Tomb Raider Anniversary

Arnaud de la Grandière |
Malgré l'importance qu'ont prise les jeux vidéo dans la culture populaire sur les vingt dernières années, bien peu nombreux sont les personnages qui peuvent se prévaloir d'avoir atteint le statut d'icône auprès du grand public, tout au plus compte-t-on Pac-Man, Mario, Sonic, et… Lara Croft.



Les joueurs découvrent la jeune Lady britannique en 1996, lorsque le premier volet de ses aventures, Tomb Raider, débarque sur Sega Saturn, MS-Dos, et les disques noirs de la Playstation première du nom. Le jeu reprenait à son compte le gameplay du Prince of Persia d'alors, en l'adaptant à la 3D, et en le mâtinant de niveaux énigmatiques dont il s'agit de percer le secret pour passer à la suite. Le succès est immédiat, et bien vite la belle aventurière ravit le cœur des gamers. C'est l'occasion pour les journalistes spécialisés de rivaliser d'allusions plus ou moins enlevées sur la plastique de la donzelle, dont l'augmentation du nombre de polygones au fur et à mesure des nouveaux chapitres est la "fonctionnalité" première : las, Eidos Interactive se met à traire gaillardement sa vache à lait, vidant le jeu de sa substance et de son intérêt premier.



Douze ans, sept itérations, et deux navets hollywoodiens après, Lara nous revient dans Tomb Raider Anniversary. Le principe est simple : retour aux fondamentaux qui ont fait le succès de la série, mais avec les moyens modernes. Il s'agit donc d'un remake du tout premier Tomb Raider, réalisé à l'aide du moteur de Tomb Raider Legends réalisé par Crystal Dynamics.

Ce qui faisait la spécificité du titre original, outre son héroïne, c'était une ambiance quasi contemplative, nimbée dans une torpeur silencieuse, d'où pouvait surgir le danger à tout instant, et que la musique ne venait interrompre que pour mieux souligner les scènes qu'elle illustrait. Le tout plongé dans des niveaux dont le design font encore référence aujourd'hui : si Tomb Raider faisait figurer une dose d'action, avec force chauves-souris à abattre et sauts de cabri à calibrer au poil de millimètre, c'est avant tout la réflexion qui œuvrait en toile de fond. Activer tel mécanisme, jouer aux vases communicants pour débloquer tel passage, et autres chausses-trappes diaboliques et torturées, tel était le lot de notre aristocrate. La progression de la difficulté de ces puzzles était cependant exemplaire, jouant sur les acquis du joueur au fur et à mesure qu'il pénétrait les temples antiques oubliés.

L'histoire n'a pas changé : Lara est envoyée sur les traces du Scion, un artefact aux pouvoirs dépassant l'entendement, par la richissime Jacqueline Natla, dont le physique disneyien ne laisse aucun doute sur les mauvaises intentions qui l'animent et qui ne manqueront pas d'être révélées par la suite. S'en suivent des tribulations au Pérou, en Grèce, en Égypte, pour finir le périple dans la cité perdue de l'Atlantide. Après tout, qui n'a jamais rêvé de ces mondes souterrains, de ces mers lointaines peuplées de légendes, ou d'une richesse soudaine qui se conquerrait au détour d'un chemin de la cordillère des Andes ? Qui n'a jamais souhaité voir le soleil souverain guider ses pas au coeur du pays Inca, vers la richesse et l'histoire des Mystérieuses Cités d'Or ? Mais je m'égare…

Voilà les bases posées, voyons maintenant comment le remake s'en tire. Graphiquement parlant, comme attendu, la comparaison est sans appel : l'ancêtre prend une claque magistrale et accuse son âge avancé. Que d'aucuns aient pu s'extasier sur l'infâme bouillie de pixels qu'était la Lara d'alors, avec son prisme en guise de poitrine (six polygones en tout et pour tout), en devient pour eux une honte insoutenable.



À tel point que les cinématiques, autrefois en vidéo précalculée, sont cette fois entièrement rendues par le moteur temps réel du jeu (ce qui a pour bénéfice la continuité puisque, comme on le verra plus loin, l'apparence de Lara devient personnalisable).



Les niveaux sont à l'avenant, de toute beauté, et qui plus est uniquement séparés les uns des autres par une fenêtre vous indiquant votre succès, au lieu des culs de sacs à leurs extrémités dans l'original. Mieux encore, TRA se débarrasse de l'effet de "grille" qui arpentait les niveaux, lors des déplacements. De même, les caisses qu'on ne pouvait autrefois déplacer qu'en suivant deux axes orthogonaux peuvent maintenant être déplacées en totale liberté, et comble du luxe en respectant la physique de Newton. Naturellement, le moteur de Tomb Raider Legends comporte toujours la myriade d'effets qui contribuent au réalisme et à l'ambiance du jeu : Lara dégouline de partout en s'extirpant d'un lac, et ses vêtements tout comme sa peau diaphane, nacrée et luisante, mettent un certain temps à sécher. Qu'elle vienne à périr en se fracassant contre une paroi, et ses membres se disloqueront comme une poupée démantibulée, à la faveur d'une "ragdoll" du meilleur effet.



Mais la mise au goût du jour est loin de se limiter à ces quelques peccadilles : les niveaux, bien que reprenant fidèlement le concept du jeu original, ont été entièrement réinterprétés pour tirer le meilleur parti des nouvelles aptitudes de notre archéologue en minishort, qui en a gagné quelques-unes au cours des différents épisodes qu'elle a traversés. Ils sont donc non seulement plus vastes, plus cohérents, mais également plus vicieux… Ces changements ne sont pas dévolus à cette seule cause, notamment pour la cité de Vilcabamba : encore un rêve d'archéologue en 1996, elle a été découverte entre-temps et le jeu en tient compte dans sa modélisation. De même, le contrôle de la belle s'est vu modernisé en adjoignant la souris au clavier, permettant ainsi un plus grand confort et une plus grande souplesse de déplacement. Enfin, de nombreux bonus additionnels sont cachés au travers des niveaux, permettant de débloquer différents secrets, comme des commentaires audio des créateurs, ou des tenues supplémentaires (allant jusqu'à transformer Lady Croft en clone en décrépitude) qu'on pourra équiper à partir de sa garde-robe dans le manoir. Et puisqu'on en parle, le manoir est donc de retour, mais sacrifie quelque peu à la tradition qui faisait de lui l'étape d'apprentissage, dorénavant intégrée aux premiers niveaux du jeu en lui-même (au travers de messages interrompant l'action de façon parfois agaçante). En lieu et place, le manoir devient un niveau en tant que tel, à part du reste du jeu. Une fois que vous aurez déjoué ses mystères, il vous servira donc à retrouver les bonus que vous aurez activés.



Cependant, cette adaptation n'est pas exempte de défauts : les points de sauvegarde s'activent automatiquement, ce qui peut poser problème si vous chutez au mauvais endroit ou si vous passez la sauvegarde à un moment inopportun. Les scènes de combat, qui n'ont jamais été le point fort de Tomb Raider, respectent scrupuleusement celles du jeu original, à savoir qu'elles n'ont qu'un intérêt guère limité, consistant essentiellement à briser la monotonie et à passer du calme à la tempête. L'intelligence artificielle des ennemis est toujours aussi indigente, et il suffit la plupart du temps de s'élever quelque peu pour échapper à leurs griffes tout en les canardant en toute quiétude. Toutefois, il y a bien une légère amélioration pour les boss de fin de niveaux, qu'autrefois on se contentait de cribler de balles : on peut dorénavant s'aider de l'environnement, comme par exemple dans la scène de l'impressionnant tyrannosaure dont on peut attirer la colère vers des piques acérées. Si la gestion des collisions est à des années-lumières de ce que permettait l'original, le charme est parfois rompu par de petites aberrations, toutefois sans grande conséquence. Le jeu est d'autre part intégralement traduit en Français, que ce soit pour les textes à l'écran comme pour la voix des comédiens.

Du point de vue technique, la pléthore de pixel shaders pourrait effaroucher les configurations les moins musclées, pourtant les contrôleurs graphiques GMA, intégrés aux processeurs Intel des MacBook et Mac Mini sont supportés : en réglant les effets au minimum, ces Macs s'en tirent avec honneur, ne souffrant que de légers ralentissements occasionnels, qui n'empêchent toutefois pas le bon déroulement du jeu, comme en atteste d'ailleurs la démo mise à disposition par Feral Software. En revanche, le jeu ne fonctionne pour l'heure que sur les processeurs Intel, l'éditeur britannique a cependant promis une version pour PowerPC dans les mois à venir.

Au cœur du jeu, le plaisir est renouvelé et intact, et si l'on avait oublié pourquoi on se faisait un tel monde de Tomb Raider au cours de ses suites ratées, on en retrouve sans mal le suc médullaire, magnifié par ce ravalement de façade, et on se rappelle pourquoi Tomb Raider fut un grand jeu, de ceux qui posent leur marque indélébile dans la culture vidéoludique. La grâce de notre Indiana Jones en jupons, l'ambiance poussiéreuse des temples millénaires restés jusqu'alors inviolés, le calme d'une réflexion sur une énigme subitement interrompu par quelque féroce quadrupède dont vous avez troublé la quiétude, la majesté et l'exotisme de nécropoles oubliées dont on se persuade facilement d'être le premier à fouler le sol depuis des temps immémoriaux, tout fait de Tomb Raider Anniversary une véritable aventure au sens le plus complet qui soit. Mis à part quelques petits défauts bien relatifs, Tomb Raider Anniversary est un hommage digne de l'original. Que vous ayez goûté aux plaisirs de son ancêtre ou non, précipitez-vous sur ce véritable petit bijou.

avatar macintoshulator | 
Petite question, j'ai une manette 100% PC chez moi, mais j'avais entendu parlé d'un soft il y a quelques année pour faire tourner quasiment toutes les manettes sur Mac. Un nom chers amis ?
avatar nouni | 
j'ai peu d'espoir sur mon macbook non?
avatar lechneric | 
@ macintoshulator USB Overdrive
avatar brume | 
@macintoshulator Soit Gamepad Companion (moins cher), soit USB overdrive (plus complet). (si c'est bien une manette USB) Mais en général beaucoup de manettes sont déjà gérées. Essaie sur la démo. J'ai essayé un peu ce tomb raider, ayant pas mal joué au 1er. Je suis pas encore arrivé trop loin. Je trouve la maniabilité clavier+souris assez ardue, surtout dans les scènes de combat, beaucoup de touches à gérer en même temps (et puis la mighty mouse est un peu pourrie pour le jeu). Je m'y remettrai sans doute avec une bonne manette. En tout cas c'est bien moins figé et mathématique qu'avant et les scènes d'escalades sont un plaisir (et plus besoin de garder une touche appuyée). Pour la sauvegarde je suis d'accord, je me suis retrouvé à refaire 10 fois le passage avec les pics qui sortent du sol en grèce. Le 1er épisode sur playstation avait aussi le basique système de sauvegarde avec les losanges. Donc impossible de sauvegarder quand on veut.
avatar Raff | 
Ben ils ne sont pas si mauvais, ces films. Je ne trouve pas que ce soient des navets… ils n'ont pas la prétention d'être plus intellectuels que le jeu…

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