La bataille de la 3D dans les logiciels de compositing

La redaction |
L’annonce récente du partenariat d’Adobe et de Maxon bouleverse le petit monde des applications d’effets spéciaux/habillage vidéo. Pour rappel, un peu avant le salon NAB, Adobe a annoncé que la prochaine version d’After Effects inclurait deux technologies de l’éditeur allemand : Cineware, permettant de faciliter le transfert entre Cinema 4D et After Effects, et Cinema 4D lite, une version simplifiée de l’application 3D vedette de l’éditeur.



Jusqu’à présent, la « vraie » 3D était l’apanage des solutions haut de gamme comme Smoke, Fusion, Nuke, etc. Le reste des logiciels de compositing (After Effects, Motion…) recourait à de la « 2,5 D » avec des layers 2D dans un espace 3D, ou des particules/« replicators » 2D à qui l’on demandait pour donner une illusion de 3D de toujours faire face à la caméra en mouvement.

La 3D semble être devenue le nouveau Graal des logiciels d’effets spéciaux/habillage/titrage. À côté des plugs-in historiques comme ceux de Boris et de Zaxwerks, des solutions permettant d’extruder des textes et formes vectorisés se sont multipliées sous forme de mises à jour ou de plugs-in (les Textes 3D de la version C6 d’After Effects, Pro3DT pour FCPX…).

Maxon Cineware


Video Copilot a fait forte impression avec son Element 3D pour After Effects qui amenait la 3D dans l'application a un niveau largement supérieur à ce qui existait déjà. Mais l’annonce récente d’Adobe et de Maxon risque de couper l’herbe sous le pied d’Element 3D car malgré toutes les qualités du logiciel, il ne peut concurrencer un poids lourd du secteur comme C4D et sa communauté très active.

L’annonce du deal Adobe/Maxon est un pavé dans la mare, un new deal. Les cartes vont être redistribuées, et pour concurrencer After Effects, ses concurrents risquent d’être obligés de passer à la « vraie » 3D ou de nouer des accords avec un éditeur de soft 3D, plutôt que se contenter uniquement de compter sur le développement anecdotique de plugs-in par des éditeurs tiers.



Les concurrents commencent d’ailleurs à réagir. Dès lundi dernier, l’autre acteur principal de la 3D multiplateforme, Autodesk — éditeur, entre autres, d’applications 3D comme Maya, 3ds Max et AutoCAD — et Blackmagic Design ont annoncé coopérer pour améliorer l’intégration de leurs technologies.

Pour le moment, il n’est question que de l’intégration du hardware de Blackmagic Design pour capturer ou jouer des vidéos (les gammes DeckLink, UltraStudio et Intensity) avec le logiciel Smoke d’Autodesk. Mais Blackmagic, c’est également DaVinci Resolve, dont la version 10 semble se diriger dans une direction un peu plus ambitieuse que juste l’étalonnage et la correction colorimétrique. Peut-on rêver d’une intégration de la 3D dans Resolve grâce à un accord entre Blackmagic et Autodesk similaire à celui d’Adobe/Maxon ?

À l'heure actuelle, Autodesk ne semble pas prêt à vouloir à s’engager plus loin que la coopération limitée prévue par l’accord. Mais si Cinema 4D, grâce à l’appui d’After Effects, réussit à prendre des parts de marché à ses concurrents, on peut toujours imaginer qu’Autodesk et Blackmagic Design soient tentés par une collaboration plus importante. Certes, il est encore un peu tôt pour de tels projets : After Effects « next version » n’est pas encore sur le marché, et il est encore trop tôt pour avoir une idée du degré de popularité que l’ajout de la 3D aura parmi les utilisateurs d’After Effects.



Face à l’offensive de la 3D dans les logiciels de compositing, comment va réagir Apple ? Motion est très en retard dans ce domaine sur son concurrent de toujours, After Effects. On ne dispose toujours pas d’un « round-tripping » efficace entre FCPX et Motion, et la possibilité de « publier » des effets de Motions dans FCPX est un pis-aller frustrant, car limité.

Si la popularité de la 3D dans les logiciels d’effets spéciaux/habillage/titrage continue, Apple décidera-t-elle de développer sa propre solution 3D (un « Shake X » 3D, par exemple) ? Passera-t-elle par un accord similaire à celui qu’Adobe a conclu avec Maxon ? Ou rachètera-t-elle un logiciel existant, comme cela a été le cas pour Shake ou la version initiale de Final Cut ? Nul ne le sait. Comme d’habitude, Cupertino reste silencieux sur ses projets, mais gageons que les utilisateurs des solutions vidéo de montage et de compositing d’Apple seront à l’écoute.
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