Phil Schiller : « Nous allons complètement repenser le Mac Pro »

Florian Innocente |

« Nous sommes en train de complètement repenser le Mac Pro ». Phil Schiller, entouré d'autres responsables logiciels et matériels d'Apple, a rompu le silence autour de cette machine. Ils ont levé (un peu) le voile sur l'avenir de cette station de travail à l'occasion d'une réunion avec une poignée de journalistes américains.

Cliquer pour agrandir

Le Mac Pro, dans son format actuel, est condamné au profit d'un nouveau modèle qui en corrigera les défauts et les limites — notamment thermiques — induits par son design tout en compacité. Ce tout nouveau Mac Pro est en préparation mais de par sa « nature modulaire », il n'est pas le seul sur lequel cogitent les équipes. Il y a également sur les rails un futur écran pour les professionnels. « Une équipe travaille d'arrache-pied » à ces deux produits, a expliqué Schiller. L'aventure avec LG et son écran Ultrafine 5K mal blindé n'aura finalement été qu'une passade.

Il ne faut rien attendre pour cette année, la patience reste de mise. Les ingénieurs ont reçu comme consigne de « prendre leur temps », de manière à concevoir quelque chose qui puisse évoluer au fil du temps.

Nous voulons le concevoir de telle manière qu'on puisse le tenir à jour régulièrement, et nous voulons absolument en faire notre machine de bureau la plus haut de gamme, la plus puissante, conçue pour nos utilisateurs professionnels les plus exigeants.

Nous voulions faire quelque chose d'audacieux et de différent. Ce que nous avons mal évalué à l'époque c'est que nous sommes allés vers un design taillé sur mesure, dans lequel nous nous sommes retrouvés quelque peu coincés — à l'intérieur d'une forme circulaire.

Des propos qui sentent bon le retour à un format de parallélépipède plus traditionnel que le cylindre, joli mais très peu pratique. John Ternus, responsable de l'ingénierie matérielle, ajoute « Il répondait très bien à un besoin. Simplement, il n'a pas la flexibilité qui nous est nécessaire. Il n'était pas assez souple pour quelqu'un qui voudrait une configuration différente pour les GPU  ».

Il faut se souvenir que l'intérieur du Mac Pro est fait d'un bloc en forme de triangle, sur les faces duquel sont accrochées les cartes graphiques. Le système de refroidissement n'est pas fait pour que l'une des faces de ce triangle soit dotée d'une carte beaucoup plus puissante que l'autre, avec un dégagement thermique plus élevé à réguler d'un coté que de l'autre.

Parmi les autres leçons apprises par Apple ces quatre dernières années, le fait que de mettre deux cartes graphiques n'allait pas être suivi d'effet et adopté par les logiciels, a poursuivi John Ternus :

Je pense que nous nous sommes enfermés dans une impasse en matière de gestion thermique. Nous avons conçu un système avec un type de processeurs graphiques dont nous pensions avoir besoin à ce moment là, et nous avons cru qu'une architecture à deux GPU serait bien adaptée. C'était la limite thermique dont nous avions besoin, ou la capacité thermique dont nous avions besoin. Mais les manières de travailler, basées autour d'un tel dispositif, ne se sont pas développées aussi largement que nous l'espérions.

En somme, contrairement à la vision à laquelle Apple s'est accrochée pour inventer le Mac Pro 2013, la tendance dans les stations de travail s'est plutôt ancrée sur des configurations équipées d'une seule grosse carte graphique. Le Mac Pro 2013 n'y était pas préparé. Apple avait prévu le nécessaire dans macOS pour que les développeurs optimisent leurs logiciels à l'utilisation de deux GPU mais ce n'est pas devenu une tendance lourde comme elle l'espérait :

Être en mesure de mettre un seul GPU plus puissant exigeait une architecture différente et une plus grande capacité thermique que ce dont le Mac Pro était capable. C'est devenu assez difficile à ajuster (on se souvient des déboires rencontrés par les utilisateurs et même d'un rappel technique à cause de ses cartes graphiques, lire Le Mac Pro désespère les pros, ndlr).

Au même moment, nous avons vu tellement de nos clients aller vers l'iMac que nous nous sommes dits que cela pourrait être un moyen de répondre à des besoins que le Mac Pro ne remplissait pas. Et nous avons mis beaucoup d'énergie derrière cela.

Avec ce Mac Pro nous avons conçu quelque chose que nous pensions génial… et nous avons découvert que c'était super pour certains et pas pour d'autres — au point que nous en avons conclu qu'il fallait emprunter une autre voie et trouver une nouvelle réponse.

Schiller n'a pas souhaité donner d'indication quant à la direction qu'Apple prendrait pour la connectique de cette machine. Sinon pour dire que ce qui se fait sur un Mac n'est pas forcément le reflet de ce qui va être décidé pour un autre. Chaque produit a sa spécificité : « Ce n'est pas parce que nous avons retiré quelque chose sur un produit que nous allons le faire sur un autre ».

Au fil de la conversation une question est venue sur l'intérêt d'Apple pour les cartes graphiques externes. Federighi a juste répondu : « Je pense qu'elles ont un rôle à jouer ». Sans en dire davantage mais assez peut-être pour relancer des spéculations. Comme cette rumeur d'un écran qui intégrerait une carte graphique pour les portables. À moins qu'Apple ne laisse le soin à d'autres de fabriquer ces périphériques et se contente de bien les gérer dans macOS.

Autre détail intéressant dans le contexte politique actuel, Apple ne souhaite pas dire pour l'heure si elle sera en mesure de faire fabriquer à nouveau ce Mac Pro aux États-Unis.

Schiller s'est aussi voulu rassurant pour le futur du Mac en général :

L'avenir du Mac est important et envisagé sur le long terme chez Apple. Nous y sommes profondément attachés, nous avons la ferme volonté de continuer à aller de l'avant et d'investir dans le Mac. Et si nous avons marqué une pause, une interruption dans les mises à jour et les renouvellements, nous en sommes désolés — c'est ce qui s'est passé avec le Mac Pro, et nous allons arriver avec quelque chose de formidable pour le remplacer. C'est bien notre intention.

Ce à quoi Craig Federighi, faisant référence aux innombrables discussions qui ont eu lieu sur internet à propos de l'intérêt d'Apple pour le Mac comparé aux iPhone ou iPad, enfonce le clou : « Le Mac est — chose que nous disons encore et encore et que nous répétons ici — une part immense de notre futur, nous y investissons énormément ».

Accédez aux commentaires de l'article