Ces 59 milliards d'Apple que le fisc américain ne peut avoir

Florian Innocente |

Apple domine aisément un classement des groupes américains dont les techniques d'optimisation fiscale leur permettent de conserver à l'étranger d'énormes profits, au lieu de les soumettre à l'impôt.

Citizens for Tax Justice, cité par Ars Technica, a établi qu'Apple avait amassé 181,1 milliards de dollars en dehors du pays (160 milliards d'euros). Dès lors, elle devrait s'acquitter de 59,2 milliards de dollars (52 milliards en euros) auprès du fisc américain si elle rapatriait cette somme depuis l'Irlande où elle dispose de deux entités (lire Le secret de polichinelle de l'optimisation fiscale d'Apple).

Les bureaux d’Apple à Cork, en Irlande.

Le montage d'Apple lui permet d'ailleurs de s'abstenir d'un impôt bien plus élevé qu'il pourrait l'être, sur le sol américain, mais aussi auprès du gouvernement irlandais. Ce dernier a été assez tendre avec la Pomme, lui appliquant depuis dix ans une imposition de seulement 2%, comme s'il s'agissait d'épauler une petite entreprise en début d'activité.

L'Irlande est sous le coup d'une enquête de la commission européenne mais elle n'est guère disposée à courir de risque de voir Apple réduire la voilure dans le pays. Son gouvernement a d'ores et déjà assuré qu'il contre attaquerait devant la justice en cas de décision défavorable venue de Bruxelles (lire Entente fiscale avec Apple : En Irlande, on ne craint pas l'ire de la Commission européenne).

Apple n'est pas la seule à pratiquer ce jeu de l'optimisation fiscale mais elle domine aisément ses homologues. Le second dans ce classement est General Electric avec 119 milliards à l'abri, suivi par Microsoft avec 108,3 milliards, puis divers gros labos pharmaceutiques, des industriels de l'alimentaire et quelques ténors de l'informatique (Google, HP, Oracle, Intel, Qualcomm, etc).

Citizens for Tax Justice en profite pour répéter ses demandes auprès du législateur pour réformer le cadre fiscal dont profitent — légalement — ces entreprises, et faire revenir l'argent sur le sol américain. Les entreprises appartenant au classement Fortune 500 auraient accumulé 2,1 trillions de dollars à l'étranger.

En mai 2013, Tim Cook, flanqué de son directeur financier de l'époque, Peter Oppenheimer et de Philip Bullock, son chef des opérations fiscales, avait témoigné devant le Sénat américain qui s'intéressait à ce sujet en vue d'une réforme éventuelle du code des impôts (lire Tim Cook a passé son oral devant les sénateurs).

Peter Oppenheimer, Tim Cook et Philip Bullock, 2013

Le patron d'Apple n'avait guère été chahuté malgré l'étalage des montages utilisés par sa société. Il avait contesté certaines accusations et plaidé, d'une part, pour une baisse du taux d'imposition américain de 35% à une vingtaine de pourcents. Et d'autre part, à ce que la taxation des bénéfices réalisés à l'étranger qui seraient rapatriés aux États-Unis soit faite avec un pourcentage à un chiffre.

Accédez aux commentaires de l'article