Test de Antidote HD

Anthony Nelzin-Santos |
On ne présente plus Antidote : le correcteur orthographique des Québécois de Druide officie en effet depuis 1996. Antidote HD, disponible depuis quelques semaines, est la septième version en date et elle a été adaptée au 64 bits. Nous ne reviendrons pas cette fois sur les fondamentaux d’Antidote : nous les avions largement exposés dans le test d’Antidote Prisme, ou lors de l’affrontement entre Antidote RX et son concurrent le Petit Prolexis. Nous nous attacherons donc à décortiquer les nouveautés de cette version HD : interface, dictionnaires et guides, et performances du logiciel.

Une nouvelle interface
La nouveauté la plus frappante de cette version HD est certainement son interface entièrement revue. Il ne s'agit pas de faire joli, mais bel et bien d'améliorer l'usabilité de ce qui existait déjà, d'intégrer de nouvelles fonctions sans alourdir, et de répondre à des demandes historiques des utilisateurs du logiciel de Druide.

Antidote conserve son interface mono-fenêtre, mais là où RX ne possédait qu'une barre latérale aux menus infinis, HD propose désormais deux barres latérales mieux organisés, encadrant l'interface de correction. La barre de gauche regroupe les « prismes », c'est-à-dire les différentes manières d'analyser un document. Ceux-ci sont désormais mieux groupés (Correction, révision, statistiques et inspection), et la sélection a été sévèrement réduite. Cela ne veut pas dire qu'il y a moins de fonctions, non, mais celles-ci sont désormais mieux réparties.

Lorsque l'on cliquait sur un prisme dans RX, celui-ci se déroulait pour laisser apparaître toutes ses sous-catégories, ou ouvrait une petite palette affichant un graphique. Désormais, on navigue dans cette barre latérale comme on le ferait dans une liste sur l'iPhone, transitions et boutons compris. Par exemple, pour le prisme "Sémantique", qui, selon Druide, permet aux rédacteurs d'écrire des tests plus neutres, on passe d'une vue générale des termes indiquant une connotation positive ou négative à une liste de sélection de ses termes :



Si les boutons permettant de passer d'un niveau à l'autre de l'analyse sont un peu petits, cette manière de présenter les choses est plus agréable, plus logique, donc plus efficace — et c'est tout ce que l'on demande. On remarquera quelques petites nouveautés, comme un compteur dans le prisme de Tailles permettant de calculer le tarif à facturer si l'on est payé au mot ou au caractère, et la présence permanente d'un curseur de sensibilité qui permet de régler la manière dont Antidote va répondre aux caractéristiques de votre texte sans en passer par ses préférences générales.

La barre latérale de droite, quant à elle, s'adapte par rapport au prisme sélectionné : par défaut, en mode correction, elle propose comme d'habitude la liste des erreurs. Mais, enfin, ou plutôt, ENFIN, Antidote permet de corriger plusieurs occurrences d'une erreur en une seule passe, simplement en cliquant sur la petite bulle affichant le nombre. Voilà de quoi gagner un temps fou pour corriger les erreurs de typographie (espaces insécables et fines notamment), ou les fautes d'orthographe dont on n'arrive pas à se défaire…



La partie haute de cette barre de droite cache d'ailleurs un menu déroulant qui fait le tri dans les catégories d'erreurs, permettant de se concentrer sur un certain type d'erreurs à la fois : par exemple d'abord les accords du participe, ensuite les détails typographiques, la barre de gauche s'adaptant alors pour montrer des graphiques d'erreurs — de quoi apprendre et se corriger.



Les petites bulles jaunes affichant une explication de l'erreur ont été revues, et sont désormais plus claires. Enfin (et enfin !), il est désormais possible de corriger une erreur directement depuis la fenêtre d'Antidote, sans être obligé de revenir à son logiciel de traitement de texte. Toutes ces petites améliorations augmentent grandement la vitesse de correction, et la convivialité générale du logiciel : il serait presque agréable de corriger ses documents — presque.

De (deux) nouveaux dictionnaires

Aux dix dictionnaires qui étaient intégrés dans la version du dixième anniversaire d'Antidote (RX, si vous n'avez pas suivi), s'en ajoutent deux supplémentaires — deux et demi, en fait.

Le premier est un dictionnaire historique et diachronique (une des significations du HD), un dictionnaire qui trace le fil de l'évolution des mots dans le temps, du point de vue de leur forme comme du point de vue de leur signification. Véritable mine, il n'a qu'un défaut, qu'il partage d'ailleurs avec ses cousins : il est facile de perdre des dizaines de minutes à le parcourir de fiche en fiche ! Un guide historique vient accompagner ce dictionnaire, constitué de 93 articles dédiés à l'histoire de l'orthographe et de la grammaire du français — une lecture passionnante.



Le deuxième dictionnaire intégré est un visuel. Dans chaque définition sont maintenant intégré de petits carrés bleus renvoyant vers des planches iconographiques, nouveautés de cette version.



Par défaut, il n'est pas possible de les agrandir — seule une version "nano" du visuel est intégrée. Mais il est possible d'acheter, pour une douzaine d'euros, la version complète du Visuel : les planches sont alors accessibles en haute définition (oui, encore un sens du HD, et un facile), et les illustrations intégrées aux définitions.

Une troisième dictionnaire a été intégré, ou plutôt un « deuxième-et-demi » : il s'agit tout simplement de la Wikipedia. A l'instar du dictionnaire intégré à Mac OS X, Antidote embarque des liens vers l'encyclopédie en ligne, pour augmenter le contenu des dictionnaires déjà proposés — à cela près que son contenu n'est aucunement mis en forme, pour bien la distinguer du travail original des équipes de Druide.



Enfin, on remarquera que l'interface générale des dictionnaires a été légèrement modifiée, les définitions intégrant une barre latérale regroupant les flexions, l'étymologie (liant les définitions au dictionnaire historique), des notes, des liens vers les guides, etc.





Une correction améliorée

Les dictionnaires ne servent pas qu'à préciser le sens d'un mot, ils aident aussi le moteur de correction, notamment pour le dictionnaire des cooccurrences. Les cooccurrences sont des combinaisons se formant autour d'un mot, dont l'association est fréquente, presque idiomatique ; par exemple, autour du mot « pomme » se construisent les segments « pomme verte » et « pommes frites », « pomme de discorde », « pomme de pin » et « pomme d'api », ou encore « tomber dans les pommes », « croquer la pomme » ou « servir avec des pommes ».



Le nombre de cooccurrences a été très largement augmentée, grâce à un long travail d'une section entièrement dévolue à cet effet d'analyse des textes (notamment ceux tombés dans le domaine public). Le nombre de ces segments de phrase ayant considérablement augmenté, Antidote est devenu plus intelligent. Plus intelligent, mais pas encore assez — si pour Antidote, une mère ne peut pas être démontée, on peut par contre croquer sa paume verte… Haute détection peut-être (oui, ce sera le troisième sens de HD), mais pas toujours.

Si le sens d'un texte pose donc encore des problèmes à Antidote (mais de moins en moins au fil des versions), le logiciel de correction de Druide s'est largement amélioré sur la lecture des phrases complexes. On remarque ainsi beaucoup moins de plantages de type « Analyse partielle », indiquant que sur des phrases complexes (longues, entrecoupées de relatives, d'incises, etc.), Antidote n'a pas réussi à s'en sortir. De fait, et même s'il faudrait tester cette fonction sur un grand nombre de textes pour en tirer une conclusion générale, Antidote s'en sort beaucoup mieux qu'avant avec les relatives et les pronominales, ce qui permet de faire chuter de manière impressionnante le nombre de faux-positifs détectés — ou au contraire d'augmenter la détection correcte de fautes qui seraient autrefois passées au travers des mailles du filet, comme la construction suivante :



Si Antidote RX serait passé à côté (ou aurait été capable de voir une erreur sur une phrase parfaitement écrite), Antidote HD a correctement identifié la construction volontairement alambiquée de la phrase, et la préposition du COD — ce ne sera malheureusement pas toujours le cas (Druide admet humblement que la quête d'une correction entièrement automatisée et sans faux-positifs est vaine), mais les choses deviennent franchement intéressantes. Détection de plus d'erreurs, et chute globale du taux de faux-positifs, Antidote HD est donc une belle évolution sur le plan de la qualité de correction par rapport à RX — le Prolexis, très bon à ce jeu-là, semble avoir été rattrapé, si ce n'est dépassé sur les constructions complexes.

Un mot sur les logiciels compatibles avec Antidote HD : si quelques uns possèdent une palette dédiée (Microsoft Office), la plupart accèdent à la correction via le menu contextuel. Très rares sont ceux qui obligent de passer par le menu des services. Si la plupart gèrent parfaitement Antidote, certains n'intègrent pas l'API qui est nécessaire à l'interaction avec le logiciel de Druide : c'est le cas de Mellel, qui n'est pourtant pas le logiciel de traitement de texte le moins utilisé, qui annulera toute la mise en forme appliquée au texte lors du passage dans Antidote.

L'Anti-Oups !
Il y a un logiciel Apple avec lequel Antidote s'intègre encore plus finement : Mail. La fonction « Anti-Oups ! » d'Antidote HD permet en effet de lancer automatiquement une correction orthographique au moment de l'appui sur le bouton d'envoi. Une fois cette correction orthographique terminée, Antidote va plus loin, et vérifie si vous faîtes mention d'une pièce jointe dans votre courriel…



…mais que vous avez oublié de la joindre, situation très, très classique. Après quelques tests, ce filtre fonctionne avec une variété de formules différentes, et a même tendance à se déclencher sur la simple présence du verbe « joindre » dans un courriel. Malheureusement, l'Anti-Oups ! n'a pas encore de pouvoirs télépathiques, et est incapable de détecter le besoin d'une pièce jointe dans un courriel n'en faisant pas mention…

Pour finir
Si Antidote HD ne peut pas encore prétendre à l'omniscience, et que seule la relecture humaine patiente et attentive peut atteindre le zéro-fautes, le logiciel de Druide aide grandement cette tâche pénible et répétitive. Sa nouvelle interface permet une correction bien plus rapide, en incluant enfin des fonctions demandées depuis des années, et en présentant les outils d'une manière plus simple et plus organisée. Si le moteur de correction bloque toujours sur les constructions complexes (insérez un point-virgule, une paire de parenthèses et un pronom dans une phrase, et elle virera au rouge de manière inutile), il a fait un réel bond en avant, détectant plus de fautes réelles, et étant moins enclin à en trouver là où il n'y en a pas — merci les cooccurrences, et l'amélioration de la détection des pronoms. Les dictionnaires et guides sont toujours d'aussi bonne qualité, le nouveau dictionnaire historique étant certainement l'un des plus plaisants qu'il nous a été donné de consulter depuis longtemps. Bref, une excellente évolution par rapport à la version RX, qui vaut largement le prix demandé : 45 € pour la mise à jour, 120 € pour la version complète.

Note

Les plus :

- Intégration de fonctions demandées depuis longtemps - Nouvelle interface pratique et efficace - Richesse des outils d'analyse - Richesse des dictionnaires et des guides - Baisse notable du nombre de faux-positifs

Les moins :

- Parfois lent sur de très longs textes - Beaucoup de cooccurrences non reconnues dans le fil du texte
8.5
10

Prix :
45 € (mise à jour depuis la version RX) 120 € (version boîte) - En promo actuellement à 95 € chez Amazon.fr

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