iBookstore : Apple doit se soumettre à une injonction drastique

Anthony Nelzin-Santos |

La juge Denise Cote s'est rangée aux côtés du Département américain de la justice (DoJ) : l'injonction qui suit la condamnation d'Apple pour violation du droit de la concurrence dans l'affaire sur les prix des livres distribués dans l’iBookstore est assez drastique.





La firme de Cupertino et cinq des six plus grands éditeurs avaient été accusés d’entente illégale en 2012, alors qu’ils avaient tous adopté le modèle d’agence — qui permet aux éditeurs de fixer le prix et de s'opposer aux opérations promotionnelles des distributeurs. Après que Hachette, HarperCollins, Simon & Schuster, Macmillan et Penguin ont l’un après l’autre décidé de trouver un accord avec le gouvernement, seule Apple a affronté la justice.



Le rôle d’Apple dans le choix du modèle d’agence, dans la fronde des éditeurs contre Amazon et dans la montée subséquente des prix des livres numériques a été sanctionné (lire : L'iBookstore, un complot contre Amazon ?). Malmenée tout au long du procès et accablée par des échanges de courriels entre ses dirigeants, Apple a été reconnue coupable d’entente illégale sur les prix des livres numériques distribués dans l’iBookstore.



Deux semaines avant l'ouverture du procès, la juge Cote s'était distinguée en assurant « que le gouvernement sera en mesure de montrer qu'Apple a sciemment participé à un complot visant à augmenter les prix des livres électroniques, ce que confirmeront les preuves présentées ». Les avocats d'Apple n'ont pas réussi à lui faire changer d'avis, mais elle a aussi refusé de totalement suivre l'argumentaire du DoJ. Refusant d'étendre son verdict à d'autres secteurs que le livre numérique, elle a récemment déclaré vouloir « qu'Apple garde sa capacité d'innovation » tout en empêchant « qu’une conduite illégale comme celle clairement démontrée dans cette affaire ne se reproduise. »



Apple servira donc d'exemple, ce qui lui vaut une lourde sanction. Elle ne pourra plus utiliser le modèle d'agence pendant un délai variable selon l'éditeur : 24 mois avec Hachette, 30 mois avec HarperCollins, 36 mois avec Simon & Schuster, 42 mois avec Penguin et même 48 mois avec MacMillan. Le principe de « nation la plus favorisée » lui est aussi interdit pendant cinq ans, une décision qui avantage clairement Amazon, alors même qu'Apple a fondé le succès de ses boutiques sur ce genre de clauses, qui lui assure de ne pas être plus mal servie que ses concurrents.



Elle a néanmoins obtenu quelques (petites) victoires. Elle n'est en rien obligée de modifier sa politique en matière d'achats in-app et peut par exemple toujours refuser l'intégration de la boutique d'Amazon dans l'app Kindle. La firme de Cupertino devra par ailleurs se soumettre à la surveillance d'un auditeur externe, mais pendant deux ans seulement.



Il faudra attendre mai 2014 avant de connaître le versant financier de cette condamnation. Si dédommagement il devait y avoir, il pourrait dépasser les 500 millions de dollars selon les estimations des experts. Apple a d'ores et déjà fait part de son intention de faire appel.

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