, et donc peut être installé à des endroits où un serveur n’est pas envisageable. J’ai géré un paquet de Mac mini depuis 10 ans, et le seul gros souci rencontré, c’est le disque dur…

Une pertinence conservée dans quelques domaines

Si macOS Server n’est clairement plus à la fête, il reste néanmoins incontournable pour certaines utilisations. Sa pertinence s’est réduite et elle est aujourd’hui « très limitée », concède Marc Saliou, mais il a toujours quelques atouts à faire valoir.

Le spécialiste met en avant le Profile Manager, une solution ayant peu d’équivalents chez la concurrence selon lui, qui permet de gérer une flotte de mobiles mais aussi un parc de Mac avec des fonctions dédiées de macOS.

« macOS Server est encore à ce jour essentiel pour de nombreux professionnels qui ont besoin de faire tourner une application serveur dédié native (Cogilog, Medistory, Kerio…) », renchérit le consultant Thibaut Metzinger. Et ce ne sont pas les nouveaux partenariats retentissants d’Apple avec les géants du secteur de l’entreprise qui vont changer cela. Les solutions d’IBM, SAP ou Cisco ne s’adressent pas aux petites structures.

Au bout du compte, c’est l’intégration on ne peut plus poussée à l’écosystème Apple qui sauve macOS Server aujourd’hui. Mais son avantage concurrentiel s’amenuise d’année en année et Apple ne fait rien pour rassurer sur son avenir.

Accédez aux commentaires de l'article