Le patron d'Intel trouve les puces ARM insignifiantes dans le monde PC

Pierre Dandumont |

Le patron d'Intel, Pat Gelsinger, vient d'affirmer une chose assez étonnante : « (les puces) ARM et les alternatives à Windows ont été généralement reléguées à des rôles assez insignifiants dans le monde du PC. ».

Pat Gelsinger en 2017 (Web Summit, CC BY 2.0 DEED)

Cette phrase est tirée d'une conférence téléphonique liée aux résultats d'Intel et elle peut être interprétée de deux façons. Car selon la lorgnette dans laquelle vous regardez, il a parfaitement raison… ou totalement tort.

Il a totalement tort

Une vision est évidente : Apple a remplacé les puces Intel par ses propres puces ARM et macOS a une part de marché finalement assez élevée dans le monde. Statcounter place macOS aux environs de 20 % de parts de marché sur les ordinateurs, contre un peu moins de 70 % pour Windows. Et même pour Intel, la perte des machines d'Apple a été visible : Apple est le cinquième fabricant de PC au monde, avec environ 5 millions de Mac vendus par trimestre… soit cinq millions de puces qui auraient pu être des CPU Intel.

Le MacBook Air M1 n'a pas été insignifiant pour tous les analystes.

Même au-delà du cas Apple, certains ont de grands espoirs dans l'évolution du marché « GNU/Linux » au sens large, même s'il n'y aura probablement jamais une « année de Linux sur desktop ». Pour les puces ARM, Qualcomm a visiblement l'air de croire en sa nouvelle puce Snapdragon X Elite et des rumeurs indiquent que Nvidia et AMD pourraient s'engouffrer dans ce secteur une fois que la période d'exclusivité de Qualcomm sur les PC ARM (qui n'a jamais été réellement reconnue par Microsoft) sera terminée.

En clair, tant Windows « ARM » que les Chromebooks et autres Mac taillent dans les croupières de Windows, et les puces ARM tendent peu à peu à remplacer les processeurs x86 d'Intel (et AMD).

Il a totalement raison

D'un autre côté, toujours en commençant par Apple, il a totalement raison. Même si les parts de marché de macOS sont plus élevées qu'elles ne l'ont été, Windows reste le système d'exploitation principal dans le monde des PC. Et même si les puces ARM d'Apple ont du succès, la part de marché d'Apple dans ce domaine reste faible dans l'absolu.

La Surface Pro X, un appareil sous Windows 11 ARM.

Le passé a montré que le monde PC était surtout très conservateur : les puces RISC des années 90 — PowerPC, Alpha AXP, MIPS, etc. — devaient remplacer les x86 dans les PC sous Windows NT… et Windows 2000 a sonné le glas de ces expérimentations. Les puces ARM devaient remplacer les x86 dans les tablettes et autres PC portables avec Windows RT en 2012… et l'échec a été complet. En 2017, rebelote, les PC sous Windows 10 ARM devaient remplacer les puces x86… et c'est globalement un échec. Même si les PC Windows 10 (et maintenant Windows 11) équipés d'une puce ARM existent encore, ils ne font que vivoter avec des parts de marché ridicules et assez peu d'avantages en pratique. Et enfin, dernier exemple en date, les Chromebooks ARM devaient s'imposer, mais le programme « Plus » de Google ne contient pour le moment que des puces Intel ou AMD.

Pat Gelsinger considère probablement que les limites de Windows « ARM » vont perdurer pendant un temps, ce qui va continuer à éloigner les utilisateurs des PC de ce type… et favoriser les puces Intel. Les six dernières années tendent à prouver que le raisonnement se tient, mais l'arrivée de Qualcomm avec une puce performante et d'AMD et Nvidia pourrait changer la donne… ou pas.

Enfin, pour terminer, il faut évidemment prendre la situation globale d'Intel : la société a complètement raté le virage de la mobilité et se recentre sur les PC depuis quelques années, ce qui implique évidemment qu'annoncer des inquiétudes sur l'avenir du marché principal de la firme n'est pas une option.

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