La Commission européenne frappe fort contre les avantages fiscaux illégaux d’Amazon et d’Apple

Mickaël Bazoge |

Le Luxembourg a accordé des avantages fiscaux indus à Amazon, selon la Commission européenne qui exige du pays la récupération de 250 millions d’euros auprès du géant américain du commerce en ligne. Les aides d’État considérées comme illégales du Grand Duché ont permis à l’entreprise de payer « sensiblement moins d’impôts » que d’autres sociétés, reproche le régulateur européen.

Du Luxembourg avec Amazon…

« Grâce aux avantages fiscaux illégaux accordés par le Luxembourg à Amazon, près de trois quarts des bénéfices d'Amazon n'étaient pas imposés. En d'autres termes, Amazon a pu payer quatre fois moins d'impôts que d'autres sociétés locales soumises aux mêmes règles fiscales nationales », explique Margrethe Vestager, la commissaire chargée de la politique de la concurrence.

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L’enquête de la Commission européenne a débuté en octobre 2014, elle porte sur la période allant de mai 2006 à juin 2014 durant laquelle Amazon a bénéficié d’une décision fiscale anticipative du Luxembourg en 2003, reconduite en 2011. Une douceur qui n’avait « aucune justification valable », et qui a permis au groupe de transférer la plus grande partie de ses bénéfices depuis Amazon EU, la société d’exploitation — qui gère les activités de vente au détail dans toute l’Europe — assujettie à l'impôt au Luxembourg, vers Amazon Europe Holding Technologies, qui ne paie pas ses impôts au Luxembourg.

Amazon Europe Holding Technologies est une coquille vide, ne possédant ni bureau, ni employés et encore moins d’activité commerciale. Cette holding fait l’intermédiaire entre Amazon EU et la maison-mère américaine. Le Luxembourg a autorisé Amazon EU à verser une redevance à Amazon Europe Holding Technologies, réduisant ainsi « sensiblement » les bénéfices imposables d’Amazon EU. Cette redevance est qualifiée d’excessive par la Commission, et elle ne correspondait pas à la réalité économique.

L’UE demande donc au Luxembourg d’exiger d’Amazon le versement du manque à gagner fiscal estimé à 250 millions d’euros, plus les intérêts. Il est à noter que depuis 2014, Amazon a modifié son mode de fonctionnement en Europe, dont la structure ne relève pas de l’enquête de la Commission sur les aides d’État.

… à l’Irlande avec Apple

Cette récupération des aides d’État est aussi au cœur du litige qui oppose Apple, l’Irlande et la Commission européenne, mais à une échelle bien plus importante encore qu’Amazon et le Luxembourg puisqu’il se monte à 13 milliards d’euros. Mais l’Irlande se fait tirer l’oreille pour recouvrer le montant, c’est pourquoi le régulateur assigne Dublin devant la Cour de justice européenne.

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« Plus d'un an après l'adoption de cette décision par la Commission, l'Irlande n'a toujours pas récupéré la somme, ne fût-ce qu'en partie », regrette Margrethe Vestager. La récupération d’un tel montant d’avantages fiscaux illégaux est un exercice complexe, convient la commissaire, mais « les États membres doivent faire des progrès suffisants pour rétablir la concurrence. C'est pourquoi nous avons décidé aujourd'hui d'assigner l'Irlande devant la Cour de justice pour non-exécution de notre décision ».

L’Irlande disposait de quatre mois suivant la notification officielle de la Commission pour s’organiser, soit jusqu’au 4 janvier de cette année. Rien n’a été fait, ou pas grand chose, et l’UE explique que « tant que l'aide illégale n'est pas récupérée, l'entreprise en question continue de bénéficier d'un avantage indu, ce qui explique pourquoi la récupération doit avoir lieu le plus rapidement possible ». Cela fait plus d’un an maintenant que la décision a été prise, et l’Irlande n’a toujours rien récupéré auprès d’Apple.

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