Google et Free : une bataille à coups de tuyaux

Stéphane Moussie |
Les abonnés de Free amateurs de YouTube le savent, il est difficile de regarder une vidéo sur la plateforme de Google dans la soirée, et ce depuis plusieurs mois déjà. L'entreprise IP-Label a mesuré le nombre d'images par seconde sur YouTube selon les heures de la journée et les opérateurs. Les statistiques ont été relevées dans la région parisienne entre le 1er et le 7 octobre.



On constate que le nombre d'images par seconde chute considérablement chez Free à partir de 18 heures (sous les 18 images par seconde, le nombre d'images par seconde au cinéma étant de 24). Orange connaît aussi quelques fluctuations entre 19 h et 22 h, mais dans une moindre mesure. Bouygues et SFR sont quant à eux toujours stables.

Un problème qui n'a pas épargné Free Mobile non plus comme nous nous en faisions l'écho et qui s'étendait même à l'App Store (lire : Free mobile n'aime ni YouTube, ni les Store d'Apple).

Ce n'est un secret pour personne, on sait que ces ralentissements sont les « dommages collatéraux » auprès des abonnés d'un désaccord financier entre Free et Google. C'est l'interconnexion qui est le noeud de l'affrontement. Xavier Niel, patron de Free, avait reconnu lui-même début 2012 que « les tuyaux entre Google et nous sont pleins à certaines heures, et chacun se repousse la responsabilité de rajouter des tuyaux. »

La firme américaine veut installer ses serveurs caches maison, qu'elle juge plus efficaces, dans les installations des opérateurs français. « Comme nos serveurs et notre coeur de réseau sont optimisés pour YouTube, qui pèse 95 % de notre trafic, l'acheminement est moins efficace si nous utilisons les services de livraison de contenus des autres », explique un employé de Google resté anonyme aux Échos. Sauf que les opérateurs s'y opposent pour garder la main sur leur réseau et parce qu'ils ont eux-mêmes de tels services à commercialiser aux géants de l'Internet.

L'UFC-Que Choisir s'est emparé du sujet, comme elle l'avait fait pour l'utilisation du terme « illimité » dans les offres commerciales du même opérateur (lire : Free condamnée pour pratiques commerciales trompeuses), et l'a porté devant la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) et l'ARCEP, le régulateur des télécoms.

L'ARCEP mène depuis quelques mois une étude sur le marché de l'échange de trafic Internet, un marché assez obscur car il renvoit à des « usages et [des] contrats partiellement non écrits et souvent non publics » comme le rapportait Owni. Google se montrerait coopératif sur ce sujet en dévoilant à l'autorité certaines données, sans que cela soit dit officiellement. Une issue à la bataille que se livrent Free et Google n'est en tout cas pas visible à court terme.
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