Chiffrement : Edward Snowden répond à Obama

Florian Innocente |

Edward Snowden a réagi aux déclarations faites hier par Barack Obama sur le débat autour du chiffrement. Le président américain défendait l’idée d’un compromis nécessaire entre sécurité et vie privée. Cela se traduirait par des clefs à la disposition d’un nombre restreint d’individus, selon un protocole d’utilisation qui en limiterait l’usage à des situations bien précises et convenues en amont (lire Barack Obama plaide pour une clé de déchiffrement).

crédit : @Damien_Leloup

Une suggestion retoquée par l’ancien analyste de la NSA qui intervenait en visioconférence dans le cadre du Logan Symposium à Berlin. Dans les propos rapportés par Le Monde, il estime cette suggestion surréaliste :

Nous avons un très gros problème lorsque le président des Etats-Unis peut arguer que la position qui fait consensus chez les experts est une position extrémiste.

Obama avait fustigé les positions « absolutistes » des adversaires du gouvernement qui défendent à tout crin un chiffrement maximal.

Snowden compte parmi les soutiens d’Apple, pour autant il pose la question de savoir s’il est bien « normal que ce soit une entreprise multinationale qui défende nos droits ? ». Sa propre expérience lui a montré que la solution, en définitive, ne pouvait pas venir non plus des gouvernements et des assemblées élues « Les programmes de surveillance de masse étaient déjà illégaux, et cela n’a pas empêché les services de renseignement de les concevoir et de les utiliser ».

Le président américain avait abordé le cas Snowden pour déplorer le fait que cette affaire ait « grandement exagéré les dangers de l'espionnage des citoyens. Le fait est que nos agences de renseignement sont très scrupuleuses concernant les citoyens américains, les personnes sur le territoire américain. »

À défaut, c’est aux citoyens aidés par la technologie de prendre leur destin en main, avec de nouveaux protocoles de communication sécurisés par défaut et utilisables partout dans le monde, explique Edward Snowden. Concédant avoir été par « trop conservateur » par le passé il se défend aujourd’hui d’avoir versé dans le communisme lorsqu’il ajoute :

Au siècle dernier, une idée forte était celle de s’approprier les moyens de production. Je pense que nous devons nous approprier nos moyens de communication. [...] Le président des Etats-Unis nous dit que nous sommes face à un équilibre à trouver entre vie privée et sécurité. C’est faux. Nous pouvons avoir les deux, mais uniquement si nous avons les deux : il n’y a pas de sécurité sans droit à la vie privée. »

Un propos qu’il a élargi à la France dont il a critiqué certains aspects de la loi renseignement. Dans une interview accordée il y a quelques semaines à Amnesty International, le lanceur d'alerte décrivait les risques engendrés par une surveillance de masse — à laquelle il a un temps participé avant d'en dénoncer les abus — et de conclure par une mise en garde :

La vie privée des citoyens doit être respectée. Les puissants, eux, doivent être transparents. Vous n’avez pas besoin d’expliquer pourquoi vous souhaitez que l’État vous laisse tranquille. Pouvoir vivre libre, au sein d’une société libre, c’est l’ordre naturel des choses. S’ils veulent restreindre et surveiller nos activités, cela change véritablement la nature de la société humaine.
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