Labo d'iPhoto '08

Florian Innocente |
À chaque présentation d’un nouvel iPhoto, Steve Jobs n’a jamais manqué de souligner l’aptitude de l’application à engranger des milliers d’images. En dévoilant iPhoto ’08 (version 7 dans les faits) le patron d’Apple a réorienté son discours. Aujourd’hui il s’agit moins de battre des records de stockage que de gérer au mieux la masse de photos (ou de vidéos) accumulée. À différents niveaux, c’est à cette problématique que s’attaquent plusieurs des nouveautés de cette version.

Nouvelles bases
Au premier lancement, iPhoto met à jour la base de photos existante. Une opération rapide, mais pendant laquelle le logiciel peut exiger - ce n’est pas systématique - de réparer les autorisations du dossier iPhoto Library. Une tâche de maintenance qui s’est d’ailleurs ajoutée aux différentes options de reconstruction de la photothèque (accessibles en appuyant sur Alt et Pomme au lancement). À noter aussi que le dossier iPhoto Library se transforme en un fichier unique, avec comme avantage de masquer aux débutants ou aux maladroits des fichiers vitaux. Autre effet de cette révision, des plug-ins tiers (FlickrExport, Keyword Manager, etc) ne marchent plus, mais leurs auteurs sont déjà à l’ouvrage. Apple de son côté livre aux développeurs quelques secrets internes d’iPhoto, mais à dose homéopathique, puisqu’ils ne concernent que les moyens d’ajouter des options d’export au logiciel.

La logique de l’événement
Contrairement à iMovie’08, l’interface d’iPhoto n’a guère changé, si ce n’est quelques éléments çà et là redessinés. Au sommet de la barre latérale trône désormais la nouvelle icône des Événements. Jusqu’alors on consultait ses photos de deux façons. Soit en les affichant toutes (un clic sur l’icône Photos) soit de manière plus ciblée en sélectionnant un ou plusieurs albums. Le rangement par Événements combine les deux approches et prétend remplacer, chez les gens très organisés, la longue enfilade d’albums (ils existent toujours, de même que leurs cousins “intelligents”). L’affichage par événements donne ainsi accès à l’intégralité de la photothèque, mais celle-ci est divisée en groupes d’images. Le critère de tri est chronologique, sont regroupées toutes les photos prises le même jour. Chacun des événements prend pour enseigne la première photo qu’il contient (on peut en désigner une autre). Dans le cas de notre photothèque, les quelque 6000 clichés et vidéos ont été automatiquement réduits par iPhoto à 500 événements. La date de prise de vue des images servant de nom à l’événement. Autant dire qu’en partant d’un volume d’images important, le travail de personnalisation des noms et d’ajustement des contenus des événements peut être conséquent…




Sauf à avoir réglé iPhoto pour qu’il respecte votre propre classement de photos dans le Finder (par opposition à l’option de copie dans son dossier iPhoto Library). Dans ce cas, les titres des dossiers sont repris pour baptiser les événements. Pour connaître rapidement le contenu de ces événements sans les ouvrir un à un les ingénieurs d’Apple ont trouvé une astuce inspirée des flip book, ces livres animés que l’on effeuille du pouce. En survolant les événements avec le pointeur de la souris (les touches fléchées marchent aussi) leurs contenus défilent immédiatement : malin !

Manipuler les événements
Si la fréquence de création des événements ne vous convient pas, le réglage par défaut d’une journée peut être modifié, mais les choix sont imposés et limités : une semaine, huit heures et deux heures. À chaque déchargement d’un appareil (ou lors du glisser-déposer d’un dossier d’images depuis le Finder) iPhoto va donc analyser les dates et heures des prises de vue et créer des événements en conséquence. Bizarrement il est arrivé - très occasionnellement - que le logiciel réunisse en un seul événement des photos prises pourtant à des intervalles très différents de celui choisi. Et si après déchargement il s’avère que des photos n’ont rien à faire dans le même événement (ex : une sortie de ski la journée et une virée en boîte le soir) iPhoto permet de les dissocier d’un clic en deux événements. L’inverse - la fusion d’événements - est tout aussi aisé. Plus facile en tout cas que le déplacement d’une sélection de photos depuis un événement vers un autre. Première solution, marquer lesdites photos d’un drapeau (c’est une nouvelle fonction), aller dans l’événement cible et choisir l’item de menu “Ajouter les photos signalées d’un drapeau à l’événement sélectionné”. Problème, toute image dans la photothèque repérée d’un drapeau sera déplacée ! Deuxième possibilité, sortir de la présentation par Événements, aller en présentation par Photos, choisir l’affichage par “Titres d’événements” et faire glisser les photos entre les événements.



L’une comme l’autre, aucune de ces méthodes n’est totalement satisfaisante, alors que la présentation par colonnes dans le Finder aurait pu servir de modèle. De même, on aurait aimé pouvoir changer l'intervalle chronologique de création des événements au moment du déchargement de l’appareil, plutôt que d’être obligé d’aller au préalable dans les préférences.

Déchargement sélectif
Plus heureuses en revanche les améliorations dans l’interface de déchargement d’un appareil. iPhoto affiche une prévisualisation du contenu de la carte mémoire. Si on veut n’en importer qu’une partie, plus besoin d’en passer par l’utilitaire Transfert d’images, il était temps ! Seule critique, une sélection des images retenues au moyen de cases à cocher (comme dans Aperture ou Lightroom) eut été plus pratique. Bon point, une option offre de masquer de cette galerie les photos qui auraient été déjà déchargées.



Le masque d’iPhoto
Le masquage de photos est d’ailleurs devenu une fonction à part entière dans iPhoto’08. On peut exclure de l’affichage de la photothèque, des événements ou des albums toute image de moindre intérêt, mais que l’on ne veut pas effacer pour autant. On relève toutefois une incohérence : dans un événement, le nombre de photos qui a été masqué, est clairement indiqué alors qu’il ne l’est pas dans un album.






Mots clefs au clavier
S’agissant des mots clefs, Apple a modifié l’apparence de leur fenêtre (look Leopard) mais ils sont toujours livrés en vrac sans possibilité de les hiérarchiser et les regrouper en familles. Une chance pour le shareware Keyword Manager qui gagne un répit supplémentaire (ses auteurs travaillent à sa compatibilité iPhoto’08). Par contre, on peut affecter à toute vitesse des mots clefs par de simples raccourcis clavier (ex : taper “a” puis “v” pour “amis” et “voyages”). Mais pourquoi donc obliger l’utilisateur à garder ouverte la fenêtre des mots clefs pour que cette fonction opère ?




Les aléas de l’édition
Le double clic sur une photo ne produit plus obligatoirement le basculement dans la fenêtre d’édition. Selon les réglages choisis dans les préférences, l’action produira un affichage rapide de l’image en grande taille. Un avant-goût de la fonction de prévisualisation dans Leopard (Quick Look). Dans le mode d’édition, la barre des vignettes peut être maintenant agrandie pour afficher jusqu’à quatre lignes de photos et être déplacée autour de l’écran. Sur un grand écran, le bénéfice est immédiat lorsqu’on doit travailler sur de nombreuses images.



Un détail, lorsque l’on sort et revient dans le mode d’édition, iPhoto ne mémorise toujours pas l’état précédent d’ouverture des palettes d’outils et d’effets. Des deux palettes, seule Ajuster a vraiment évolué. Réorganisée (l’histogramme a pris de la hauteur), elle a vu son réglage général de la luminosité tout bonnement supprimée. Il est remplacé par deux outils qui interviennent sur les zones trop claires ou trop sombres d’une photo. S’ils réussissent parfois à corriger un déséquilibre local dans l’éclairage, la magie n’opère pas systématiquement et on a vite fait de faire plus de mal que de bien. Ces deux curseurs sont à manipuler avec une infinie douceur. Tout comme celui atténuant le bruit, poussé trop fort il transformera votre photo en une magnifique aquarelle. Autre nouveauté la pipette de réglage du point blanc. Elle atténue la dominante de couleur d’une photo (souvent bleu ou jaune) afin de retrouver des couleurs plus réalistes.



Cette fonction existait déjà dans iPhoto 6 mais elle ne s’activait qu’avec un raccourci clavier non documenté (touche Pomme + clic). Apple aurait aussi pu s’inspirer de Lightroom où l’on visualise en temps réel l’effet que produira le changement de dominante en survolant simplement la photo avec la pipette. Et tous ces ajustements peuvent être désormais copiés et appliqués à une autre photo. Autre lacune qui cette fois perdure au fil des versions, l’absence d’un affichage simultané “avant” et “après” d’une photo en cours de retouche. Il faut toujours jouer du clavier (la touche majuscule dans iPhoto’08) pour voir, alternativement seulement, le cliché original et le retouché. L’outil de rognage a, lui, gagné une grille bien utile pour améliorer la composition d’une image. Ce quadrillage reprend la règle des trois tiers, une base de de la photographie, qui fait ressortir les éléments clefs d’une image.


Un zeste de Flickr
Enfin, iPhoto propose une nouvelle manière de mettre en ligne ses images : la fonction Galerie web. Fini les photos comme clouées au marteau sur une page Web. Plusieurs présentations, de belle facture, sont offertes au visiteur, certaines jouant même la carte de l’animation. Les vidéos sont également acceptées, mais pas celles au format AVI pourtant courant sur les compacts ! Les personnes autorisées à voir vos galeries pourront aussi - si vous l’acceptez - télécharger vos photos, mais également vous envoyer les leurs. Galerie web s’avère assez réussi pour qui n’aurait pas l’utilité de toute la richesse d’un Flickr. Seul hic, Galerie web ne fonctionne qu’avec un abonnement à .mac (99 €/an).



Le mot de la fin
À la révolution iPhoto’08 préfère l’évolution douce au point qu’on relève des absences fonctionnelles inexplicables tant elles répondent à des besoins simples et courants. Tous ceux qui, arrivés aux limites d’iPhoto 6, attendaient des changements plus francs risquent de rester sur leur faim. iPhoto’08 ne va guère chasser sur les terres de ses concurrents plus pointus (Expression Media, Lightroom, Aperture) et GraphicConverter ou Photoshop Elements restent pertinents à ses côtés. Il est toujours limité pour gérer des photothèques enregistrées sur des supports externes et le bricolage reste de rigueur pour partager une unique photothèque entre plusieurs comptes d’un même Mac (contrairement à iTunes). Mais de toute la suite iLife, iPhoto est celui qui demande le moins d’effort pour être maîtrisé tout offrant nombre de services. Et cette version confirme globalement cette simplicité d’emploi. En revanche, il est temps qu’Apple se penche sérieusement sur les contrôles qualité d’iLife. Erreurs ou oublis de traduction abondent dans iPhoto’08. Déjà une mise à jour 7.0.1 est sortie (effaçant un bug dans la Galerie web). Et les problèmes de finition dans cette suite emblématique d’Apple commencent à s'ériger en tradition.

Note

Les plus :

Les événements Les raccourcis clavier pour les mots clefs Le mode édition amélioré La prévisualisation avant déchargement d’un appareil photo Les fonctions de masquage et de drapeaux L’élégance de la Galerie web

Les moins :

Quelques maladresses dans l’interface utilisateur La fonction de comparaison d’images sommaire Les vidéo AVI incompatibles avec la Galerie web. Des erreurs dans la localisation française
8
10

Prix :
79 € en version mono-utilisateur (gratuit sur les dernier Mac). 99 € en Pack Familial (cinq postes).

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