Le Mac est bien parti pour durer, assure Apple

Florian Innocente |

« Toutes ces sociétés qui faisaient des ordinateurs lorsque nous avons lancé le Mac, elles ont toutes disparu ». Dans une interview donnée à Macworld, Phil Schiller, et deux autres responsables d'Apple, ont rappelé l'un des aspects uniques du trentième anniversaire, ce 24 janvier, de la présentation du Macintosh.

30 ans et toutes ses dents

On ne célèbre pas un disparu, mais un mythe encore bien vivant. Un ordinateur qui a apporté une contribution significative à l'industrie informatique et dont la descendance, à intervalles réguliers, a continué de faire de petites encoches çà et là. Un ordinateur, et une société, dont on a plusieurs fois annoncé la mort sans qu'elle se décide à venir « Nous sommes les seuls à être restés. Nous continuons et nous nous développons plus vite que le reste de l'industrie du PC parce que nous avons cette volonté à nous réinventer encore et encore », déclare Schiller.

30 années et quantité de déclinaisons, de succès, mais aussi de ratés sur certains modèles. Pour autant, du point de vue de Schiller, les Mac d'hier et d'aujourd'hui partagent leurs brins d'ADN « Il y avait beaucoup de choses de grande valeur dans le Mac original qui sont encore visibles aujourd'hui. Les équipes d'Apple qui ont fait et refait le Mac au fil des ans ont eu la possibilité d'écarter tout ce qui ne marchait pas - et pourtant, bien des choses qui ont fait le succès du premier Mac sont encore là aujourd'hui, le Mac reste sans conteste un Mac. »

L'Apple d'aujourd'hui compte aussi dans ses rangs certains de ceux qui, précisément, ont fabriqué le premier modèle de cette machine. Bud Tribble, Vice Président des technologies logicielles, avait géré l'équipe de développeurs pour le premier Mac, avant de suivre Jobs chez NeXT et de revenir chez Apple il y a trois ans.

Le premier Mac fut un concentré de réflexions poussées et de créativité, explique Tribble, dès lors il n'est guère étonnant que cet héritage se retrouve, trente ans plus tard, dans les Mac de 2014 « le Mac devait être facilement appréhendé, on devait le comprendre simplement en l'observant, la technologie devait se plier à l'utilisateur et non l'inverse - ces fondements s'appliquent aussi à nos autres produits ».

Si d'aucuns jugent qu'Apple maintenant se résume aux iPhone et aux iPad (le nouveau Mac Pro, refait de zéro, est à lui seul la preuve du contraire), Tribble juge que le téléphone a plutôt aidé à revitaliser le Mac, accompagné ensuite dans cet effort par l'iPad. « Cette pollinisation croisée d'idées, le fait que les équipes Mac et iOS ne font qu'une, ont donné un nouvel élan au Mac, l'emmenant plus loin que je ne l'aurais imaginé ».

« Incapables d'innover à nouveau ? Mon cul, oui », Phil Schiller, dans le texte, lors de la présentation du nouveau Mac Pro

Les appareils sont différents, explique Schiller, mais l'expérience utilisateur qu'Apple veut procurer répond aux mêmes critères « Ce qui est très cool aujourd'hui avec la place que nous occupons, c'est que nous sommes présents dans les deux univers. Si vous regardez ce que nous avons fait avec les gestes multitouch sur le trackpad des Mac, pour s'assurer que cela fonctionne avec un ordinateur, tout en explorant aussi ces questions sur des produits allant de l'iPod touch à l'iPad, … tout cela est vraiment cool. »

iOS et OS X, chacun reste à sa place

Une seule équipe pour les deux OS et un seul chef pour les diriger, une prépondérance des iPhone et des iPad dans les résultats d'Apple, tous ces facteurs entretiennent chez certains le sentiment que les jours du Mac sont comptés, et avec lui la singularité de son système d'exploitation. Qu'Apple cherchera inévitablement à faire ce que Microsoft a fait avec Windows 8 en voulant unifier deux mondes.

Aucune crainte de ce côté-là, assure Craig Federighi, le patron des deux OS. La fusion n'est pas une piste sur laquelle Apple s'est engagée, du moins sur la forme et dans les usages « La raison pour laquelle OS X a une interface différente d'iOS n'a rien à voir avec le fait que l'un est arrivé après l'autre ou parce que l'un est ancien et l'autre nouveau. »

Ce sont les usages qui dictent la forme et les comportements de chacun de ces deux systèmes, l'un que l'on pilote au clavier et à la souris, l'autre avec les doigts sur l'écran. Pointant un MacBook Air, Federighi explique « Cet appareil a été amélioré pendant 30 ans pour fonctionner de manière optimale avec des claviers et des souris. Ce n'est pas compliqué du tout de coller un écran tactile dessus, mais est-ce que cela apporte une bonne expérience utilisateur ? Nous pensons que non ». Voilà pour les Ultrabooks à écrans tactiles promus par Microsoft.

L'informatique avec Windows 8 - Microsoft

Ce serait une « perte de temps » renchérit Schiller de réfléchir à ne faire qu'une seule interface, à essayer de fusionner les deux systèmes. Des passerelles sont néanmoins jetées entre OS X et iOS pour faciliter le passage de l'un à l'autre par les utilisateurs, comme d'unifier les noms des applications présentes dans les deux univers.

Mais les faire converger pour le seul plaisir n'est « absolument pas un objectif » assure Federighi « Vous n'avez pas envie que le Mac devienne moins bon en tant que Mac parce que quelqu'un aura voulu le transformer avec iOS. De même que vous n'avez pas envie qu'iOS donne l'impression d'avoir été conçu par une société et le Mac par une autre, et que les deux diffèrent parce qu'il n'y aurait pas de vision commune. Nous partageons une approche sur l'esthétique, sur les principes qui nous animent et nous fabriquons les meilleurs produits qu'il est possible de faire en vue de leurs usages spécifiques. Dès lors, ils seront identiques lorsque cela a du sens et vous verrez des différences sur les points essentiels qui forment leur essence »

Une approche qui se traduit par la volonté d'aider le client à jongler facilement avec chaque outil, plutôt que l'obliger à choisir entre un ordinateur, une tablette ou un smartphone. « C'est un monde dans lequel vous aurez un téléphone, une tablette, un ordinateur, vous ne devez pas avoir à choisir. Par conséquent, ce qui est le plus important c'est la facilité avec laquelle vous allez pouvoir passer entre chaque… il n'y a pas les gens qui sont plutôt portables, ceux qui sont plutôt tablettes. Il n'y a pas de raison pour qu'il en aille ainsi. », poursuit Schiller.

Le journaliste de Macworld, venu justement avec ces trois appareils, a finalement sorti son MacBook Air pour conduire l'entretien. L'occasion pour Federighi d'appuyer le propos de son collègue « Vous aviez tous ces outils et vous avez choisi celui qui vous paraissait le plus adapté pour ce que vous aviez à faire. Ce n'est pas parce qu'il était plus puissant… vous l'avez choisi parce qu'il était l'outil le plus naturel pour accomplir cette tâche ».

En conclusion, les trois hommes ont insisté sur l'importance du Mac chez Apple. Là où certains le voient dans l'ombre des iPhone et des iPad, avec le risque qu'ils l'éclipsent totalement, Schiller considère les choses de manière opposée.

Le succès des appareils iOS est une assurance de pérennité pour le Mac, un produit qui n'a plus la pression tout entière de l'entreprise et des clients sur ses épaules « Cela nous donne la liberté d'aller plus loin avec le Mac ». Il n'a plus à remplir tous les rôles possibles et imaginables pour tous les utilisateurs « Le Mac a et aura toujours un rôle super important. Aussi loin que l'on puisse voir, il a sa place. Un rôle qui se conjugue avec celui des smartphones et des tablettes, qui vous permet de choisir ce que vous voulez en faire. Comme nous voyons les choses, le Mac va continuer d'avancer et il ne s'arrêtera jamais, parce que les différences qu'il apporte sont inestimables ».

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