Uber : la vidéo de l'accident en Arizona soulève de nouvelles questions

Florian Innocente |

La vidéo de l'accident impliquant un véhicule autonome Uber, qui a provoqué la mort d'une cycliste en Arizona, en dit un peu plus sur les circonstances de l'événement mais il soulève de nouvelles interrogations.

Le 18 mars, Elaine Herzberg (49 ans), a été fauchée par une Volvo XC90 appartenant au programme pilote de véhicules autonomes dirigé par Uber, alors qu'elle traversait à pied une grande artère de circulation. L'accident s'est produit vers 22H alors qu'une conductrice était au volant du véhicule.

La scène extérieure, filmée par la caméra de la Volvo, montre la victime en train de marcher en tenant son vélo, alors qu'elle est sur le point de rejoindre le bord opposé de la route.

Le scène se déroule sur un large axe routier, entre deux réverbères. À l'image, la cycliste semble comme sortir de la nuit au moment où la voiture s'apprête à la heurter mais d'autres clichés pris par la suite, au même endroit et à ce moment de la soirée, donnent à penser que les conditions d'éclairage sont bien meilleures que ce que révèle la caméra embarquée.

L'autre moment de cette séquence, toujours fournie par les services de police de la ville de Tempe, montre la conductrice quelques instants avant l'accident. Pour autant qu'on puisse en juger, elle n'a pas les mains sur le volant, ou du moins sur la partie supérieure.

Surtout, à deux reprises, elle porte toute son attention vers quelque chose qui lui fait complètement baisser les yeux de la route pendant plusieurs secondes tandis que la Volvo filait à 61 km/h. Juste avant que son visage n'exprime la surprise au moment du choc, la conductrice avait passé 5 bonnes secondes le regard complètement porté vers le bas, comme le ferait quelqu'un en train de lire.

Dans le cadre d'un programme de mise au point de véhicules intelligents, l'humain est là pour surveiller constamment la machine et palier tout errement de la technique. Tesla, qui a quelque expérience en la matière, a été obligé d'ajouter dans ses voitures de série un contrôle régulier de la présence des mains sur le volant, dès lors que le véhicule est en pilotage automatique.

L'enquête dira si le comportement de la conductrice respectait les règles de conduites édictées par Uber pour ses tests en extérieur. Mais déjà des commentaires s'étonnent des lacunes technologiques de l'entreprise. Uber a une profonde culture de franc-tireur qui déborde peut-être jusque dans la manière dont elle mène ces développements.

À la distraction affichée par la conductrice s'ajoute apparemment une insuffisance notable des capteurs de la voiture qui n'ont absolument pas appréhendé la situation. Ils sont supposés s'affranchir de l'obscurité, les conditions climatiques n'étaient pas mauvaises, la route était pour une large part éclairée, c'était une ligne droite, il n'y avait pas de circulation et la cycliste n'est pas sortie de nulle part puisqu'elle avait déjà franchi la presque totalité de la route.

Un véhicule d'Uber avec ses capteurs sur le toit, dont ceux de télédétection laser

Interrogés par le Guardian des spécialistes en conduite autonome avouent leur incompréhension devant l'incapacité des capteurs laser de la Volvo (les Lidar qu'utilisent ce genre de voitures), à avoir détecté la cycliste en amont. Là, jusqu'au moment fatal rien ne semble venir troubler le système de conduite.

« Les ombres ne sont d'aucune importance pour les Lidar » dit l'un de ces experts : « Il ne fait pas débat qu'ils auraient dû être capables de la voir. ». Un autre y voit la marque de cette culture d'Uber, maintes fois pointée du doigt dans quantité de domaines, où l'on ne s'embarrasse pas de précautions, le tout étant d'arriver premier.

Tesla préfère aujourd'hui les caméras à la télédétection par laser

En février dernier, Elon Musk, le patron de Tesla avait décrié ces capteurs laser qui équipent traditionnellement le toit des prototypes de véhicules autonomes.

Tesla a décidé de les troquer pour des caméras plus classiques, plus discrètes pour le design, dont l'acuité visuelle va en augmentant pendant que leurs prix baissent. Ces caméras et d'autres capteurs sont secondés par des logiciels « neuronaux ».

Une approche plus longue et plus complexe, qui exige qu'elle fonctionne par tous les temps, de jour comme de nuit, mais du point de vue de Musk, elle est plus pertinente sur le long terme.

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