Photoshop CS5 : derrière le Splash Screen

Arnaud de la Grandière |
On l'aura longtemps attendu, le support du 64 bits dans Photoshop, et pour cause. Adobe lève un coin du voile sur l'accouchement douloureux de Photoshop CS5, par le biais d'une vidéo "post-mortem", où différents développeurs racontent par le menu l'aventure épique que fut cette mise à jour du logiciel phare de retouche graphique, qui fête cette année ses 21 ans (lire Photoshop a 20 ans).



« Nous avions déjà sorti une version 64 bits de Photoshop sur Windows, et les utilisateurs Mac comptaient dessus. Ils peuvent être très exigeants, en étant un moi-même, je peux le dire avec d'autant plus de certitude. », plaisante Pete Falco.

Mais les mauvaises nouvelles arrivent lors de la World Wide Developer Conference d'Apple en 2007, où la firme de Cupertino annonce que Carbon ne connaîtra pas de version 64 bits, ce mode d'adressage mémoire étant à l'avenir réservé à Cocoa.

« [Nous avons] beaucoup de respect pour Apple et ses produits, mais ils sont très cachotiers et vous pouviez jeter un œil alentours et constater que les ingénieurs d'Apple apprenaient la nouvelle en même temps que nous. », se rappelle Bryan O'Neil Hughes.

Russel Williams : « Nous avons dîné avec eux à la conférence développeurs, et il ont dit "euh cette annonce d'aujourd'hui nous a beaucoup surpris, on était sur le point de vous donner la beta suivante" »

Il a donc fallu laisser tomber le code en Carbon, apprendre le framework Cocoa, et tout reprendre à zéro : il faut réécrire Photoshop en partant d'une page blanche. Adobe enclenche l'opération "AHOD" ("All hands on deck" : tout le monde sur le pont). Mais celle-ci fut un échec : au bout de six mois, Adobe doit faire machine arrière sur le code déjà ré-écrit, mais le temps était compté.

Tout reposera sur les épaules de Seetharaman Narayanan, qui avait déjà été à l'origine du portage de Photoshop depuis le Mac vers Windows. Cette expérience lui a permis de réorganiser le portage de manière plus efficace. Une équipe s'est focalisée sur une traduction du code Carbon vers Cocoa (équipe "C2C"), tandis qu'une autre s'est mise à ajouter de nouvelles fonctionnalités : le seul support du 64 bits sur Mac n'aurait pu suffire pour Photoshop CS5. Adobe fait appel à toutes les équipes de développement en dehors de Photoshop, mais également à la recherche universitaire. C'est de cette manière que "puppet", la déformation d'images suivant un squelette, l'amélioration de la 3D, la simulation des pinceaux, le nouveau système de détourage, et le remplissage prenant en compte le contenu ont pu être ajoutés à la dernière mouture de Photoshop.

Les équipes finissent par réunir leurs travaux : « Je m'en rappelle parfaitement «, déclare Jackie Lincoln-Owyang. « C'est le 28 janvier 2010 que C2C a été intégré avec le reste, c'était un jour pour le moins important pour tout l'étage, il y avait cette espèce de frémissement, tout l'étage bourdonnait »

Seetharaman Narayanan confirme l'ambiance particulière de ce jour : « Les gens pleuraient, Damira est venue me voir, elle avait les larmes aux yeux. C'était un sacré moment. »

Après le stress et la pression, vient l'heure du soulagement lorsqu'Adobe donne une fête à l'occasion de la sortie, un séjour de trois jours sur les collines de Sonoma « C'était merveilleux, je suis montée à cheval pour la première fois de ma vie ! », s'exclame Sarah Kong. Mais tout ceci n'est rien en regard de la fierté éprouvée par les employés d'Adobe à voir leurs noms dans les crédits de Photoshop CS5.

Andrew Coven : « Nous avons suivi l'exemple de l'équipe originale du Mac, qui a carrément posé la signature de chaque membre à l'intérieur du premier Mac. Si vous êtes fier de votre travail, vous le signez, comme le font les artistes. »

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