Face aux sanctions, la Russie pourrait légaliser le piratage

Mickaël Bazoge |

Les utilisateurs russes de logiciels et de jeux édités par des entreprises occidentales voient leur horizon se rétrécir à vitesse grand V. Microsoft a annoncé la suspension de ses ventes en Russie en raison de la guerre en Ukraine, tout comme Sony, Nintendo, Electronic Arts, CD Projekt (Cyberpunk 2077), Epic, Ubisoft, et bien d'autres.

Du côté d'Apple, qui a aussi pris la décision d'arrêter les ventes de ses appareils en Russie, la situation de l'App Store est encore un peu confuse. Le site iPhones.ru rapporte qu'il est désormais impossible d'acheter du contenu sur la boutique d'applications, tout comme sur l'iTunes Store. Les clients ne peuvent plus approvisionner leur compte, ni avec une carte bancaire locale, ni avec des cartes iTunes.

Plutôt qu'une sanction d'Apple, il peut s'agir d'une conséquence des sanctions sur le système financier russe. Quoi qu'il en soit, la vie est beaucoup plus difficile pour les utilisateurs russes de PC, de Mac, de smartphones ou de tablettes dont l'accès aux logiciels se restreint de plus en plus.

À situation désespérée, remèdes inédits : tout comme les autorités envisagent de nationaliser les actifs des entreprises ayant arrêté leur activité au pays, Moscou travaille sur la dépénalisation et la légalisation du piratage. Le ministère du Développement économique a présenté des mesures visant à « atténuer l'impact des ruptures dans les chaînes d'approvisionnement, et de la pénurie de biens et de services due aux sanctions des pays occidentaux ».

Actuellement, utiliser un logiciel sans licence (= pirater) est illégal en Russie. Si ces mesures sont adoptées, alors les utilisateurs délictueux seront exonérés de leur responsabilité. Autrement dit, c'est la porte grande ouverte au piratage de logiciels, de jeux et même de contenus puisque les ayants droit n'auront plus leur mot à dire.

Il y a toutefois une nuance : le texte autorise le piratage s'il n'existe pas d'alternative russe. L'idée est de dynamiser la production locale, mais l'industrie russe du logiciel ne saurait répondre à tous les besoins, ce qui pourrait déboucher sur un piratage massif pendant des années. Par ailleurs, les interrogations persistent sur l'application de ces mesures pour les services dans le nuage.

Le texte prévoit également la possibilité d'importer des produits d'un autre pays sans la permission des détenteurs de la propriété intellectuelle. La Russie pourrait donc importer des appareils d'Apple (et d'autres) sans le consentement du constructeur.

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