Taxe sur les importations chinoises : Apple pourrait être en première ligne

Mickaël Bazoge |

Poussant toujours plus loin le protectionnisme, Donald Trump a annoncé aujourd'hui qu'il allait imposer des tarifs douaniers sur les importations de biens provenant de Chine, à hauteur de 50 milliards de dollars. On saura dans les prochaines semaines la liste des produits en question, mais il s'agira en majorité de produits high-tech. Comme l'iPhone ?

Il s'agit pour la Maison Blanche de répliquer au transfert forcé de propriété intellectuelle d'entreprises américaines vers la Chine ; les sociétés chinoises exploitent ensuite cette intelligence pour concurrencer les produits américains. Des transferts qualifiés d'« injustes » par les autorités US.

La balance commerciale américaine vis à vis du géant chinois était l'an dernier déficitaire de 375 milliards de dollars. Cela signifie que les États-Unis importent bien plus de produits depuis la Chine que la Chine n'importe de produits américains sur son sol. « Ce que je veux, c'est la réciprocité », a expliqué le président milliardaire. « Quand [la Chine] taxe une voiture [américaine] à 25%, et quand nous taxons une de leurs voitures à 2% quand elle vient aux États-Unis, ce n'est pas bon ».

Apple pourrait souffrir de cette nouvelle guerre commerciale qui pointe, quelques semaines après la hausse sensible des taxes sur l'importation de métal et d'aluminium (lire : Tarifs douaniers : comment une décision de Trump pourrait faire augmenter le prix des produits Apple).

Les produits d'Apple sont comme chacun sait fabriqués en Chine. L'an dernier, 61 millions d'iPhone ont été importés de Chine vers les États-Unis : à eux seuls, les iPhone 7 et 7 Plus ont pesé 15,7 milliards de dollars dans le déficit de la balance commerciale américaine (4,4%). Et on ne parle là que de deux appareils d'Apple.

L'iPhone X en petits morceaux. iFixit.

Le constructeur californien a tout de même une carte à jouer, et peut-être même deux, pour éviter de voir ses produits subir une taxe lors de leur entrée sur le territoire américain. D'une, la Pomme peut faire valoir les investissements qu'elle compte effectuer aux États-Unis suite à la réforme fiscale de la fin 2017 (lire : Apple veut rendre l'Amérique encore plus grande). Tim Cook l'a certainement évoqué avec le Secrétaire du Trésor Steven Mnuchin, qui a visité Apple Park la semaine dernière.

D'autre part, Apple peut tenter de convaincre la Maison Blanche que la manière dont est calculé le déficit commercial est biaisée. L'iPhone est certes assemblé en Chine, mais tous ses composants ne proviennent pas du pays : on retrouve le monde entier dans un smartphone d'Apple ! La Corée du Sud est représentée avec Samsung, LG et SK Hynix, mais il y a aussi le Japon, la Malaisie, le Brésil, l'Allemagne… et même la France avec Microchip et STMicroelectronics.

Sur la facture des composants d'un iPhone X, estimée par IHS Markit à un peu plus de 370 $, la part qui revient à la Chine ne représente que 3 à 6%, la majorité étant de l'assemblage. Mais les statistiques étant ce qu'elles sont, c'est l'ensemble de cette facture qui est pris en compte dans le calcul des exportations chinoises.

Chez Pegatron.

Le déficit commercial des États-Unis envers la Chine baisserait de 36%, soit 239 milliards de dollars, si le calcul prenait en compte la nature complexe de la chaîne d'assemblage d'Apple et des autres entreprises qui font assembler leurs produits en Chine.

Dans ces conditions, viser un pays spécifique — ici la Chine — en imposant des taxes d'importation n'est pas forcément la meilleure idée : cette mesure ferait plus de mal aux entreprises américaines qu'à l'économie chinoise. Sans oublier que la Chine aussi pourrait répliquer avec ses propres mesures…

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