Stéphane Richard plaide pour « des internets » à différentes vitesses

Nicolas Furno |

Interviewé ce matin par Stéphane Soumier sur BFM Business, Stéphane Richard a vanté son « bilan solide » et sa vision pour l’avenir « ambitieuse et réaliste » alors qu’il est candidat à sa propre succession à la tête d’Orange. Cela fait six ans qu’il dirige le groupe et il promet aux investisseurs une « accélération de la croissance » dans les prochaines années. Au-delà du discours de PDG, Stéphane Richard a aussi répondu à quelques questions techniques plus précises.

Stéphane Richard sur le plateau de BFM Business. Cliquer pour agrandir

Stéphane Soumier a ainsi interrogé le patron d’Orange sur la neutralité du net, une question brûlante aux États-Unis où l’on discute de sa possible disparition au profit de connexions régulées en fonction des contenus et des services. Même si Stéphane Richard n’a pas répondu tout à fait sur ce point, il n’est manifestement pas un défenseur ardent de la neutralité du net, qu’il qualifie d’« obligation ». Mais selon lui, ce n’est pas un problème de contenus :

Ce débat est pollué par des considérations politiques. Quand on dit neutralité du net, on voit tout de suite la main des opérateurs qui viendrait fouiller les contenus et faire un tri entre les contenus. Ce n’est pas du tout ça le sujet.

Le sujet, donc, c’est plutôt la nécessité d’avoir des réseaux différents en fonction des usages. Et de citer le cas de l’internet des objets, qui nécessite une connexion omniprésente, mais moins puissante, ou bien celui de la voiture autonome, qui nécessite une connexion parfaitement fiable et sans latence. Encore un exemple ? Une opération chirurgicale à distance nécessite une qualité de service bien plus importante que pour un appel téléphonique.

Il faudra qu’on soit capables de proposer à l’industrie et aux services des internets avec des fonctionnalités et des puissances différentes, donc des internets avec des qualités de service différentes. Pour pouvoir le faire, il faut qu’on nous laisse le faire et qu’on nous laisse construire des infrastructures qui permettront de faire ça.

Stéphane Richard ne parle pas tant du filtrage des contenus, qui est l’enjeu au cœur des débats sur la neutralité du net, et bien plus des réseaux. En l’occurrence, l’arrivée de la 5G — à partir de 2020 ou 2021 chez l’opérateur — fait partie des axes de développement qui permettront à Orange de commercialiser ces différents internets.

Les réseaux différents en fonction des besoins n’empêchent pas, par ailleurs, de filtrer chaque connexion en fonction des usages. Le PDG n’a pas répondu sur ce point précis, mais il semble que ce soit la conclusion logique de cet état d’esprit. On pourrait imaginer a minima une offre professionnelle sans aucune limite, et une offre grand public qui briderait les services les plus gourmands, comme Netflix, le téléchargement de gros fichiers ou encore YouTube.

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Pour revenir à une note plus positive, Stéphane Richard a encore une fois évoqué le rôle de son entreprise dans les réseaux et les investissements conséquents d’Orange, notamment pour la fibre optique. Sur ce point, on ne peut pas le nier, l’opérateur historique en fait plus que tous ses concurrents réunis et la fibre optique est déployée à grands pas, au moins dans les villes.

Le PDG estime que la France pourrait être « un des tous premiers pays au monde » en matière de fibre optique d’ici trois ou quatre ans si Orange poursuit ses déploiements au rythme actuel. Et de reconnaître que son entreprise a tout intérêt à construire le meilleur réseau possible :

Sans les réseaux, il n’y a rien d’autre. Il n’y a pas d’internet, il n’y a pas les nouveaux services, il n’y a pas ces ruptures digitales. Celui qui maîtrise les réseaux a quand même une position clé dans l’économie du futur.

Reste à savoir si Orange entend profiter de sa « position clé » pour offrir un internet à vitesse variable en fonction des abonnés. Aux États-Unis, les parlementaires voteront jeudi pour casser ou maintenir la neutralité du net dans le pays.

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