L'appel à la grève lancé hier soir par le syndicat SUD a été assez peu suivi dans les Apple Store, quoique la situation varie selon les boutiques. À vrai dire, la manifestation la plus visible, devant la boutique parisienne d'Opéra, était menée par les employés… de l'APR eBizcuss, sous la bannière « Apple, tes chômeurs sont dans la rue. »
Plusieurs salariés, contactés hier soir et tôt ce matin, se font l'écho d'un sentiment doux-amer face à cette grève. Un salarié d'une boutique de province confie : « je suis un peu déçu que la grève ait lieu aujourd'hui. C'est une journée un peu spéciale, pour les clients comme pour nous. » Un avis que l'on retrouve chez un de ses collègues parisiens : « je comprends que certains parlent, je trouve dommage qu'on impose ça au client. » Certains dénoncent au contraire cette volonté de temporisation :
Quinze grévistes au Louvre et cinquante à Opéra, autant dire rien par rapport à l'effectif des deux boutiques. Je ne sais pas ce qui me gêne le plus : la démotivation par rapport à Apple ou ma honte envers le Cidre ou mes collègues non courageux. Je comprends que la direction ait lamentablement écrasé la rébellion. Trois ans pour en arriver là, c'est triste.
On est en fait en présence des deux extrêmes, et ce mouvement est aussi un jeu d'oppositions : les plus ouverts à la discussion et les plus radicaux, les plus jeunes et les plus anciens, les Parisiens et les provinciaux, etc. Un salarié d'une boutique francilienne explique :
Il y a les anciens, le vrai cœur d'un Retail Store (il faut le vivre pour le comprendre), et il y a les autres, qui sont là "ouais, je bosse pour Apple". Puis il y a l'énorme fracture entre les deux syndicats et les employés. En plus de la peur du mouvement.
Son collègue parisien détaille :
Le Cidre est un syndicat plus modéré, SUD les a complètement doublé ces derniers jours. Ni l'un ni l'autre ne représente vraiment les employés, mais j'ai quand même l'impression que globalement, ceux qui sont là depuis plus de six mois veulent continuer à travailler chez Apple et aiment leur boulot. Ils veulent juste plus de reconnaissance. En tout cas c'est que je ressens.
Le Cidre, syndicat majoritaire (72 %), ne le formule pas autrement :
Dans un dépliant interne régissant les engagements d'Apple et de ses salariés voici ce que nous pouvons lire : « Chez Apple, nous pensons que nos collaborateurs sont une ressource inestimable. » Nous attendons maintenant que cet engagement se vérifie dans les faits et qu'Apple nous prouve enfin qu'elle nous aime autant que nous l'aimons.
Deux approches donc, une plus réformiste (Cidre / CFTC), une plus radicale (SUD), ce qui n'est pas une surprise. Et de manière générale un malaise — face aux conditions de travail, face aux relais médiatiques, face aux modalités d'action. Une situation complexe donc, qui ne se résume pas au seul appel à la grève lancé par SUD, mais puise au contraire son origine dans les avis très différents des 1 500 employés d'Apple Retail France. Des employés consultés par les syndicats pour savoir quelle suite donner au mouvement.
Contactée hier soir, la direction d'Apple Retail n'est pas encore revenue vers nous.
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